L’université Savoie Mont Blanc a porté plainte après la découverte d'affiches à la gloire du maréchal Pétain et de la Milice française sur les murs du campus de Jacob-Bellecombette, près de Chambéry. Un acte qui suscite "beaucoup d'émoi" alors que la France commémore les 80 ans des combats des Glières lors desquels près de 150 Résistants ont perdu la vie.
"On n’a jamais eu une attaque aussi forte sur le campus" affirme Laurent Ripart, professeur d’Histoire et directeur de l’UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines à l’Université Savoie Mont Blanc. Ce lundi 25 mars au matin, sur le campus de Jacob-Bellecombette, les étudiants ont découvert "des affiches de Pétain partout et des affiches de la Milice française, siglées Joseph Darnand" témoigne l’enseignant.
Joseph Darnand, condamné à mort par la Haute Cour de justice et fusillé le 10 octobre 1945, était l’ancien chef de la milice du régime de Vichy. "Ce sont des supplétifs de l’état collaborateur français dont l’activité était essentiellement liée à la chasse et à la déportation des Juifs et de tous les Résistants" explique le professeur savoyard avant d'ajouter : "Ce sont ces milices qui ont suppléé la Gestapo, les divisions allemandes et qui ont réprimé, torturé, massacré les Résistants".
"C’est dramatique"
Ce mardi 26 mars, la France commémore les 80 ans de la fin du maquis des Glières, en Haute-Savoie, où près de 150 Résistants ont perdu la vie en 1944. "C’est dans ce contexte-là que l’on essaie de faire passer les bourreaux pour des martyrs, ceux qui ont fait les pires crimes de notre histoire pour des gens dont il faudrait faire l’apologie" regrette Laurent Ripart. "Et c’est dramatique que cela se passe sur ce campus de Lettres, ce campus qui enseigne l’histoire. Tout ce qu’on essaie de transmettre est radicalement remis en cause".
On a l’impression de se retrouver 80 ans en arrière.
Laurent Ripart, professeur d’Histoire à l’Université Savoie Mont Blanc
"C’est une tentative de révision de tout ce qui fonde notre Histoire mais aussi notre passé commun en tant que citoyens, attachés à des valeurs de démocratie, de rejet des haines raciales" poursuit le professeur, précisant que cet acte n’est pas le premier sur le campus et que "depuis une dizaine d’années, la ville de Chambéry voit se développer des actes d’un tout petit groupe néonazi mais qui agit de tous côtés". "Ce sont des groupes dont il faut absolument se débarrasser, il faut que cette idéologie s’arrête parce que c’est trop dangereux pour la société" conclut Laurent Ripart.
"Une réaction face aux réactionnaires"
Lancelot Forestier, porte-parole du parti Europe Ecologie Les Verts en Savoie, souhaite rappeler que "l’extrême droite n’est pas un projet politique comme les autres".
Cet acte est un hommage à la xénophobie, à l’antisémitisme et à la haine des autres. C’est ça le projet politique de l’extrême-droite.
Lancelot Forestier, porte-parole du parti Europe Ecologie Les Verts en Savoie
"J’ai été choqué que cela se passe à l’université" poursuit l’élu. "C’est là que l’on apprend tous les jours à démonter point par point les idées l’extrême droite en produisant de la donnée scientifique, de la recherche intellectuelle et en plus on le fait avec tout le monde, avec des gens qui viennent du monde entier. En plus, on apprend à avoir une ouverture d’esprit, un esprit critique". Lancelot Forestier attend désormais "une réaction face aux réactionnaires".
L'université porte plainte
"Ces inscriptions ont suscité, à raison, beaucoup d’émoi chez les étudiants et personnels du
campus de Jacob-Bellecombette" a affirmé, ce lundi 25 mars, la direction de l'université Savoie Mont Blanc dans un communiqué. L'établissement a décidé de porter plainte et "condamne avec la plus grande vigueur de telles incitations à la haine", demeurant "un espace serein dédié aux études, aux échanges et au dialogue, à l’opposé exact de cette propagande nauséabonde".
Selon Philippe Galez, le président de l’université Savoie Mont Blanc, "les étudiants, les enseignants et les services de l’université se sont échinés toute la matinée [du 25 mars, NDLR] à retirer les traces de ces affiches et de ces tags".
C’est un geste abject. Ce sont les valeurs républicaines qui sont attaquées.
Philippe Galez, président de l’université Savoie Mont Blanc
"Il y a déjà eu une série de tags et d’affiches l’année dernière, au mois d’avril. J’espère vivement que les auteurs seront confondus et traduits en justice" confie Philippe Galez à France 3 Alpes.