La crise du nouveau coronavirus et le Brexit malmènent le monde du vin français. En Savoie, les effets ne se font pas encore directement sentir, mais les viticulteurs et négociants sont attentifs et réfléchissent déjà à l'avenir de leur profession.
Au pied du mont Granier, Charles-Henri Gayet exploite 35 hectares de vignes. Il est aussi négociant en vins de Savoie avec 2 millions de bouteilles vendues chaque année. Et pourtant, plusieurs fléaux pèsent sur son exploitation viticole. Bien que sa production ne soit pas exportée en Chine, il craint les effets indirects du nouveau coronavirus, le Covid-19, sur ses ventes.
"Pour l'instant les vins de Savoie se portent bien puisqu'on a une vente qui correspond à la production. Les problématiques liées au coronavirus, ça nous impacte peu directement puisque pour l'instant, il y a peu de vins de Savoie vendus dans le monde asiatique. Mais on a beaucoup de vins français vendus là-bas, qui ne se vendent plus, donc qui vont revenir sur un marché français qui est déjà en concurrence directe", analyse le viticulteur présent sur plus de 20 pays pour un chiffre d'affaires de 200 000 euros.
Car côté chinois, la crise sanitaire provoquée par le nouveau coronavirus pourrait déstabiliser le marché mondial du vin, organisé autour de grands salons internationaux qui permettent les rencontres et la commercialisation des crus de l'année précédente. Plusieurs rendez-vous, dont le plus important du pays prévu à Chengdu du 26 au 28 mars, ont ainsi été annulés.
Chute des exportations
A cela, il faut ajouter les taxes américaines sur le vin et le Brexit qui laisse de nombreux exportateurs dans l'incertitude. Les ventes des vins français sont effectivement plombées par des surtaxes douanières, imposées par les États-Unis. Depuis mi-octobre, elles concernent 25% de la valeur d'une bouteille.
Les professionnels du secteur ont demandé à l'État de débloquer 300 millions d'euros face à la chute vertigineuse de leurs exportations vers les États-Unis, chiffrée à 17,5%. Sur les coteaux de Brison-Saint-Innocent, dans le berceau du Chardonnay, c'est un autre fléau qui inquiète Xavier Jacqueline. Le viticulteur termine la taille de ses 6 hectares de vignes, inquiet des vendanges à venir.
"On a peur que les bourgeons démarrent très rapidement et qu'on ait un gel de printemps fin avril-début mai au moment des saints de glace. Là, on peut perdre un tiers ou la moitié de la récolte", craint-il. On dit que la vigne pleure lorsque la sève monte. Mais les viticulteurs savoyards n'ont pas l'intention de se laisser submerger : ils ont décidé de se concentrer sur le marché français où ils considèrent que les vins de Savoie n'ont pas encore la place qu'ils méritent.