Le bréviaire de Marie de Savoie, datant du XVe siècle, est actuellement en cours de restauration à la médiathèque Jean-Jacques Rousseau de Chambéry. Une fois l'opération terminée, le manuscrit prendra la direction du Louvre de Paris, dans le cadre d'une exposition temporaire en mars 2024.
Le bréviaire de Marie de Savoie est un manuscrit "connu de tous les Savoyards", affirme Émilie Dreyfus, responsable du service Conservation et Patrimoine, à la médiathèque Jean-Jacques Rousseau de Chambéry. Jamais restauré, le "trésor" du XVe siècle, avec son enluminure milanaise, est en train de retrouver une seconde jeunesse. Il se prépare à prendre place au musée du Louvre de Paris, à l'occasion d'une exposition temporaire sur le peintre Van Eyck, qui débutera en mars 2024.
"C’est une restauration qu’il fallait faire depuis longtemps, dans la mesure où chaque manipulation risquait d’aggraver le pliage des premières pages." La demande de son emprunt par le musée national était donc l’occasion. "L’usage et le temps ont fait que le document a perdu ses fermoirs d’origine", servant à maintenir l’ouvrage, précise la conservatrice.
Un manuscrit chargé d'histoire
Le bréviaire de Marie de Savoie est un objet très convoité. "On est beaucoup sollicité pour son prêt. Depuis 2004 et son exposition à Turin, il n’a pas quitté la bibliothèque." L'ouvrage se caractérise par plusieurs points remarquables.
En premier lieu, "il est très en lien avec l’histoire et la constitution du duché de Savoie". Amédée VIII, à l'origine du duché, était le père de Marie de Savoie. Pour sceller la paix entre sa seigneurie et le duché de Milan, "il a donné sa fille en mariage" avec Philippe-Marie Visconti, le duc de Milan, en 1428. C'est dans le cadre de cette union que le bréviaire a été fabriqué par des enlumineurs milanais, entre 1431 et 1438. L'alliance est illustrée "dès la première page où l’on voit les armes des deux duchés mêlées", indique Émilie Dreyfus.
Par ailleurs, le manuscrit est richement décoré puisqu'il était adressé à une princesse. On y trouve des scènes illustrant des textes bibliques. Dans ces pages, beaucoup d'animaux sont présents. À la fois, des animaux communs au territoire, comme le gypaète barbu, mais aussi des animaux plus exotiques, comme le guépard.
L'autre particularité du livre est sa destinataire : Marie de Savoie. "Il est adressé à une femme et à une laïque, qui n’appartient pas aux ordres religieux". Or, les bréviaires étaient adressés aux hommes d'Église explique la responsable du patrimoine de Chambéry. "Ce qui était assez commun à cette époque, c'était de faire des livres d’Heures. C’était un objet de distinction afin de montrer son rang."
L'existence du bréviaire a longtemps été ignorée. Il a fallu attendre plusieurs siècles avant qu'il soit découvert dans les combles du château de Chambéry, dans les années 1820. "Lors de sa redécouverte, il a été proposé au royaume de Sardaigne qui l’a laissé à la ville."
Une mise en lumière temporaire
Depuis, le manuscrit a suscité un large engouement, de la part des musées, mais aussi du public qui le demande lors des journées du patrimoine. Sa restauration a débuté en octobre dernier. La contrainte a été de faire venir le restaurateur à plusieurs reprises, dans les locaux de la médiathèque. Les feuilles fragilisées ont été remises sous tension. L'opération a coûté plus de 5 000 euros. Une fois finalisé, le bréviaire de Marie de Savoie sera escorté jusqu'à Paris, peu avant le début de l'exposition.
Après son séjour au Louvre, le document pourrait être exposé une dernière fois lors des journées du patrimoine qui ont lieu en septembre. Il retrouvera ensuite sa place dans la réserve de la bibliothèque afin qu'il garde tous ses traits et ses couleurs d'origine.