VIDÉO. "Sans ce logement, on ne serait pas venus" : les saisonniers, un public "à séduire" autant que les vacanciers à La Plagne

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La station de La Plagne fidélise ses saisonniers grâce à des offres centrées sur l'hébergement et les services en station ©France 3 Alpes / V. Cooke - D. Bourget - Q. Maury

La station de ski de La Plagne, en Savoie, est l'une des plus fréquentées au monde, en hiver. Trois mille saisonniers s'activent en coulisses pour la faire tourner. Pour attirer cette main d'œuvre, la station de Tarentaise a investi dans l'immobilier et multiplie les services dédiés pour les fidéliser.

"Se lever le matin, prendre le télésiège tous les jours, partir au travail à skis, c'est plutôt cool" : Charlotte Boulin effectue sa troisième saison à La Plagne. La jeune femme, venue de Romorantin dans le Loir-et-Cher, équipe les vacanciers dans l'antichambre de la piste de bobsleigh. Elle a signé un contrat de plusieurs mois, de fin octobre à fin mars.

L'idée, pour elle, est "d'économiser un maximum". "Vu que j'ai un autre boulot en extra, ça me permet de faire un peu plus d'argent pour voyager et profiter un peu", dit-elle, "vu que mon loyer ça va". 

Car Charlotte a la chance de ne payer "que" 350 euros par mois de loyer pour son studio situé en station. Une rareté dans le monde des saisonniers, soumis, comme les vacanciers, à la loi de l'offre et de la demande en matière de location. En station, les loyers sont prohibitifs pour la population locale comme pour ces travailleurs essentiels.

Un investissement immobilier de six millions d'euros

À La Plagne, la mairie a donc choisi d'investir dans l'immobilier pour résoudre une partie du problème. La municipalité a acheté une résidence de 62 appartements par préemption pour loger ses saisonniers.

"On s'est rendu compte qu'il fallait absolument le faire. C'est un investissement de 6 millions d'euros pour la commune : on a acheté 62 appartements et 92 places de stationnement. Ce n'est pas forcément notre rôle mais si la mairie ne le fait pas, qui va le faire ?", indique Jean-Luc Boch, le maire de La Plagne-Tarentaise (DVD).

"C'est essentiel au fonctionnement d'une station", poursuit l'édile. "C'était une occasion car il s'agit de logements touristiques totalement refaits donc qui étaient en très bon état et le prix de vente, comme c'était une vente en masse, était ultra intéressant".

"C'est une très belle opération pour la collectivité même si on ne recherche pas la rentabilité, ce n'est pas le but. Mais ça va nous éviter de construire un bâtiment spécifiquement pour les saisonniers, comme on l'a déjà fait précédemment sur la station. Là, en six mois, nous étions propriétaires et nous avons rempli la résidence dès le premier hiver", se réjouit le maire. 

La station accueille plus de deux millions de skieurs chaque année. Près de 3 000 saisonniers la font fonctionner nuit et jour. Mais depuis la pandémie de Covid-19 et la fermeture des remontées mécaniques l'hiver 2020-2021, les professionnels du tourisme ont peiné à recruter. Leurs saisonniers ont pris la tangente, optant pour d'autres carrières plus près de chez eux ou des emplois à durée déterminée mieux rémunérés. 

Aujourd'hui, les stations doivent donc être compétitives pour attirer la main d'œuvre. Et cela commence par le logement. 

Même si vous augmentez leur salaire, si vous n'avez pas de quoi les loger, vous ne les attirerez pas.

Jean-Luc Boch

maire (DVD) de La Plagne-Tarentaise

"Sans cet appartement, on ne serait pas venus faire la saison", disent en choeur Charlotte et son ami d'enfance Sylvain, dit "Gwada", lui aussi employé sur le circuit de la piste de bobsleigh. 

L'argent ne fait pas tout, ajoute en substance Jean-Luc Boch. "Même si vous augmentez leur salaire, si vous n'avez pas de quoi les loger, vous ne les attirerez pas". 

"Les saisonniers, c'est quand même ceux qui font vivre la station", continue Charlotte. "On n'a pas énormément d'avantages, donc au moins, avoir un logement disponible, c'est le minimum", estime la jeune femme. 

La station a donc mis en place une stratégie de communication visant à "séduire" et "vendre l'image de la station" auprès des saisonniers, comme elle peut le faire par ailleurs auprès des vacanciers.

Le site internet dédié aux offres d'emploi a été repensé pour faciliter les candidatures en ligne. Depuis le début des années 2010, une "maison des saisonniers" a également vu le jour à La Plagne.

Carine Pouchoy est là pour les aider à trouver un médecin, une assistante sociale ou à remplir leurs documents administratifs. Mais pas seulement.

"Durant la saison, c'est aussi beaucoup d'écoute. On a certaines personnes qui viennent travailler ici qui n'ont, pour certains, jamais vu la neige. Cela peut paraître dingue mais c'est vrai. Ils sont loin de leur famille, de leurs amis et être là, ça permet de papoter, de créer un petit lien", explique la chargée de mission de l’Espace Saisonniers de La Plagne.

Maison de services et personnel à l'écoute

Du reste, le marché de l'emploi n'est pas figé au premier jour d'ouverture des pistes. "Un certain nombre de saisonniers ne continuent pas au bout de la période d'essai : soit parce que l'établissement ou le job ne leur plaît pas ou parce qu'ils ne font pas l'affaire, d'autres se blessent. Donc ils reviennent ici pour chercher d'autres offres d'emploi, ou pour rentrer chez eux", continue Carine Pouchoy.

En position de force sur ce marché tendu de l'emploi, les employés qualifiés sont regardant sur leurs conditions d'hébergement, leur salaire et leurs conditions de travail. Manon Auriach est réceptionniste dans un hôtel-restaurant qui fournit le gîte et le couvert à ses salariés et leur propose deux jours de repos consécutifs, ce qui est plutôt rare. 

Deux repos consécutifs hebdomadaires, un luxe...

"C'est vrai que dans l'hôtellerie-restauration il y a beaucoup d'offres, surtout en saison. Donc on prend en compte tous les avantages que l'on peut nous proposer et je pense que l'on choisit majoritairement sur ces points-là", déclare la jeune femme. 

Diplomée de Sciences Po, Louise Cianci a, elle, fait le choix de travailler comme animatrice dans un centre de vacances. Pendant ses pauses, elle peut emprunter gratuitement du matériel de ski. 

"Je ne pourrais pas me le permettre si je devais payer tout ça. C'est donc l'un des bons avantages pour moi, ça me permet de profiter de tout ce qu'il y a autour de moi", indique Louise qui travaille à l'UCPA.

"Le fait de devoir attendre cinq semaines de congés payés pour le faire, je ne m'y retrouve pas vraiment donc je préfère concilier les deux, profiter au maximum et faire un travail qui me plaît aussi". Grâce à ces mesures incitatives, huit postes sur dix ont été pourvus cet hiver.

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