Le 12 mars, France 3 Auvergne-Rhône-Alpes a diffusé "Silence brisé", un documentaire réalisé par Sylvie Cozzolino. Le film s'intéresse aux victimes d'actes pédophiles, il lève le voile sur le long travail de reconstruction et leur quête d'apaisement.
Depuis plusieurs années, les affaires de pédophilie s’accumulent, dans l’église catholique, dans l’éducation nationale, dans la sphère familiale… là où les enfants se sentent en confiance, en sécurité. Grâce à certaines associations, comme "La parole libérée" à Lyon, la parole des victimes se libère et les scandales éclatent. Les agresseurs sont alors présentés à la justice. Mais parfois les victimes mettent des années à trouver la force d’en parler et il est trop tard, un délai de prescription empêche ces crimes d’être punis. Diffusé le 12 mars sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes, le documentaire "Silence brisé", réalisé par Sylvie Cozzolino, pose un regard sur trois victimes de pédophiles. Voici donc trois raisons de regarder ce film poignant qui tente de nous aider à comprendre pourquoi le silence est si dur à briser et la parole si difficile à libérer.
1. Pour Nanou
Enfant, Nanou a été confiée très jeune, avec sa soeur aînée, à ses grands-parents, leurs parents ne pouvant les élever. La petite famille vivait à Vaulx-en-Velin, dans le Rhône. La maison était située en face d'une église en bois, aujourd'hui détruite, où "les trois curés donnaient la messe et s'occupaient des enfants". A 60 ans aujourd'hui, Nanou ressent le besoin de témoigner, de raconter son calvaire. Jusqu'à l'âge de 13 ans, elle a subi le défilé des trois prêtres qui se relayaient chaque soir pour venir la violer dans sa chambre. Des années plus tard, en 2016, elle a retrouvé la trace d'un de ceux qu'elle accuse de l'avoir violée, il est le seul survivant des trois. La rencontre est discrètement filmée. Âgé de 91 ans, le prêtre fait preuve d'une incroyable mémoire jusqu'à l'évocation par Nanou des sévices dont elle a été victime. "Le premier besoin, c'est de lui faire voir que tu ne peux pas vieillir en toute impunité, c'est-à-dire que si il y a la prescription, jamais il n'aurait pu imaginer, que parmi les enfants qu'il a abusés, il y en ait une qui ressorte 55 ans après", se réjouit-elle.2. Pour "Valérie"
"Vers 4-5 ans, mon beau-père a commencé à avoir des actes un petit peu bizarre à mon égard", raconte "Valérie", "il me demandait de dormir dans son lit quand ma mère n'était pas là". La jeune enfant a alors dû subir les caresses, puis les attouchements et enfin les viols. A l'âge de 10 ans, un soir, elle a trouvé la force de repousser son agresseur, de s'enfuir et de trouver refuge dans la maison voisine où vivait sa meilleure amie. Le beau-père a été condamné uniquement pour attouchements sexuels, pas pour viol. Aujourd'hui, "Valérie" est en proie à un sentiment de culpabilité qui la ronge de l'intérieur mais elle veut avancer, sereinement, dans la vie. Elle parle de sa quête de bonheur. Après avoir connu toutes sortes d'addiction, elle s'est réfugiée dans une communauté thérapeutique et dans la foi pour panser ses blessures. Peu à peu, elle reprend goût à la vie et reconnaît une tentative de suicide à l'âge de 7 ans. Libérer sa parole aujourd'hui, elle l'espère, lui permettra un jour de devenir "une bonne maman".3. Pour "Julia"
En mars 2015, c'est l'effroi à Villefontaine, dans le département de l'Isère. Plusieurs écolières de cours préparatoires ont été sexuellement agressées par le directeur de l'établissement. Parmi les victimes, il y a "Julia". Elle a 9 ans. Son père évoque la colère, la tristesse, l'angoisse qui font suite à l'annonce d'une si terrible nouvelle. L'agresseur présumé, à qui les enquêteurs prêtent 61 victimes dans les différents établissements scolaires qu'il a fréquentés, n'aura pas de procès. Il s'est suicidé en prison en se pendant dans sa cellule. "Julia" est la victime d'un prédateur sexuel qui doit aujourd'hui redevenir une petite fille. Pour cela, elle peut compter sur son frère, sa soeur et ses parents. Sébastien, le père, a créé une association pour aider les victimes de pédophiles. "La parole doit se libérer, dit-il, parce que tout le monde est concerné, la société a les yeux fermés, à nous de lui ouvrir".Le débat