Vers 7h lundi matin, 150 auto-écoles venues de toute l'Auvergne ont mené une opération escargot pour contester la réforme du permis de conduire qui, selon elles, menace leur survie. Elles ont mis près de 2 heures pour relier Lempdes à la place Delille, à Clermont-Ferrand.
"La loi Macron est une déclaration de guerre ouverte contre les professionnels de l’apprentissage à la conduite qui sont scandaleusement mis dans une impasse", déclare Philippe COLOMBANI, président de l’UNIC, 1er syndicat représentatif exclusivement des écoles de conduite, qui a appelé à cette grande mobilisation nationale des auto-écoles le 9 février.Contrat de formation et d'évaluation à distance, possibilité pour les loueurs de voiture équipée de double commande de former les conducteurs, recours à d'autres intervenants que les inspecteurs pour les examens pratiques au permis, notamment des agents de La Poste : les professionnels dénoncent des amendements à la loi Macron qui vont à "l'encontre de la profession et donc de la sécurité routière".
Les mesures proposées par le gouvernement vont "à l'encontre de la sécurité routière", s'est inquiété le Conseil national des professions de l'automobile (CNPA) dans un communiqué, dénonçant des "enjeux de pouvoir" entre les ministères de l'Intérieur et de l'Economie.
Au mépris des intérêts des élèves
La réforme du permis de conduire instaurée dans la loi Macron et votée à l'Assemblée nationale la semaine dernière prévoit entre autres 45 jours d'attente maximum entre deux passages à l'examen de conduite, le recours à des agents d'entreprises publiques comme La Poste pour assurer certaines missions des inspecteurs (le code et le passage du permis, si le délai d'attente est supérieur à 45 jours).
Emmanuel Macron "entend libéraliser le secteur, au mépris des intérêts des élèves", estime le CNPA, qui rappelle que l'objectif fixé par le gouvernement est de faire passer le nombre de morts sur les routes sous la barre des 2.000 d'ici 2020, après une hausse de la mortalité routière en 2014, la première en douze ans.
"Ça fait six mois qu'on travaille avec les services du ministère de l'Intérieur pour réformer le permis de conduire", souligne Frédéric Martinez, directeur du réseau d'auto-écoles ECF, agacé que "les amendements au projet de loi Macron viennent tout court-circuiter" alors que les organisations s'apprêtaient à remettre les conclusions de leurs travaux "dans les semaines à venir".
Par exemple, "supprimer l'obligation des 20 heures de cours minimum" pour passer le premier examen pratique est "un mauvais message", "un message politique et démagogique" quand on sait qu'"en moyenne, les candidats font 35 heures de cours avant de se présenter à l'examen", estime M. Martinez.
"La profession en a ras-le-bol", peste Xavier Savignac, vice-président du réseau d'auto-écoles CER, qui demande que "le ministre de l'Intérieur reprenne le dossier en main parce que cette réforme mérite mieux que quelques amendements". "On donne l'impression que les auto-écoles font exprès de faire durer les formations pour s'en mettre les poches, mais un directeur d'agence gagne 1.850 euros net pour 200 heures de travail", ajoute M. Savignac.
Reportage : Christian Lamorelle, Eric Taxil. Montage : Sébastien Bonnetot. Intervenants : Thierry Montzamir (intersyndicale auto-écoles), Bernard Delambert (Intersyndicale auto-écoles)