Il n'est pas breton, et a juste vécu quelques années dans la région. Antoine, « entre 30 et 40 ans », habite non loin de Lyon. Avec son ami Gaël, breton lui, pour le coup, ils ont créé il y a un peu plus d'une semaine les pages Twitter et Facebook des bonnets rouges. Au risque d'être récupérés.
C'était il y a deux semaines, Antoine est devant son poste de télévision lorsqu'il découvre ces agriculteurs et transporteurs coiffés de bonnets rouges affrontant les CRS près du portique du Pont de Buis. «J'ai trouvé ce symbole historique très fort. J'ai eu envie de créer ces comptes pour faire de l'information, partager le ras-le-bol des abus fiscaux», raconte ce spécialiste de la communication.
Rapidement, les followers (les abonnés du compte) des bonnets rouges se multiplient. Le compte est cité dans bon nombre de tweets concernant l'écotaxe. Antoine « follow back », s'abonne en retour, à ceux qui le suivent. Mais au bout de quelques heures, il voit s'ajouter de plus en de militants de la Manif pour tous. Surtout, il voit surgir Marine Le Pen : « On a enlevé le logo " non à l'injustice fiscale" de notre compte twitter quand Marine Le Pen l'a affiché en photo de profil sur le sien. On s'est dit que ce n'était pas judicieux." Il cesse alors de suivre systématiquement ces nouveaux abonnés. Le logo, déjà partagé par un grand nombre de gens, restera sur la page Facebook.« Ce que je fais dans mon boulot, c'est de l’événementiel, c'est très éloigné de tout ça. Là, c'était de l'actualité pure. J'ai aussi vu ça comme un acte citoyen. »
L'enquête de Samuel Laurent, journaliste au Monde les soupçonne d'être liés au mouvement de la Manif pour tous et à des groupe d'extrême droite. "Rien à voir, explique Antoine. Je me suis seulement abonné par courtoisie aux premiers comptes qui me suivaient." Des comptes de mouvements identitaires très souvent. Après avoir lu cette enquête, il s'est désabonné de ces nombreux comptes.
On veut éviter de voir ces comptes récupérés par les mouvements de la Manif pour tous ou d'autres mouvements identitaires. On n'y est absolument pas liés. On n'a rien à voir non plus avec la FDSEA. Je pense qu'on a réussi à rester dans une forme d'équilibre
Antoine se définit comme centriste politiquement, tout comme son collègue Gaël. L'un plutôt centre gauche, l'autre centre droit. « On a juste trouvé que ce mouvement était intéressant, que le bonnet était un élément intéressant. C'est notre façon de participer au débat."
Gaël connaît bien la problématique bretonne, le combat breton spécifique sur l'écotaxe. "Moi, je trouve le mouvement intéressant dans une perspective plus globale. Ça dépasse le cadre partisan, on parle d'un problème de fond. C'est un thème comme l'écologie. Tous les partis doivent s'en emparer. Toutes les régions se reconnaissent dans cette problématique fiscale. »
Effectivement, sur Twitter les bonnets rouges ont fait des petits : pas moins de 14 comptes attachés à différentes régions ont fait leur apparition sur la toile. Un témoin numérique de la vague rouge qui pourrait déferler sur la France en mars prochain ?