Le 2 juillet 2022, Suzanne s'est volatilisée. En quelques minutes. Atteinte de la maladie d'Alzheimer, elle a quitté sa maison de Saint-Fiacre, dans les Côtes-d'Armor, échappant à la vigilance de Marcel, son mari. Ce dernier la recherche depuis quatre mois. Mais elle reste introuvable. Témoignage.
Depuis quatre mois, Marcel le Goff remue ciel et terre pour retrouver sa femme. Il colle des avis de recherche ici et là. Il garde aussi son téléphone à portée de main, au cas où. Il raconte qu'il vient de recevoir un appel d'une habitante de Ploumilliau. "Elle me certifie qu'elle a vu Suzanne sur la route".
Il ne sait plus trop ce qu'il peut croire. Il dit même qu'il a parfois des idées noires. "Sans elle, ma vie est fichue" confie cet homme de 82 ans. Depuis le 2 juillet, le temps s'est arrêté. Ce jour-là, Suzanne, qui est atteinte de la maladie d'Alzheimer, quitte leur maison de Saint-Fiacre, près de Guingamp. "J'étais en train de laver la vaisselle, relate l'octogénaire. Je n'ai pas fait attention pendant quelques minutes et voilà".
"Elle marche vite"
Marcel part à sa recherche, emprunte des petits chemins, laisse ses coordonnées aux personnes qu'il croisent puis finit par appeler les gendarmes. Lesquels déploient rapidement des moyens. Hélicoptère, drone, chien, battue dans les bois sont mis en oeuvre. En vain. Suzanne reste introuvable.
Marcel Le Goff n'en démord pas, l'hypothèse tourne en boucle dans sa tête : pour lui, Suzanne est montée à bord d'une voiture. "C'était déjà arrivé un mois avant sa disparition, explique-t-il. Les gens qui l'ont trouvée l'ont ramenée à la maison. Elle leur avait dit qu'elle allait voir ses parents, sauf qu'ils sont morts. Quand on la voit, on ne peut pas deviner qu'elle est malade. Elle a une allure sportive. Elle marche vite, même moi je n'arrive pas à la suivre".
Elle a une énergie incroyable et cette énergie-là, elle ne l'a pas perdue
Marcel Le Goff
Cette ancienne marathonienne, âgée aujourd'hui de 75 ans, a longtemps usé ses baskets sur le bitume quand elle vivait encore dans le Finistère. "Elle a toujours eu besoin de se dépenser, elle a une énergie incroyable et cette énergie-là, elle ne l'a pas perdue" souligne Marcel qui se demande comment elle "survit" depuis quatre mois. "Elle est partie sans flotte, sans rien, avec juste un petit pull de rien du tout sur le dos. Je ne sais pas si c'est possible de tenir dans ces conditions".
"Attente insupportable"
Marcel Le Goff s'accroche à la moindre information. Même quand une médium lui assure que sa femme est vivante. "Je l'ai consultée deux fois, dont une il y a un mois. Elle m'a dit des trucs sur ma vie privée qui m'ont bluffé, alors pourquoi pas, hein ?".
Dans la maison de Saint-Fiacre, l'espoir ne tient qu'à un fil. Les journées s'étirent, sans nouvelles de Suzanne. Les nuits sont morcelées. "Je suis triste, alors que je suis plutôt joyeux de nature, lâche-t-il. Le chat non plus ne se comporte plus comme avant. On est là, tous les deux, dans une attente insupportable".
L'octogénaire remue les souvenirs. La rencontre avec Suzanne à Morlaix, le mariage il y a 22 ans. "On a vécu des choses difficiles dans nos vies d'avant, elle et moi, alors on s'était promis que l'on prendrait soin du bonheur de cette deuxième vie". Et puis la maladie d'Alzheimer est venue petit à petit grignoter la mémoire de sa femme. "Elle ne me reconnaît plus. Quand je lui demande comment je m'appelle, elle rigole et répond qu'elle ne sait pas. Alors, où a-t-elle pu aller dans son état ? Je veux savoir ce qu'elle est devenue. Même le pire".