Alors que se tiennent, mercredi 9 octobre et jeudi 10 octobre, les Rencontres nationales de la conchyliculture et des cultures marines, à Vannes, les mytiliculteurs de la Côte d'Émeraude affrontent des pertes importantes à cause des araignées de mer. Ces crustacés, qui se font plus rares dans le Sud de la Bretagne, semblent s'être installés sur le littoral Nord.

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Une vingtaine d'entreprises élève des moules de bouchot dans la baie de l’Arguenon et la baie de la Fresnaye, dans les Côtes-d'Armor. Certaines sont implantées là depuis les années 1950. Toutes déplorent une chute de leur production de moules, à cause des araignées qui viennent se restaurer sur les pieux en bois.

"Regardez, il y en a partout !", montre François Batard, mytiliculteur à Saint-Jacut-de-la-mer, en s'approchant des bouchots à marée basse. "Ce sont des moules qu'on devrait vendre l'année prochaine, à maturité, mais déjà, il en manque 15%", estime-t-il.

Pourtant, ses moules sont protégées par des filets en plastique entourant le bouchot. Mais de nombreuses araignées sont quand même parvenues à se glisser à l'intérieur pour se nourrir des coquillages. "C’est navrant, il n'y a pas d’autres mots". Malgré les gaines en plastiques installées sur les bouchots comme sur les cordages de naissains, les pertes restent élevées.

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Une prédation massive

Depuis six ans, les araignées de mer viennent en nombre dévorer les moules. En 2024, la prédation est plus massive que les années précédentes. Les moules de la Côte d’Émeraude vont-elles disparaitre ?

Des casiers de pêche sont aussi installés à proximité des exploitations de moules. D'avril à novembre depuis trois ans, Cyrille Auffret, garde de la baie de l'Arguenon, est chargé d'y piéger les araignées pour les relâcher ensuite au large. Ce sont dix tonnes de crustacés qui ont ainsi été déplacées depuis cinq mois. Le pêcheur mandaté par le comité régional de la conchyliculture doute de l'efficacité de cette mesure : "On défait un tas de sable pour en refaire un autre."

Projet "Spider"

S'il n'est pas question de dépeupler les côtes de leurs araignées de mer, c'est qu'elles font le bonheur des pêcheurs dans certains ports. En cinq ans, les débarques dans les ports bretons et normands ont doublé, passant de 4 000 à 8 000 tonnes par an. 

À lire. Pourquoi les araignées de mer prolifèrent-elles en Bretagne et en Normandie?

L'Ifremer vient de lancer une vaste étude, le projet "Spider", qui doit permettre de comprendre pourquoi la population des araignées de mer se porte si bien dans le golfe normano-breton.

Ces dix dernières années, le nombre d'araignées a été multiplié par trois, voire par quatre, notamment entre Paimpol et Granville. Dans la baie de l'Arguenon, Cyrille Auffret participe à cette étude, en baguant les plus grosses araignées, afin de mieux comprendre leurs déplacements.

Une reproduction favorisée par le réchauffement climatique

Plusieurs raisons pourraient expliquer cet accroissement. D'abord, la pêche aux araignées de mer est plutôt bien encadrée par une réglementation qui empêche de les capturer avant qu'elles aient atteint l'âge de se reproduire.

L'autre explication est liée au dérèglement climatique : selon les scientifiques, les hivers devenus plus doux qu'il y a une quinzaine d'années pourraient les encourager à se reproduire davantage, deux fois par an au lieu d'une fois par an.

À la barre de son amphibie, François Batard, le mytiliculteur de Saint-Jacut-de-la-mer, estime que l'entreprise familiale, implantée dans la baie depuis quatre générations, pourrait ne pas se relever d'une telle calamité : "hors de question que mes enfants reprennent l'exploitation, tant que le problème des araignées n'est pas résolu."

(Avec Nathalie Rossignol)

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