Cette semaine du 8 mars, les généralistes n'auront pas accès aux doses de vaccin contre le coronavirus. Ces dernières seront en effet réservées aux pharmaciens, une décision de la direction générale de la santé mal comprise.
C'est un mail de la Direction générale de la santé (DGS) qui a jeté un froid. Envoyée avec la mention "urgent", le message indique aux généralistes : "La commande de la semaine du 8 mars (pour livraison la semaine du 15 mars) est exceptionnellement ouverte aux seules officines en raison du faible nombre de doses livré par le laboratoire AstraZeneca pour la semaine en question."
"Au bout de la chaîne" comme le précise le Docteur Eric Henry, généraliste dans le Morbihan, l'ambiance s'est rafraîchie d'un coup, entre médecins libéraux et pharmaciens. "Cette annonce vient semer la pagaille alors que des coordinations ont été mises en place sur le territoire, pour répondre aux injonctions du ministère, avec des acteurs qui jusque là s'entendaient bien", regrette-t-il. Et d'ajouter : "Là, ça relance la guerre syndicale."
On vend une montée en charge et en même temps la denrée se raréfie
"Il ne faut pas que cela devienne une guerre de clochers", abonde un élu de l'union régionale des médecins libéraux installé en Ille-et-Vilaine. Lui ne cache pourtant pas sa colère, face à une communication trop décalée entre les annonces et la réalité du terrain, "qui sème la confusion chez les patients, entraîne de l'inquiétude et parfois de l'agressivité."
Il rappelle que pour lutter contre la pandémie, il faut de la matière première. A ce rythme-là, les généralistes ne finiront par ne plus avoir qu'une dose tous les 15 jours. "On fait toujours des commandes pour la semaine suivante, elles arrivent pour l'instant tard, alors qu'on s'organise pour proposer des rendez-vous, passer les coups de fil d'éligibilité en amont."
Avec la vaccination dans les officines, il espère "qu'on ne demandera pas aux médecins de faire des papiers pour ça. Cela embolisera encore nos cabinets."
Une cacophonie qui pourrait être démobilisante
Du côté de l'ordre des médecins, on dénonce une décision "inacceptable". Jean-François Delahaye, président du Conseil régional de Bretagne de l'ordre souligne : "On ne peut pas la considérer comme une méprise de communication mais elle apparaît comme du mépris." Il rappelle : "Les généralistes se sont retrouvés en première ligne pendant cette pandémie, six fois plus exposés que le reste de la population."
Selon lui, cette situation démontre la variabilité et la défaillance dans l'organisation de la vaccination. Il réclame rigueur et transparence, car les médecins ne peuvent pas répondre et s'adapter constamment à des exigences contradictoires. "Cette cacophonie pourrait les démobiliser." Il s'interroge aussi. "Que la seconde vaccination soit réalisée par les pharmaciens, pourquoi pas mais pour la primo vaccination il faut l'avis d'un médecin."
Contacté, l'ordre des pharmaciens de Bretagne ne veut pas commenter la décision prise par la DGS, "tout le monde a été surpris" indique-t-on.
Complètement désabusé, le syndicat MG France demande de son côté, la démission de Jérôme Salomon, directeur général de la Santé.