Le site brestois des laboratoires Boiron va fermer définitivement en février 2021. Les 18 salariés se mobilisent "pour obtenir des conditions de départ à la hauteur". Depuis la semaine dernière, ils opèrent un débrayage d'une heure tous les matins. L'ultime combat face au géant de l'homéopathie.
"En onze ans de boîte, je ne me suis jamais dit en montant dans ma bagnole : 'je n'ai pas envie d'y aller'. Désormais, j'ai du mal à venir au travail". Aurélie Perrin ne cache pas son amertume après la décision du groupe Boiron de fermer son site de préparation à Brest. Cette directrice adjointe, pharmacienne de métier, relate que les dix-huit salariés sont "en colère, tristes et solidaires à la fois".
"Salariés virés, actionnaires blindés"
Depuis vendredi dernier, ils débrayent, chaque matin, pendant une heure, devant le laboratoire brestois qui conditionne les prescriptions homéopathiques pour 550 pharmacies du Finistère, des Côtes d'Armor et du Morbihan. Sur les grilles qui entourent le site, cette banderole : "salariés virés, actionnaires blindés". Si la fermeture définitive est prévue le 6 février 2021, pas question pour ceux et celles qui vont perdre leur emploi d'accepter sans se battre "On veut obtenir des indemnités décentes parce que le groupe Boiron a les moyens de nous proposer mieux que ce qui est prévu" note cette salariée. "Il y a des gens qui ont 55 ans avec 35 ans d'ancienneté, qui se demandent comment ils vont retrouver du boulot, surtout dans ce contexte de crise sanitaire et économique".
Il y a trois ans, ils étaient une trentaine de salariés à travailler ici. Ils ont essuyé un premier plan social en 2017 et perdu une dizaine d'emplois. "Cette fois, c'est la deuxième et dernière vague", dit Aurélie Perrin.
646 emplois sur la sellette en France
Leader mondial de l'homéopathie, Boiron opère un dégraissage de ses effectifs en France. Douze sites de préparation et un gros site de production (celui de Montrichard dans le Loir-et-Cher) vont fermer. 646 emplois sont sur la sellette. En Bretagne, seul Brest passe à l'as. Avec des conséquences en cascade, notamment sur les salariés du site rennais qui vont devoir absorber l'activité pilotée depuis la pointe bretonne. "Leurs amplitudes horaires vont augmenter, c'est évident. Cela va changer aussi leurs conditions de travail, remarque Aurélie Perrin. Pour livrer les pharmacies qui sont dans notre périmètre, ils devront forcément commencer leur journée plus tôt".
Les salariés de Rennes ont, eux aussi, débrayé ce matin, "par solidarité" avec leurs collègues touchés par les fermetures.
"On se sent trahis"
Le déremboursement des traitements homéoptahiques, programmé au 1er janvier 2021, contraint les laboratoires Boiron à réduire la voilure. "Si Boiron avait su anticiper ce bashing de l'homéopathie l'année dernière, on n'en serait pas là" affirme-t-on à Brest.
Les salariés finistériens s'étaient mobilisés pour battre en brèche l'avis de la Haute autorité de santé qui jugeait l'efficacité de l'homéopathie insuffisante et préconisait son déremboursement. "On a le sentiment que Boiron nous a utilisés pour cette mobilisation, remarque Aurélie Perrin. On a fait signer la pétition pour que le remboursement soit maintenu, on a participé comme dans les autres sites à ce mouvement. Alors que Boiron savait déjà qu'il y aurait des licenciements. On se sent forcément trahis".
Les organisations syndicales et la direction des laboratoires Boiron doivent se réunir ce mercredi après-midi, au siège lyonnais du groupe. Un Comité social et économique (CSE) extraordinaire aura lieu jeudi 1er octobre.