Les producteurs de lait du Finistère ont demandé l'ouverture d'une enquête parlementaire à l'encontre des activités de la coopérative Sodiaal, l'un des principaux collecteurs de lait de la région. Ils demandent au laitier une meilleure rémunération.
Inquiétés par la sécheresse estivale et la montée des matières premières et de l'énergie, les producteurs laitiers du Finistère sont remontés. Ils demandent des comptes à Sodiaal, l'une des principales coopératives en Bretagne.
La coopérative, l'un des principaux collecteurs dans l'Ouest avec Lactalis, paie environ 400 euros les mille litres de lait. "Dans des pays comme les Pays-Bas et l'Allemagne, les rémunérations des producteurs tiennent compte de l'inflation, ils sont payés environ 100 à 150 euros de plus aux mille litres. C'est ce qu'on exige" signale Jean-Alain Divanac'h, président de la FDSEA du Finistère.
"On a formulé une demande de revalorisation à 50 centimes le litre (soit 500 euros les mille litres) en février au Salon de l'agriculture. On est ravis que la FNSEA nous rejoigne sur ce point, glisse Adrien Lefèvre, président de l'Association des producteurs de lait indépendants (APLI). Cette rémunération nous assurerait une marge de sécurité compte tenu du climat et des fluctuations du marché. (...) Nous subissons en ce moment une augmentation des prix de l'énergie, celui des engrais, des aliments du bétail, mais aussi du matériel. Tous les voyants sont au rouge, j'ai jamais vu ça," affirme l'agriculteur basé près de Rethel dans les Ardennes.
Une enquête parlementaire
Les éleveurs ont contacté par courrier les députés du Finistère afin de demander l'ouverture d'une commission parlementaire d'enquête sur les comptes de la coopérative. Ils sollicitent aussi la saisie du médiateur des relations commerciales, faute d'obtenir une réponse concrète de Sodiaal.
Si les producteurs s'attaquent à Sodiaal, c'est qu'ils peuvent bénéficier d'un effet domino. "Sodiaal nivelle les prix par le bas, valorise le moins bien, résume Jean-Alain Divanac'h. Il existe aujourd'hui une certaine connivence entre les coopératives" qui tentent de coller au mieux aux bas prix de Sodiaal, "à 5 ou 10 euros près sur la tonne de lait." "Lactalis paie les mille litres 10 à 12 euros de plus que Sodiaal, mais ils vont être obligés de s'aligner sur eux" confirme Adrien Lefèvre.
On souhaite comprendre pourquoi le prix du lait n'est pas revalorisé. On veut être certains que les efforts soient faits côté industriels. Mais on craint que les coopératives ne cachent des coûts de production mal gérés en s'appuyant sur les producteurs, devenus leurs variables d'ajustement. Elles ne font pas d'effort vis-à-vis de la grande distribution mais - pour parler crûment - se foutent de la gueule des producteurs !
Jean-Alain Divanac'hPrésident de la FDSEA 29
Pour les acteurs de la filière, le SPACE de Rennes, du 13 au 15 septembre, sera un rendez-vous charnière. "Il y aura des discussions, c'est certain, peut-être des réactions épidermiques face à nos revendications, confie Jean-Alain Divanac'h, qui ne compte pour l'instant pas mener d'action pendant le salon international de l'élevage. Mais ça peut aller très vite s'il y a des fins de non-recevoir de la part de directions de coopératives."
Le lait français en danger ?
Ce que craint Adrien Lefèvre, c'est que la filière française se démantèle petit à petit. "Certains collègues frontaliers commencent à produire exclusivement pour la Belgique, le Luxembourg ou l'Allemagne, qui paye 10 centimes de plus le litre. On n'a jamais vu une aussi grande différence et c'est dommage pour notre souveraineté alimentaire, on a un savoir-faire ici en France."
Il poursuit : "'Beaucoup de grands producteurs, diversifiés notamment dans la méthanisation qui est plus rentable, se disent que c'est en ce moment le bon contexte pour cesser leur activité laitière. D'ailleurs, à peu près neuf fermes sur 10 en France abandonnent aujourd'hui leur atelier laitier lors d'une transmission, signale-t-il, amer, avant de conclure : "Il faut réorienter les marges et c'est possible, avec un peu de volonté politique."