FinisteRestes29, où comment retrouver la patate avec des légumes moches

"Si j’avais fait ça il y a 20 ans, je pense que je n’aurais pas vendu un seul panier, mais là, toutes les planètes sont alignées." Karim Vincent-Viry a créé Finisterestes 29 il y a quelques semaines. L’entreprise propose des paniers de légumes invendus. Entre la crise économique, les difficultés des agriculteurs et les ambitions de protéger la planète, Finistérestes29 tombe au bon moment

Finisterestes29 n’a que quelques semaines, mais elle grandit tous les jours. L'entreprise ne comptait qu’une seule salariée début janvier, elle en a quatre, moins d'un mois plus tard. De nouveaux clients et des points de vente ne cessent de se manifester.

Karim Vincent-Viry n’en revient pas. "Le premier jour, on a eu 100 clients. Je me suis dit, c’est peut être un coup de chance ! Le deuxième jour, on a à nouveau eu 100 clients et le troisième jour, j’ai posté un message sur Facebook, j’ai eu des centaines de demandes, c'est dingue ! "

Karim Vincent-Viry a passé 30 ans dans la grande distribution, notamment en tant que responsable des achats dans le secteur des fruits et légumes. "A chaque fois que je rentrais dans une plate-forme de conditionnement de la zone légumière, je voyais les tas de légumes invendus, et ça me faisait mal au cœur" confie -t-il.

Les lois de la nature

"La nature fait bien les choses, explique-t-il, mais les magasins demandent des carottes droites de tant de centimètres de long, de tel diamètre… évidemment, il y en a qui correspondent, mais il y en a plein aussi qui sont trop petites, trop grosses, trop quelque chose, et tout ça part à la poubelle."

"Un jour, raconte Karim, je me suis dit, 'ça suffit, la planète, on l’a déjà bien bousillée, il faut faire quelque chose' ! " Il a alors imaginé un panier anti-gaspi. "On va le faire nous-mêmes à la main, on y mettra au moins cinq légumes différents et on les vendra pas cher."

Il a appelé ses contacts dans la zone, le grossiste Riou lui a prêté une partie de son hangar à Saint-Pol-de-Léon et c’était parti !

 Aussitôt dit, aussitôt fait !

"Autour de Saint-Pol, on jette 10-15 camions de légumes par jour. En France, ce sont plusieurs milliers de tonnes. Là, on récupère 15 à 20 tonnes par semaine. Et si il y a une chose dont je suis sûr, c’est que je ne manquerai pas d’approvisionnement !" ironise Karim.  

Quatre personnes confectionnent les paniers à partir des carottes tordues, des panais fourchus, des choux trop petits etc etc… Entre 5 et 10 kilos de légumes pour 5 euros. 

Karim Vincent-Viry s’est appuyé sur deux applications anti-gaspi existantes To good to go et Phénix. Les clients réservent leurs cageots sur leurs téléphones et vont les retirer dans un commerce partenaire du projet.

"C’est parfois un magasin de bricolage comme à Guerlesquin, un bar à Châteaulin ou à Quimper, une fleuriste de Châteauneuf-du-Faou. Ils ont mes cagettes en dépôt et les gens passent les prendre. Cela ne leur prend pas trop de temps et ça fait venir du monde. Pour la fleuriste, c’est une dame de la commune qui voulait trouver nos paniers qui a démarché tous les commerces pour savoir qui accepterait de nous accueillir. Quand les cagettes ont été livrées, elle a eu 180 personnes dans sa boutique, 70 % de gens qu’elle ne connaissait pas alors qu’elle est fleuriste depuis 25 ans" raconte Karim Vincent-Viry.  

Donnant-donnant !

"Pour les commerces, la période est compliquée. Là, d’un coup, c’est 50 ou 60 personnes qui vont entrer dans la boutique, y trouver peut être un petit quelque chose à acheter. Il y a un magasin qui a doublé son chiffre d’affaire le premier jour où il a eu nos paniers. Les commerçants en galère, ça peut leur sortir la tête de l’eau" se félicite le nouvel entrepreneur.

Au panier futé à Ploumagoar, Isabelle Tilly  fait aussi dans l’anti-gaspi en vendant des produits alimentaires à dates de conservation courte. Elle a immédiatement été conquise par le principe. "J’ai téléphoné à Karim, détaille-t-elle une semaine plus tard, les clients passaient prendre leurs cageots. J’avais pris deux palettes, tout est parti très vite ! C’est quand même mieux de les manger que de les jeter ! Ca fait connaître mon magasin, et puis c’est important de soutenir les agriculteurs bretons ! "

Une quinzaine de lieux relais proposent les paniers de Finisterestes29.

Tout le monde est gagnant !

"Le but du jeu, c’est que tout le monde s’en sorte mieux, éclaire Karim Vincent-Viry. Les producteurs qui jetaient, je les paye. Les consommateurs qui peinent à acheter des légumes parce que c’est trop cher, ils peuvent en manger. Je reçois plein de messages de nos clients, je sais que ce week- end, il y a une dame qui a fait à manger à ses cinq enfants avec de bons légumes, qu’une mamie va recevoir son petit-fils avec quelque chose de bon. "

"Je paye les producteurs, les salariés. Si demain, je n’ai pas de produits, je n’ai pas de clients. Si demain, je n’ai pas d’employés, je n’ai pas de clients non plus !"

Karim Vincent-Viry est sur un petit nuage. "J’ai été directeur de magasins, jamais personne ne m’a remercié, ne m’a dit 'c’est formidable ce que vous faites'. Là, j’entends ça tous les jours. C’est génial ! J’adore parce que les gens adorent."

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