L'horloge parlante vit ses dernières heures puisque le 1er juillet, elle cessera d'émettre après 90 ans d'existence. Michel Abgrall est en charge du suivi de ce mécanisme de haute précision. Le Finistérien dirige le service des Références nationales du temps à l'Observatoire de Paris, là où l'heure légale française est générée au moyen de grosses horloges atomiques. Rencontre.
Quand on lui demande s'il est plutôt du genre en retard, en avance ou ponctuel, Michel Abgrall éclate d'un rire franc. "Je suis souvent en retard", admet-il. Un paradoxe amusant pour ce Finistérien à la tête du service des Références nationales du temps (RNT) à l'Observatoire de Paris, là où le temps légal français est établi. Là où se trouve aussi l'horloge parlante qui se taira définitivement le 1er juillet, 90 ans après sa création.
Exactitude
"Il faut vivre avec son temps" sourit le physicien originaire de Pleyber-Christ, près de Morlaix. Michel Abgrall supervise le mécanisme rattrapé aujourd'hui par la numérisation des appareils et la démultiplication des sources pouvant donner l'heure. "De moins en moins de gens appelaient, constate-t-il. Mais ce n'est pas la seule raison à cet arrêt. Depuis que la téléphonie passe par internet, et donc la technologie numérique, les délais de propagation du temps ne sont plus aussi bornés qu'avec l'analogique. Il y a un décalage et Orange, qui assure la diffusion de l'horloge parlante, ne garantissait plus l'heure exacte".
Exit l'appel au 3699 mais il sera toujours possible de retrouver le temps officiel sur le site 'heure légale française' géré par l'Observatoire de Paris. Sans oublier les différents moyens mis à disposition des utilisateurs pour lesquels l'exactitude de la synchronisation est plus pointue. Comme l'étalonnage des chronomètres, des minuteurs, etc. "Ou même pour démarrer une horloge atomique, note Michel Abgrall. Quand on la met en route, elle ne sait pas quelle heure il est. On a donc besoin d'un système qui permet de la synchroniser au temps universel coordonné". Le fameux UTC qui sert de base temporelle à la planète.
La durée d'une seconde
Michel Abgrall s'est pris de passion pour le Temps (avec un grand T) après sa maîtrise de physique obtenue à l'Université de Brest. Il entame alors un travail de thèse sur l'intervalle de la seconde. "L'intervalle de la seconde jusqu'au 17e chiffre après la virgule" détaille l'ingénieur de recherche CNRS. C'est d'ailleurs ce sujet qui l'a amené à rejoindre l'Observatoire de Paris où, dit-il, "on développe des horloges en laboratoire qui fournissent cet intervalle. En clair : on définit la durée d'une seconde". Plutôt ardu.
L'homme est intarissable sur la question. Il pourrait dérouler pendant des heures s'il ne courait pas après les minutes entre Paris et la Bretagne. A se demander si ses journées durent bien 24 h !
Tout comme lui, des centaines d'instruments tournent à plein régime au sein du service des Références nationales du temps. Il y a là une dizaine d'horloges atomiques installées à l'abri, dans une salle sécurisée et climatisée. Ces grosses machines fonctionnent au césium ou à l'hydrogène et sont calées, à quelques milliardièmes de secondes près, sur le temps international. De la haute précision qui permet de savoir qu'au 4e top, il sera...