Finistère : l'histoire tragique du "rocher du préfet" de Saint-Guénolé

Il y a 150 ans, le 10 octobre 1870, la famille de Gustave Levainville, préfet du Finistère, périssait noyée, emportée par une lame de fond lors d'un pique-nique sur l'un des rochers de Saint-Guénolé. Les cinq victimes disparurent dans le "trou de l'enfer". La roche fut rebaptisée "rocher du préfet".

A la pointe de Penmarc'h, dans le Finistère, les rochers de Saint-Guénolé forment des blocs singuliers. Synonymes de dangers pour les marins, ces récifs deviennent, au XIXe siècle, un lieu de promenade où l'on vient admirer la force des éléments.
C'est ainsi que le 10 octobre 1870, le préfet du Finistère, Gustave-Léonard Pompon-Levainville, s'installe sur une roche plate pour un pique-nique en famille. Juste au-dessus de ce que les habitants nomment "Toul an ifern" : le trou de l'enfer.


"Sous les yeux effarés du préfet"


Il y a Marie-Louise, la femme du préfet, leur fille Gabrielle, la préceptrice de l'enfant, le neveu et la nièce du haut fonctionnaire accompagnés de leur mère. Le ciel est bleu. "Il fait beau temps" raconte Serge Duigou, historien de la Bretagne. C'est une journée idéale pour profiter du panorama et observer les vagues en contrebas qui s'écrasent sur les rochers.
"Gustave Levainville est un peu en retrait par rapport au reste de la famille, il se tient plus haut sur le rocher", poursuit l'historien. Le préfet est en grande conversation avec l'archéologue Paul du Chatellier, dont l'atelier se trouve à quelques pas du rocher. Soudain, un enfant crie en breton : "an tarzh !", "une déferlante !". Une lame de fond arrive du trou de l'enfer et "emporte Marie-Louise, Gabrielle, le neveu et la nièce ainsi que la préceptrice, sous les yeux effarés du préfet".
Tous périssent noyés.
 

Ce fut un drame épouvantable. Les cinq victimes étaient jeunes. Mme Levainville n'avait que 30 ans, sa fille 9 ans, le neveu et la nièce 13 et 17 ans, la préceptrice 36 ans.

Serge Duigou



La presse nationale s'empare de l'histoire. Un ancien préfet de l'Empire, une famille décimée, "pour les journaux de l'époque, c'est un fait divers exceptionnel, souligne Serge Duigou. Il a marqué les esprits non seulement dans le Pays Bigouden mais aussi dans toute la France".

Ce trou de l'enfer, "qui avait déjà une réputation maléfique, qui précipitait les gens dans les ténèbres", attire davantage de curieux après la tragédie. Le rocher est rebaptisé "rocher du préfet" ou encore "roche des victimes".

Une croix en fer scellée dans la roche indique l'emplacement du drame



Le long du sentier littoral, un panneau rappelle cette noyade et, en filigrane, la dangerosité du lieu où un garde-fou fut installé en 1923.

Depuis ce jour d'octobre 1870, d'autres accidents ont eu lieu à cet endroit. Le dernier en date remonte à l'année 2000 avec la disparition d'un promeneur emmené, lui aussi, par une lame. "Il y a des panneaux qui avertissent de la dangerosité du site, note Serge Duigou. Pourtant, il m'arrive de voir des gens imprudents, qui n'ont pas conscience du danger, qui se baladent sur ces rochers. La mer est dangereuse. Et par tous les temps".



 
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