Une course à pied "pour voir la vie en couleur", c'est l'état d'esprit de la Roskolor qui se tiendra, ce dimanche, à Roscoff. Elle est organisée au profit de l'association Vaincre la mucoviscidose. Alexandre Jégo préside les festivités. Il évoque sa maladie avec laquelle il compose depuis 42 ans.
"Pour la muco, il ne faut rien lâcher !". A quelques jours de la Roskolor, qui se tiendra ce dimanche à Roscoff dans le cadre des Virades de l'Espoir, Alexandre Jégo affiche une détermination sans faille. Le président de cette course pas comme les autres, organisée au profit de l'associaton Vaincre la mucoviscidose, se dit déjà très heureux que l'édition 2021 puisse avoir lieu.
Alors, certes, avec pass sanitaire obligatoire pour les 18 ans et plus, mais l'essentiel n'est pas là : la manifestation "fun et solidaire" va rassembler petits et grands et permettre de collecter de l'argent qui sera reversé à la recherche médicale et contribuera également à l'amélioration des conditions de vie des malades et de leurs familles.
Une naissance sur 2.500 en Bretagne
"Les gens connaissent bien cette maladie en Bretagne, ils y sont sensibilisés puisque, malheureusement, nous sommes la région de France où il y a le plus de cas de mucoviscidose" souligne Alexandre Jégo. Cette maladie génétique, qui cible les poumons et le système digestif, concerne une naissance sur 2.500 en Bretagne (contre une pour 4.900 à l'échelon national). Dans le Finistère, un enfant pour 2.285 naissances est atteint de mucoviscidose.
A Roscoff, le centre de Perharidy est l'un des quarante-cinq centres de ressource et de compétences de la mucoviscidose (CRCM) répertoriés sur le territoire français. Un site qu'Alexandre Jégo connaît bien car c'est ici que cet homme de 42 ans est suivi depuis l'enfance. "J'avais un mois et demi quand le diagnostic muco est tombé, on habitait à Lyon, relate-t-il. Les médecins ont clairement dit à mes parents que mon espérance de vie serait très courte et de bien profiter de moi".
La famille, bretonne d'origine, décide de revenir dans le Finistère, près de Roscoff où, à l'époque, "l'expertise médicale était plus en avance, vu le nombre de malades plus important qu'ailleurs, note Alexandre. Au début des années 80, il y avait globalement une grande méconnaissance de cette maladie". Le gène défectueux et responsable de la mucoviscidose ne sera découvert qu'en 1989.
Greffé des deux poumons
Alexandre Jégo dit avoir passé une enfance "normale". "Mes parents ne m'ont pas mis dans un cocon, j'ai été élevé commes mes frère et soeur, avec une attention peut-être plus particulière mais sans faire de différence non plus". Il pratique le foot jusqu'à l'adolescence. "Quand j'ai arrêté le sport, c'est là que la maladie a pris le dessus". Jusqu'à cette année 2006 où les médecins lui annoncent qu'il doit subir une greffe des poumons. "En gros, ils m'ont fait comprendre que je ne passerais pas l'année".
Je ne savais plus respirer à fond puisque je passais mon temps à chercher mon souffle. Il a fallu que je réapprenne à respirer"
Alexandre a 27 ans et se retrouve sur une liste d'attente, contraint à vivre arrimé à une bouteille d'oxygène, sous traitement antibiotique, "essoufflé en permanence, se souvient-il. Je me suis battu pour pouvoir continuer à travailler jusqu'au bout. D'ailleurs, quand j'ai été appelé par l'hôpital de Nantes pour la greffe, je rentrais du boulot. C'était un jeudi à 18 h".
La nouvelle lui coupe le souffle. "Littéralement, sourit-il. J'avais du mal à y croire. J'ai eu un pic de stress aussi parce que c'est une grosse opération". Le soir-même, à 22 h, il arrive à Nantes. A minuit, il est au bloc opératoire. Il en ressort sept heures plus tard. "On a changé mes poumons, ce qui n'est pas rien. J'ai passé trente-trois jours à l'hôpital, dont onze en réanimation. J'ai perdu dix kilos, des muscles et il a fallu que je réapprenne à marcher". Et à respirer aussi. La première bouffée au grand air, il ne l'a pas oubliée."Ce fut bizarre, confie-t-il. J'avais pris des mauvaises habitudes pendant des années, je ne savais plus respirer à fond puisque je passais mon temps à chercher mon souffle".
"Il faut continuer à se battre"
Avec cette greffe des deux poumons, Alexandre a récupéré 40 % de sa capacité respiratoire. "Je n'ai pas plus car j'ai fait un rejet chronique du greffon en 2009 qui a détérioré une partie des poumons" explique-t-il. Néanmoins, il mène une vie "sereine". "Avec cette greffe, j'ai pu avoir un avenir, tout simplement. Les activités du quotidien, toute bêtes, je les fais sans être essoufflé".
Longtemps membre du conseil national de Vaincre la mucoviscidose, plus spécialement en charge des questions de qualité de vie des malades et de leurs familles, le président de Roskolor observe, avec intérêt, l'arrivée de nouveaux traitements, comme le Kaftrio, pour les patients non greffés. "Ils améliorent la capacité respiratoire et offrent une vie plus saine, constate-t-il. Ce sont des avancées extraordinaires".
La greffe reste une autre alternative quand les médicaments ne fonctionnent pas. "Etre greffé ne veut pas dire que l'on n'a plus la muco, prévient Alexandre. Cette maladie attaque aussi le pancréas et le système digestif". Voilà pourquoi "il faut continuer à se battre" encourage-t-il. Participer aux Virades de l'Espoir, les 25 et 26 septembre, est une des clefs pour accompagner la recherche médicale et les malades. A Roscoff, ce dimanche, chacun pourra relever le défi en courant ou en marchant.