"Histoires Ordinaires" : le webzine breton qui met en lumière la confrérie discrète des "gens bien"

Il y a Vincent l'entendeur de voix, qui milite pour une autre psychiatrie, Pauline, la jeune précaire libre, Jean-Pierre l'ethnobotaniste... Au tota,l ce sont plus de 400 portraits d'anonymes mis en lumière par le webzine breton "Histoires ordinaires", qui revendique un "journalisme de solutions".

Créé à Rennes il y a dix ans par des passionnés de journalisme, le magazine en ligne associatif est né d'un constat: la nécessité "de diffuser les idées qui foisonnent dans la société, face au désenchantement de la politique qui amène à se démobiliser", raconte Michel Rouger, son cofondateur et rédacteur en chef.

"On donne la parole à des citoyens ordinaires auxquels les grands médias ne s'intéressent pas ou peu, en général des gens des classes moyennes populaires qui résistent, qui ont des idées à revendre pour trouver des solutions aux problèmes de la société", poursuit cet ancien journaliste.

Des histoires qui font du bien

Pas question pour autant de "s'embarquer dans des articles sympathiques sur des gens qui ont des passions individuelles, des collectionneurs". "On veut des gens qui ont un projet collectif, des gens qui ont un impact sur le vivre ensemble", précise-t-il en rappelant que les rubriques du site s'intitulent: "Rebelles, solidaires, engagés, passionnés".

Et les exemples de ces gens "qui améliorent de mille façons notre foutue condition humaine" foisonnent. Tel le collectif rennais "Dignité cimetières", qui veille à ce que les personnes décédées dans la grande précarité aient des obsèques et une sépulture décente. En Centre-Bretagne, c'est Anne-Laure, qui fait vivre sept personnes dans son village de 400 habitants avec sa ferme pédagogique agriculturelle.

L'équipe d'Histoires Ordinaires, une dizaine de personnes, aime se comparer à l'émission "Carnets de campagne" de France inter. Banque d'idées, "Histoires ordinaires" sort un portrait tous les jeudis et compte près de 10.000 visiteurs uniques par mois.

"Au contraire des médias qui parlent de ce qui va mal, des blacks blocs au JT de 20H00, on montre des citoyens responsables qui agissent pour le bien d'un collectif" souligne Alberte Skoric, secrétaire de l'association.

Du posititif, pas du bisounours

 "On donne du positif, pas du positif Bisounours, du positif qui fait bouger les lignes et apporte du changement", ajoute celle qui prête sa voix pour une version sonore des textes. Citant l'exemple d'un quartier de Rennes, dont "on ne parle que quand il y a une descente de police", Jean-François Bourblanc, contributeur d'un blog hébergé sur le site, s'interroge. "Pourquoi n'en parler que dans ces cas-là? Il ne s'agit pas de taire les problèmes mais les énergies du quartier sont largement aussi importantes que le fait divers".

 "Aller à la rencontre de gens qui agissent de manière confidentielle mais font du bien à tout le monde, pour moi c'est un journalisme utile qui a toute sa place dans le paysage médiatique", estime Violette Goarant, pigiste trentenaire aujourd'hui installée en Suède.

Pour un journalisme "de solutions"

Né aux Etats-Unis au milieu des années 1990, le journalisme "de solutions" encourage les journalistes à proposer des solutions à des problématiques de société. "Le concept est né d'un questionnement journalistique sur un traitement de l'actualité trop porté sur les mauvaises nouvelles", explique Pauline Amiel, maîtresse de conférences à l'université d'Aix-Marseille et auteure d'un livre sur le sujet.

"Cela reprend à 90% les techniques du journalisme traditionnel, la seule chose qui change c'est l'angle", ajoute Mme Amiel, qui y voit "une des pierres à l'édifice de la reconstruction du journalisme et des médias".

Gratuit et sans publicité, le webzine, qui fête ses dix ans, vit de ses adhésions, de dons et d'ouvrages réalisés à partir des portraits, le plus souvent écrits à titre bénévole. Lors de son assemblée générale fin novembre, qui a réuni plus de 70 personnes par visio-conférence, l'équipe s'est donnée quatre ans pour faire évoluer les statuts du site, peut-être sous forme de coopérative, et trouver un modèle économique pour pouvoir passer la main à de jeunes journalistes.

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