"On est au pied du mur, nous n’avons plus de solutions." Faute d'un nombre suffisant de médecins aux urgences, David Chambon, le directeur du Centre Hospitalier de Fougères annonce une réorganisation du service des Urgences certaines nuits de l’été et invite les usagers à faire le 15.
"On bataille tous les ans depuis belle lurette pour éviter ça, mais cette année, ce n'est plus possible" explique David Chambon, le directeur de l'hôpital. "Il y a 15 ans, c'était déjà compliqué et les médecins des étages (ceux des services de médecine et de gériatrie) avaient même accepté de venir participer aux gardes d'urgences, mais là, on ne peut plus, on n'a plus assez de volontaires pour faire face."
Composer le 15 avant d'aller aux urgences
Cet été, les nuits du vendredi 9 au samedi 10 juillet, du 18 au 19 juillet, du 1er au 9 août et du 15 au 17 août, aux urgences de l'hôpital de Fougères, il n’y aura qu’un seul médecin urgentiste au lieu de deux habituellement."Et la nuit, précise David Chambon, le médecin des urgences peut être appelé à partir avec le véhicule du SMUR, alors il ne pourra pas recevoir et soigner les malades et les blessés."
Les patients sont donc invités à faire le 15 avant de se rendre à l’hôpital. Le régulateur orientera alors les personnes vers le site le plus adapté à leur état de santé, soit la maison médicale de garde de Fougères, soit un établissement rennais ou, si besoin, le service d’urgence de l’hôpital.
"Tous les patients qui ont besoin d’être vus seront vus, on a une obligation de service public, on y tient" réaffirme de directeur de l'établissement " Il ne faut pas avoir peur. Il y aura toujours une réponse médicale. Il y aura du monde, un anesthésiste, mais si les gens font appel au 15, cela permettra de ne pas saturer le service et cela évitera que le médecin ne se retrouve avec dix ou vingt patients qui l’attendent."
En ce moment, le service des urgences de l’hôpital de Fougères fonctionne avec 5,3 postes de médecins à temps plein, alors qu’il en faudrait 10,5.
Des centaines de postes vacants en France
L’Association des Médecins Urgentistes de France estime que plusieurs centaines de postes de médecins urgentistes sont vacants en France. Depuis des années, elle tire le signal d’alarme : "On ne forme plus assez de médecins, et le nombre de passages dans les services est en augmentation permanente. En 1998, un millier de services d’urgences dans notre pays accueillaient sept millions de passages, 20 ans plus tard, il ne restait plus que 650 services, qui recevaient plus de 21 millions de malades ou blessés."
"Ça fait mal au cœur, soupire Huguette Désance, secrétaire de la section CFDT de l’hôpital, ils ont cherché toutes les solutions, sonné à toutes les portes, mais à un moment, ce n’est plus possible. Les médecins ne peuvent pas se couper en deux. Ce qui est dur, c’est que ce n’est pas dans nos habitudes, normalement, l’hôpital accueille tout le monde, tout le temps. Mais là, on ne peut plus."
Un problème de démographie médicale
"Le problème dépasse l’hôpital de Fougères, de nombreux services d’urgence sont dans la même situation que nous, renchérit l’ancienne aide-soignante. Et tout cela fait boule de neige : comme il n’y a pas assez de médecins, Fougères et les communes alentour manquent de généralistes, alors les gens viennent aux urgences, les urgences sont débordées et cela ne donne pas forcément envie aux urgentistes de venir travailler chez nous."
"Les patients qui se rendront aux urgences sans avoir appelé le 15 seront évidemment reçus" rassure l’hôpital. "Les premiers gestes seront effectués et l’infirmière appellera le 15 pour réguler la situation."
Le dispositif est mis en place pour l’été, tous espèrent qu’il ne sera que ponctuel et provisoire, mais pour cela, tous savent qu’il faudra des renforts et des recrutements.