Le gouvernement a présenté vendredi 13 octobre son plan de lutte contre les déserts médicaux. Même si la Bretagne et Pays-de-la-Loire ne sont pas les plus touchés, de plus en plus de communes manquent de médecins.
Autrefois limitée aux zones rurales, la désertification médicale touche désormais aussi les villes. Plonévez-Porzay et Guiclan dans le Finistère, la Roche-Derrien et Plédran dans les Côtes-d’Armor, plus récemment, Messac-Guipry en Ille-et-Vilaine… Victimes de la pénurie médicale, ces communes bretonnes n’ont pas lésiné sur les moyens pour tenter d’attirer des médecins à s’installer sur leur territoire créant le buzz à travers une vidéo humoristique, un mannequin challenge, un canular autour d’une histoire de druide-médecin ou encore un caducée humain sur la plage de Saint-Anne-la-Pallud.
Ces initiatives ont été plus ou moins couronnées de succès. Les habitants de Plédran (22), qui ont réalisé un clip vidéo médiatisé, cherchent toujours la perle rare.
À Guiclan (29), deux médecins généralistes s’installeront bientôt dans une toute nouvelle maison de santé actuellement en construction. À Plonévez-Porzay (29), deux jeunes généralistes s’installeront en janvier 2018. Là aussi, ils rejoindront une équipe pluridisciplinaire (infirmière, kinésithérapeutes, podologue) au sein d’une maison de santé.
"Le dynamisme de l’équipe, la mobilisation de la population et le fait de ne pas avoir à exercer seul ont été des éléments déterminants dans ma décision", explique le docteur Clément Cogneau. Pour ce trentenaire, qui a pas mal roulé sa bosse dans le monde après avoir suivi des études de médecine à Brest, le choix de s’installer en zone semi-rurale est murement réfléchi. "Les relations humaines y sont un peu plus préservées qu’en ville où la patientèle s’avère souvent plus exigente", note-t-il. Quoiqu’il en soit "ce n’est pas par la contrainte que l’on parviendra à attirer les jeunes diplômés dans les zones désertifiées", assure Clément Cogneau. "Les mesures incitatives, les aides, les maisons de santé sont bien plus efficaces".
La Bretagne bien lotie
Il convient toutefois de relativiser cette idée des déserts médicaux dans l’ouest. Si l’on s’en tient aux simples données chiffrées, le Finistère, l’Ille-et-Vilaine, le Morbihan et la Loire-Atlantique ont tous vu leurs effectifs de médecins généralistes se stabiliser voire augmenter au cours de ces dix dernières années.
Selon le Conseil National de l’Ordre des Médecins, La Loire-Atlantique se distingue même clairement avec un nombre de médecins généralistes en hausse de 8,2% entre 2007 et 2016. Pour le Finistère, l’augmentation s’élève à un peu plus de 2% sur cette même période.
Les villes moyennes touchées
Dans les départements plus sinistrés, des initiatives locales commencent à porter leurs fruits. Ainsi, en Mayenne, les maisons de santé ont fleuri en zone rurale attirant les jeunes médecins. Revers de la médaille, c’est désormais à Laval (53) que le manque de médecins se fait sentir cruellement. Les médecins partent à la retraite sans trouver de successeur, le cabinet ferme et les patients se retrouvent dans la nature, incapables de décrocher un rendez-vous dans les autres cabinets déjà débordés. Conséquence : entre 5.000 et 10.000 Lavallois n’auraient plus de médecins généralistes.
Une meilleure collaboration entre professionnels de santé
"Les raisons, on les connaît bien", analyse le docteur Luc Duquesnel, médecin à Mayenne (53) et président du syndicat de l’union des médecins omnipraticiens de France (Unof). "Les internes ne trouvent pas de maîtres de stage en ville ; il n’y a pas encore ici la culture des maisons pluridisciplinaires alors que les jeunes médecins ne veulent plus exercer seuls." Et le médecin d’ajouter que "pour pallier la démographie médicale vieillissante, les professionnels de santé doivent absolument se réorganiser. Par exemple, un diabétique pourrait être suivi régulièrement par une infirmière et ne plus voir son médecin qu’une fois par an de manière à désengorger les cabinets médicaux".
En attendant, à Laval, pour pallier le manque de praticiens, des médecins fraîchement retraités et des internes venus de la faculté d’Angers (49) ont été appelés en renfort, cet été, au sein d’une maison médicale.
Sous une autre forme, les métropoles sont elles aussi concernées par le manque de médecins. Quelques quartiers périphériques peinent à maintenir les cabinets de généralistes ouverts mais ce sont surtout certaines spécialités qui sont touchées. À Rennes (35), la pénurie de médecins ophtalmologistes pose de sérieux problèmes. C’est même la grande ville où le délai d’attente avant d’obtenir un rendez-vous est le plus élevé : 123 jours (et c’est une moyenne !) après Nantes et Lyon. "La moyenne française s’élève à 9 spécialistes pour 100.000 habitants", explique Thierry Bour, président du syndicat national des ophtalmologistes. "En Ille-et-Vilaine, on descend à 6,9."
La situation n’est pas prête de s’arranger. 40% des médecins ophtalmologistes actuellement en exercice dans le département ont plus de 55 ans.