Depuis quinze ans, il travaille sur les "fake news". D'abord pour France 24, comme journaliste, et depuis 4 ans comme rédacteur en chef pour l'émission de France Info "Vrai ou Fake". Il participe au tour de France de l'éducation aux médias organisé par France Télévisions, dont la deuxième étape se déroule aujourd'hui à Rennes. Il nous a fait part de ses craintes concernant les fakes news mais aussi des solutions qui existent.
Julien Pain ne mâche pas ses mots pour parler des risques que constituent les fake news.
"Le tsunami, je le vois arriver, dit-il froidement. Avec les réseaux sociaux, les fausses informations et les écrits, propos ou vidéos complotistes se multiplient un peu partout dans le monde" poursuit-il.
Même si, depuis l'antiquité, on sait que cela est une réalité, les technologies ont évolué et accélèrent le mouvement. Ils touchent beaucoup plus de monde.
Il y a clairement une défiance envers les experts
Julien PainRédacteur en chef "Vrai ou Fake" sur franceinfo
S'ajoute que "de plus en plus de personnes ne croient plus en la parole des experts et des élites. Ils la remettent même en cause." Parmi elles, des séniors mais aussi les plus jeunes générations habituées à surfer sur les réseaux sociaux
Un sondage récent commandé à l'institut de sondage IFOP pour le compte de la Fondation Reboot et la Fondation Jean-Jaurès a permis de prendre la température auprès des jeunes pour mesurer leur porosité aux contre-vérités scientifiques et ceci au regard de leur usage des réseaux sociaux.
Des jeunes plus sensibles aux fausses informations
Le constat est cinglant : 16 % des 18-24 ans sont en accord avec l'idée que la Terre est plate. Des jeunes qui disent s'informer majoritairement sur Youtube, Tik-Tok ou Telegram.
Pour Julien Pain, "Ces journées d'éducation aux médias comme aujourd'hui sont importantes car on parle aux prescripteurs comme les parents et les professeurs". Et il ajoute "Il faut un effort global" de toute la société.
Jour après jour, dans son émission "Vrai ou fake" sur Franceinfo, lui et 5 autres journalistes traquent les fausses informations. "On réalise une veille plus particulièrement sur les infos qui touchent le plus grand nombre de gens". Avec un but principal : "tordre le cou à certaines de ces fausses infos qui pullulent sur les réseaux et qu'il faut faire cesser".
Au menu du jour, une vidéo en Ukraine et des propos du gouvernement concernant pénibilité et réforme des retraites
Julien PainRédacteur en chef "Vrai ou fake" franceinfo
C'est une tâche de tous les jours. Au menu de la conférence de rédaction de ce matin pour franceinfo, deux dossiers ont été retenus. "Nous travaillons sur une vidéo qui tourne dans les medias russes et qui montrerait que l'armée ukrainienne enrôle de force de jeunes hommes pour faire face au manque de conscrits". Il détaille aussi l'autre thématique qui est mise en avant par le gouvernement. "Nous allons vérifier aussi tout ce que disent les ministres au sujet de la pénibilité vis-à-vis de la réforme des retraites."
Car la parole des hommes politiques fait aussi partie des éléments les plus sujets à caution. "Quand les hommes et femmes politiques s'expriment sur un plateau TV, ils maîtrisent leur communication mais il y a beaucoup plus de fausses infos quand ils publient sur les réseaux sociaux."
Il cite quelques exemples à l'appui. "On a vu une femme politique faire une boulette en disant que la SNCF était privatisée, ou encore des responsables politiques retweeter des fausses informations, et aussi des élus faisant clairement de la manipulation sur les réseaux, un discours correspondant à leur propos narratif".
Une éducation aux médias que ce journaliste du service public estime indispensable pour le groupe France Télévisions. "Nous avons une mission de vérifier les faits ou la parole des politiques par exemple sinon on a Trump." Et pour lui, il faut savoir faire la distinction entre une opinion et un fait.
Les deepfakes : de fausses vidéos plus vraies que nature
Ce chasseur de fake news voit se développer depuis quinze ans des cas "de plus en plus pernicieux". Car la technologie évolue et "permet de manipuler les images". Grâce notamment à "des logiciels pour fabriquer ce que l'on appelle des deepfakes". Il précise : "Il faut faire des vérifications techniques dans l'image, passer des coups de fil pour vérifier mais c'est plus compliqué aujourd'hui."
Ces fausses images, ces vidéos truquées en utilisant des logiciels de plus en plus simples, vont se multiplier. Pour lui, "ces deepfake news sont encore compliquées à fabriquer mais c'est sûr...on y va !"