Des bâtons blancs enchevêtrés, un dôme géant qui se déplace et évolue selon les contraintes du décor : le parc du Thabor, à Rennes, s'est habillé ce week-end du 8 et 9 août au gré des envies de Johann Le Guillerm, artiste créateur de la Grande Transumante.
"Du tricot" : c'est ainsi que Johann Le Guillerm décrit modestement son travail sur sa dernière création. La Grande Transumante est une structure mobile constituée de près de 400 bâtons de bois blanc assemblés sans autre moyen de fixation que la seule pression des éléments les uns sur les autres. "Je fais des mailles, explique le créateur. Je tricote à partir des aiguilles, sans fil."
Une performance XXL
Son installation, il l'a assemblée avec son équipe de manipulateurs dans le parc du Thabor, ce week-end. Avec 400 carrelets de bois, c'est la première fois qu'il donne une dimension aussi importante à son projet. Jusqu'alors, il n'avait jamais dépassé les 300 éléments. "Avoir plus de matière, ça permet de faire exister une forme pendant qu'une autre est en train de se construire", souligne l'artiste.C'est dans le cadre des Tombées de la nuit que la ville de Rennes a accueilli la performance. "Ce qui nous touche, c'est son côté insaisissable, et la façon qu'il a de questionner l'espace public, raconte Claude Guinard, directeur artistique du festival. On l'avait déjà accueilli il y a deux ans dans une version en mouvement dans le centre-ville." Celles et ceux qui l'avaient vue s'en souviennent sûrement.
Une structure en perpétuelle mutation
Le projet de Johann Le Guillerm est issu d'un chantier nommé Architexture. "Je me suis posé la question des possibilités d'enchevêtrement basique, se souvient-il, que j'ai cherché à varier pour combiner différentes possibilités." Il effectue ensuite son travail préparatoire avec des bâtons de 30 cm. "Ça me permet d'aller beaucoup plus vite et de travailler seul."Originaire de la Sarthe, l'artiste a fait ses première armes dans le monde du cirque. En 1994, il créé sa propre compagnie, Cirque ici, dont le travail sera récompensé à de nombreuses reprises. Dans ses créations, il interroge l'équilibre et le mouvement et développe, en 2014, la Transumante dans le cadre de la Nuit Blanche à Paris.
C'est une sorte de liquide solide. On doit déconstruire un bout pour avoir la matière nécessaire et construire la suite. Elle est toujours en train de muter. C'est une patatoïde mouvante.
"Un plaisir en cette période un peu morose"
Depuis, la performance tourne en France et à l'international, à mesure qu'elle grandit. Une construction quasi-infinie ? Pas tout à fait. "On est limité par la taille des dômes parce qu'à un moment, les bâtons du côté seraient trop pentus et ils pourraient glisser", précise l'artiste, qui pense aussi à son équipe. "Il faudrait plus de monde parce que plus c'est grand, plus on marche et c'est le plus épuisant."À Rennes, l'installation a attiré les curieuses et les curieux venus, en cette période de crise sanitaire, se détendre le temps de la performance. "C'est vraiment un plaisir de vivre ça en cette période un peu morose, se réjouit Claude Guinard, à la fois dans l'œuvre présentée mais aussi dans ce qu'elle génère chez les gens qui tombent dessus par hasard."