Les motards en colère : "ce contrôle technique ne sert à rien, ni pour la sécurité, ni pour le bruit". Mobilisation à Rennes, Brest et Quimper

Le contrôle technique des motos, scooters, voiturettes et autres quads devient obligatoire à partir de lundi, une mesure censée accroître la sécurité mais contestée par de nombreux motards. Ils se font entendre par un long cortège de deux roues autour de Rennes et Brest ce 13 avril 2024.

"On nous avait dit que le contrôle technique moto était pour notre sécurité, qu'il coûterait moins de 50 euros. Au final, c'est plus cher et le contrôle se fait au doigt mouillé". Philippe Guillaume se dit "chiffon" à propos de cette nouvelle réglementation qui rentre en vigueur ce lundi 15 avril 2024.

Plus de trois millions de véhicules de catégorie L, soit les scooters, motos, tricycles ou voiturettes, échappaient jusqu'ici au contrôle instauré en 1992 pour les voitures.

78 points à contrôler

C'est fini. À partir de lundi, un contrôle technique est maintenant obligatoire et ces véhicules qui devront passer par 78 points de contrôle. Freins trop usés, guidon flou, fuites, pneus lisses : 87 défaillances majeures impliquent une contre-visite, soit de revenir dans les deux mois suivants avec le véhicule réparé.

Le contrôle du bruit, mais aussi du bridage du véhicule, souvent contourné par les scooters, ne sera effectif qu'à l'été 2025.

"En voiture les calibrages sont précis, pour les motos cela va se passer à la petite louche" assure ce porte-parole des motards. Pour lui, "faute d'outillage précis, cela se passera à l'interprétation des contrôleurs". Sur cette vidéo vue plus 60 000 fois par les motards, sa colère est froide.

Lire : Le C.U.L se bouge pour protester contre le contrôle technique des mobylettes : "c’est une fumisterie"

Les motards bretons en colère

Les fédérations de motards en colère d'Ille-et-Vilaine et du Finistère veulent boycotter cette nouvelle réglementation. Dans la capitale bretonne, ils sont près de 1 000 motards à se donner rendez-vous pour ralentir la circulation sur la rocade rennaise.

À Brest, la mobilisation rassemble les motards à 14h30 sur la place de la Liberté. Une autre mobilisation se déroule également à Quimper au même moment. Selon la FFMC 29, seulement 0,3 % des accidents sont imputables à des défauts techniques, parmi les 18 000 sinistres recensés, selon les données fournies par la Mutuelle des motards.

Appel au boycott

La mesure reste contestée par de nombreux motards en France, un pays particulièrement fan de deux-roues. La Fédération des motards en colère (FFMC) continue d'appeler au boycott de ce contrôle qu'elle considère cher et inutile, car surtout visuel.

Selon une source policière, 20 000 motos sont attendues dans toute la France dans une dizaine d'actions samedi et dimanche. À Paris, il devrait y en avoir 2 000 samedi à partir de 14h.

Le délégué général de la FFMC, Didier Renoux, martèle que les accidents ne sont en général pas dus à l'état du véhicule, bien entretenu par les motards, mais plutôt à l'état de la chaussée. Les "motards en colère" avaient demandé au Conseil d'État de suspendre en urgence la mesure, mais ils ont été déboutés mardi.

Parallèlement, 27 députés de la majorité, dont le président de la commission des Lois, Sacha Houlié, ont demandé au ministère des Transports un "moratoire" sur ce contrôle technique, proposant des solutions alternatives. Sans réponse pour le moment.

"Quand bien même, je voudrais m'y plier, on ne trouve aucun centre de contrôle technique", a assuré à l'AFP Sacha Houlié, qui pilote lui-même une sportive Yamaha. "Je vais faire mon entretien annuel, comme chaque année. Je ne connais aucun motard qui ne le fait pas", a souligné le député.

Des députés RN ont aussi demandé l'abrogation du contrôle, dénonçant une "obstination technocratique".

La saison des contrôles

Depuis la confirmation du contrôle en octobre 2023, les centres de contrôle technique ont pourtant passé la surmultipliée pour recevoir l'agrément nécessaire. 

Toute la France n'est pas couverte, mais près de la moitié des centres sont prêts, soit 3 000 contrôleurs, selon la fédération du contrôle technique.

En Espagne, depuis l'instauration en 2006 du contrôle technique pour tous les deux-roues, la mortalité a fortement baissé pour les conducteurs de cyclomoteurs, mais pas chez les motards, selon la fédération espagnole des contrôleurs. 17% des deux-roues contrôlés en 2022 ont dû passer une contre-visite, et la moitié de ceux-ci souffrait de défaillances majeures. La plupart des défauts concernaient l'éclairage, la pollution ou le bruit.

En France, tous les véhicules de catégorie L doivent désormais être contrôlés tous les trois ans. Les conducteurs sans contrôle technique à jour risquent une amende de 135 euros ou une immobilisation du véhicule.

Des contrôles avant la revente

Alors que les beaux jours annoncent l'ouverture de la saison de la moto, les premiers véhicules à passer au contrôle sont ceux immatriculés avant le 1ᵉʳ janvier 2017. 

Tous ces véhicules de catégorie L doivent également passer l'examen en cas de revente. Cette mesure a déjà poussé de nombreux motards à revendre leur engin avant la date butoir, contribuant à doper le marché de l'occasion au premier trimestre 2024 (+6% sur un an), selon l'assureur Solly Azar.

Il aura fallu dix ans et de nombreux recours pour faire appliquer cette directive européenne de 2014, déjà mise en place presque partout sur le continent avant la date butoir du 1ᵉʳ janvier 2022. Elle doit permettre d'augmenter la sécurité et de diminuer la pollution de ces véhicules.

En France, un premier décret avait été pris par le gouvernement en 2021 avant qu'Emmanuel Macron ne l'enterre, soucieux de ne pas "embêter les Français". 

Le gouvernement avait ensuite annoncé privilégier "des mesures alternatives" telles que des campagnes de sensibilisation. Mais il a dû finalement céder en octobre 2023 sur décision du Conseil d'État.

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