Le Stade Rennais découvre la Ligue des Champions pour la première fois de son histoire ce mardi avec la réception de Krasnodar. De nombreux supporteurs n'auront malheureusement pas la joie de partager cette première avec leur club de cœur. Entre excitation et frustration, ils racontent.
Le Stade Rennais découvre la Ligue des Champions pour la première fois de son histoire ce mardi soir avec la réception de Krasnodar, à 21h, au Roazhon Park. Malgré la hausse à 5 000 spectateurs de la jauge autorisée, de nombreux supporteurs n'auront malheureusement pas la joie de partager cette première avec leur club de cœur.
Les rares chanceux détenteurs de billets déplorent, eux, l'absence de leurs camarades pour remplir les 29 000 places du stade. Entre excitation, impatience et frustration, ils racontent.
"Plus qu’un dodo." Cette phrase enfantine flanquée en une de Ouest-France, lundi, était répétée à l’envie sur twitter par les nombreux supporteurs rennais. Ils sont des dizaines, des centaines, des milliers, des dizaines de milliers, peut-être même davantage, à se pincer la joue pour s’assurer que le Stade Rennais jouera bien ce soir le premier match de Ligue des Champions de son histoire. Qu’ils se rassurent, ils ne rêvent pas, ils vivent leur rêve et c’est encore mieux. "Je ressens un gros sentiment de fierté mélangé à une excitation palpable, c'est historique pour le club et du coup, pour nous supporteurs aussi, s’enthousiasme Anthony Delamaire, 36 ans et membre du Roazhon Celtic Kop, le club d’ultras rennais. Nous sommes comme des gamins ouvrant les cadeaux de Noël avec des étoiles plein les yeux."
"Être présent dans le stade me comble de bonheur"
Pour s’assurer d’obtenir son sésame, Anthony Delamaire s’est levée à 6h samedi matin pour parcourir les quarante-cinq minutes de route depuis Saint-Malo, sa ville de résidence, et le local du RCK à Rennes. Près de quatre heures plus tard, il ressortait avec son billet en poche. "Être présent dans le stade lors de l’entrée des joueurs avec la fameuse chanson de la Champion’s League me comble de bonheur", assure-t-il les yeux pétillants. Malheureusement, cet hymne de la Ligue des Champions, Manon, ne l’entendra pas. Chargée de communication dans une mairie, cette supportrice de 23 ans - plus connue sous le pseudo Roazhon Girl sur twitter - n’a pu s’abonner cette saison et n’a donc pu acheter le précieux sésame. "C’est du 50-50, avoue-t-elle. L’excitation de voir mon club de cœur depuis toujours jouer son premier match de Ligue des Champions mais aussi la frustration de ne pas avoir le stade rempli, de ne pas être au stade. "
Si Anthony a bien son billet en poche, à aucun moment il n’aurait supporté manquer une première historique, ce soir. "C’était pire que de la peur, c'était un énorme sentiment de tristesse sportive de rater ce rendez-vous, admet-il, désormais soulagé. J’aurais été abattu de manquer la première rencontre du Stade Rennais en Champion’s League, ma femme a dû l'entendre une bonne centaine de fois (rires)."J'ai hâte d'être mardi mais je suis totalement déprimée de ne pas pouvoir être au stade..
— Roazhon Girl (@RoazhonGirl) October 18, 2020
"Je ne m'attendais pas à ce que la place soit aussi chère"
Cynthia Renou, 39 ans, abonnée depuis six ans mais avec bien plus d’années de supportérisme derrière elle, a dû renoncer, pour d’autres raisons. Les prix proposés pour les places restantes (95€) l’ont rebutée. "J’ai réussi à accéder à la billetterie mais je ne m’attendais pas à ce que la place soit aussi chère, je suis extrêmement déçue, confie-t-elle. Pour Séville ou Chelsea, je serai peut-être prête à payer ce prix mais pas pour Krasnodar."
Antoine Deport, jeune développeur web de 23 ans, confirme avoir hésité devant les prix avant de valider sa place : "Les prix n’avaient pas été communiqués, on a trouvé ça cher. On s’est dit que ce n’était ni Séville ni Chelsea mais finalement l’hésitation n’a pas été longue."
Détenteurs de tickets ou pas, ce qui ne fait aucunement débat, c’est la déception de ne pas voir un Roazhon Park "en ébullition", dixit Anthony Delamaire, "de ne pas montrer qui sont les supporteurs rennais", complète fièrement Manon.
Au fil de la progression folle du club ces trois dernières années, l’engouement des supporteurs semble enfin récompenser leur attachement. Le Stade Rennais a enregistré plus de 15 000 abonnés, soit plus de la moitié de la capacité du stade (29 000 places), brisant ainsi son record précédent dans une saison pourtant marquée du sceau de la crise sanitaire. En deux ans, 7 000 spectateurs sont venus gonfler les rangs des abonnés qui ne pourront évidemment pas tous profiter du spectacle ce mardi malgré la hausse de la jauge autorisée à 5 000 spectateurs. "C’est une frustration de ne pas pouvoir le vivre tous ensemble pour cette première", regrette Manon.
"C’est clairement une grosse frustration car dans un stade en ébullition, on peut faire des merveilles et assister à une belle fête. C’est ça le sport, le partage de moments inoubliables", abonde Anthony Delamaire. "On ne sera pas aussi ravis que si le stade était noir de monde, glisse Antoine Deport. Mais on va penser à tous ceux qui n’ont pas eu de place." Le Breton est solidaire.
Dans une année tracée en pointillé, l’horizon européen est obscur. Alors que les Rennais s’étaient pris de passion pour Jablonec (République Tchèque), énamourés de Séville et déchaînés à Londres, la Covid-19 compromet un nouveau #RoazhOnTour (qu’on pourrait traduire par "Les Rennais en voyage"). "Il y a une double-frustration de ne pas voir les matches ni à domicile ni à l’extérieur, reconnaît Cynthia Renou. On avait prévu avec une amie de faire des matches en Angleterre ou en Espagne mais on ne va pas tenter le risque." "On avait même prévu de poser des congés autour du mardi et du mercredi pour se faire des week-end européens donc il y a énormément de frustration", exprime Antoine Deport.
Magnifique y a pas de mot @staderennais @rck1991 @ROUGEmemoire #RoazhOnTour #srfc #ARSSRFC #ultra #5000rennais pic.twitter.com/1mwpmvfa9I
— L’Ermite (@ErmiteYuma) March 14, 2019
"Ça ne pouvait arriver qu’au Stade Rennais, il faut se le dire", préfère-t-il d’ailleurs en rire, faisant référence aux moqueries de la France du football longtemps associées aux Rouge et Noir. "Il y a quand même un peu d’ADN du SRFC dans cette situation, tout ne peut pas toujours trop bien marcher." Demain soir, il fera pourtant jalouser au moins dix-sept clubs de Ligue 1.
Le mot de la fin revient à Anthony Delamaire, résolument optimiste à la veille d’une nouvelle page dans l’histoire de son club de cœur. "On va se satisfaire de ce que l'on a et la chance de vivre le match de demain contre Krasnodar. Allez, plus qu'un dodo…"