Meurtre de Wilhem Houssin. "On atteint des degrés de violence qu’on a peine à imaginer"

Ce jeudi 17 octobre 2024, le procès de cinq jeunes va s’ouvrir devant la cour d’assises des mineurs de Rennes. Ils sont accusés d’avoir battu à mort Wilhem Houssin le 21 juillet 2021. Le musicien de 49 ans était décédé à l’hôpital trois jours plus tard. Ses parents attendent l’audience dans un mélange d’impatience et de craintes.

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"Pour nous ça va être une épreuve. On sait que ça va être cruel puisqu’on va revivre les derniers moments de la vie de Wilhem", souffle René-François Houssin.  

Le 17 octobre, le procès des agresseurs de leur fils va s'ouvrir devant la cour d'assises des mineurs de Rennes. Les parents de Wilhem ont besoin de comprendre ce qui s’est passé ce 21 juillet 2021. "On connaît la façon dont ça s’est déroulé, par contre, on ne comprend pas. Un tel basculement, une telle violence. Quelqu’un qui demande une adresse et se retrouve au sol quelques minutes après ? C’est de l’acharnement. Confondre sa tête avec un ballon de football. On atteint des degrés de violence qu’on a peine à imaginer. Qu’est-ce qui a pu se passer exactement ? Qu’est-ce qui s’est passé durant ces trois minutes ?"

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reportage de S. Breton, V. Chopin et N. Jacob. ©France 3 Bretagne

Trois minutes où tout a basculé

Ce jour de juillet 2021, Wilhem accompagne une amie qui doit visiter un appartement à Saint-Jacques-de-la-Lande, tout près de Rennes. 

Il est un peu plus de 15h. Ils cherchent la rue, interrogent des premiers passants et se dirigent vers un groupe de jeunes gens près de la médiathèque. 

"On ne sait pas ce qu’ils se sont dit. Il est allé leur demander un renseignement et ça a dégénéré", s’interroge depuis trois ans Martine Houssin, la mère de Wilhem. 

Le début de la scène est filmé par les caméras de surveillance, mais un premier coup fait sortir Wilhem du cadre. Il est 15h13. À 15h16, il gît au sol. Inconscient. Il souffre d’un grave traumatisme cranio-encéphalique et d’hémorragies cérébrales. Il décède à l’hôpital trois jours plus tard. 

Ce jour-là, Wilhem avait bu."Il a essayé plusieurs fois de faire des cures, ça marchait un temps mais malheureusement, c’est une spirale, témoigne René-François Houssin. Quand on est alcoolisé, des fois on dit des choses… "

Depuis trois ans, les parents de Wilhem ne peuvent s’empêcher de se refaire le film de cette journée. Il devait venir aider son père à monter une pergola. Il faisait très chaud, 32 ou 33 degrés. "Au téléphone, en fin de matinée, il m’a dit : "Ok, on attaque le chantier demain à 6h, je serai là, par contre maintenant non parce que je vais accompagner une amie à chercher un logement." Ce sont les derniers mots que j’ai eus avec lui. Il y a des choses comme ça qui sont excessivement brutales, parce qu’on se dit : "peut-être que si j’avais insisté, il serait venu..." On refait un peu le monde, mais c’est trop tard !"

Un cœur d’or

Sous la pergola, justement, René-François et Martine racontent leur fils. Parfois, la main de l’un va se poser sur celle de l’autre. Ils s’écoutent évoquer leurs souvenirs. Et souvent des sourires passent sur leurs visages. 

"C’était quelqu’un de très généreux, décrivent-ils.Il avait le cœur sous la main. Souvent, il hébergeait des gens chez lui. Un jour, il y avait une famille mahoraise dans la rue. La dame était enceinte, elle avait ses deux enfants et des valises sur le trottoir. Il était 21h30, il leur a ouvert sa porte."

Martine revoit le même garçon, des années auparavant : "Quand il était petit, il invitait tout le monde à venir manger à la maison. Le facteur déposait le courrier, il lui demandait s’il avait faim..." dit-elle en riant. 

"Il n’avait pas que des qualités bien sûr, mais il était généreux. Il arrangeait les petits conflits, écoutait, soutenait. Aider c’était pour lui quelque chose de tout à fait naturel, insiste son père. Au point d’inquiéter parfois sa mère qui lui répétait : "tu ne sauveras pas le monde tout seul !"

Deux marches "en couleur" avaient été organisées après le décès de Wilhem, elles avaient rassemblé plusieurs centaines de personnes. "Je me souviens de la dernière marche, lorsqu’on est arrivé à Saint-Jacques-de-la-Lande, en approchant de l’estrade, ils avaient mis le disque de Wilhem, il y avait sa voix, c’était terrible et magnifique." 

Un quartier alors gangrené par la drogue


Devant la mairie de Saint-Jacques-de-la-Lande, à cette époque, un point de deal était installé. La chose était visible, notoire. 

Quelques semaines après le drame, le procureur de la République tenait une réunion dans les locaux municipaux. Pendant qu’il s’adressait aux élus, le trafic continuait derrière les stores…

"Bien sûr y a la drogue derrière tout ça. C’est une catastrophe, se désole le père de Wilhem. Les guetteurs sont de plus en plus jeunes. Ils ont 14 ans et on commence à trouver des quantités de drogue qui sont énormes dans les coffres de voiture et même des armes de guerre." 

Cinq agresseurs interpellés

Les cinq agresseurs de Wilhem avaient été rapidement interpellés. Certains étaient connus de la justice. Deux d’entre eux étaient mineurs au moment des faits. Ils vont comparaître devant la cour d’assises des mineurs à partir du 17 octobre 2024. 

"Ce qu’on veut c’est qu’ils soient punis comme il se doit. Mais ce qu’on souhaiterait, c’est qu’il y ait les moyens de les aider dans les centres pénitentiaires. Qu’ils puissent prendre conscience, se former.  S’ils ressortent au bout de quelques années et que rien n’a changé, ils recommenceront la même vie avec les mêmes violences." 

Les proches de Wilhem attendent des réponses à leurs questions, "parce que ce n’est pas normal que des jeunes comme ça tapent à mort". "Nos petits bonhommes, nos petits-fils nous demandent, pourquoi, pourquoi on a tué papa ? Ça c’est terrible. Nous, on est grand, mais eux…"

René-François et Martine s’attendent à des instants difficiles. Les agresseurs de leur fils seront là, face à eux. "Je veux comprendre d’où ils viennent, comprendre pourquoi, répète encore Martine avant de préciser aussitôt, mais je ne veux surtout pas qu’on tombe dans le piège du racisme ! Surtout pas ! On a été très clair depuis le début on veut éviter toute récupération par l’extrême droite. Nous sommes tous citoyens." 

"Wilhem, il était comme nous. Qu’on soit musulman, juif, black de peau, on s’en fiche, la porte est ouverte… "

Le procès se tiendra jusqu’au 25 octobre. Les proches de Wilhem espèrent ensuite pouvoir souffler.

Ils ne tourneront pas la page… jamais. "La vie passe, mais c’était notre fils et un amour de petit-garçon… Wilhem est toujours présent !"

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