La soprano Chloé Briot confie avoir été agressée sexuellement sur scène par un collègue lors de la production de l'opéra L'Inondation, jouée notamment à Rennes en janvier. Alerté, l'Opéra de Rennes s'est organisé pour que ces attouchements présumés ne se répètent pas. Une plainte est déposée.
À l'instar des professionnels du cinéma, le milieu feutré de l'opéra n'échappe pas non plus aux comportements sexistes. La chanteuse lyrique Chloé Briot a décidé de "briser la loi du silence" et d'exposer le problème à la presse : dans un témoignage publié le 19 août par La Lettre du musicien, la soprano de 32 ans affirme avoir été victime d'agressions sexuelles répétées de la part d'un de ses collègues chanteurs. Elle a déposé plainte en mars et une enquête est en cours.
Les faits auraient duré "plusieurs semaines, même plusieurs mois" selon l'artiste Ils seraient survenus pendant la production de l'opéra L'Inondation, commandée par l'Opéra comique de Paris et aussi co-produite par les opéras de Rennes et Angers-Nantes. Chloé Briot, qui détenait le premier rôle, explique que son partenaire profitait de deux scènes d'intimité entre leurs deux personnages, lors des répétitions et représentations, pour avoir des gestes abusifs, sans rapport avec la mise en scène.
Il m’a murmuré : « J’ai envie de te faire mal, j’ai envie d’y aller »
Après les premières dates parisiennes à l'automne 2019, le spectacle se produit à Rennes les 15, 16 et 18 janvier 2020. Lors de la deuxième soirée, les agressions reprennent. "En pleine représentation, détaille Chloé Briot, il a palpé mon sein droit comme de la pâte à modeler. J’ai tenté de me recroqueviller pour qu’il ne puisse plus me toucher. Dans la deuxième scène, il a écarté violemment mes jambes en mettant sa tête sur mon sexe. Durant une autre représentation il m’a murmuré : « J’ai envie de te faire mal, j’ai envie d’y aller »" explique-t-elle à nos confrères de La Lettre du musicien.
Un protocole contre les comportements sexistes
Le directeur de l'Opéra de Rennes, Matthieu Rietzler, est alerté par Chloé Briot le soir-même, à l'issue de la représentation. "Dans le milieu de l'opéra, nous bénéficions d'un protocole bien spécifique en cas de problème de ce genre. Dès le lendemain, j'ai reçu la chanteuse pour consigner son témoignage, puis le chanteur", souligne-t-il.Il rappelle toutefois qu'il ne se substitue pas aux enquêteurs : "Notre rôle n'est pas de juger, mais de prendre des précautions. Nous nous devons d'accompagner et de protéger les artistes que nous employons." D'autant plus que Chloé Briot se sentait prête à tenir son rôle pour toutes les autres dates.
Pour la dernière date de L'Inondation en Bretagne, l'Opéra de Rennes s'adapte donc. Pour que les deux artistes se croisent le moins possible, on leur donne des loges plus distantes et on décale leurs horaires de maquillage.
"J'ai aussi demandé à la régisseuse d'avoir une attention plus particulière sur les deux chanteurs," poursuit Matthieu Rietzler, qui estime que le milieu de l'opéra est "plutôt bien armé pour réagir" avec ce protocole, utilisé "assez rarement". Avant de conclure : "il est essentiel que la parole se libère."