Pour la première fois en France, un quartier dédié à la prise en charge de la radicalisation des détenues femmes va ouvrir à Rennes. Les représentants du personnel évoquent un bâtiment inadapté et un plan de formation insuffisant.
L'administration pénitentiaire refuse de confirmer ou de commenter, mais l'information a déjà été largement diffusée dans la presse. Entre fin juin et fin juillet, un quartier de prise en charge de la radicalisation (QPR) ouvrira au sein du centre pénitentiaire pour femmes de Rennes. Dans un premier temps ce sont six femmes qui devraient être accueillies et d'ici la fin 2022 elles seront 30 à être incarcérées sur le site rennais.
Un bâtiment inadapté selon FO
Actuellement, le centre pénitentiaire pour femmes comprend un centre de détention pour les personnes condamnées à plus de deux ans, ainsi qu'une maison d'arrêt pour les courtes peines et les prévenues. La création d'un quartier dédiée aux femmes radicalisée nécessite un réaménagment des locaux.
Le projet initial prévoit d'installer le QPR dans la partie maison d'arrêt d'aujourd'hui et de déménager les détenues et prévenues de la maison d'arrêt dans la partie centre de détention. La nurserie actuelle doit aussi être transformée en salle de sport et d'activité.
"Les travaux devaient commencer début mai, mais il semble que rien n'ait encore été lancé" nous explique Sophie Hautbois, déléguée syndicale FO. Elle ajoute qu'"il va aussi falloir installer des caméras, changer toutes les portes de la maison d'arrêt et mettre des passe menottes" .
Le projet inquiète. Pour la représentante des salariés la structure n'est pas adaptée. "Dans le centre de détention les cellules donnent vers l'extérieur et vers l'intérieur. Aussi les femmes incarcérées dans le QPR ont normalement accès au gymnase commun, et devront donc traverser la cour pour cela. Elles vont forcément croiser d'autres détenues. Pourtant les règles sont que dans un quartier de pris en charge de la radicalisation les détenues doivent être totalement isolées. Le QPR doit être étanche au niveau physique, visuel et sonore. Cela est infaisable dans les bâtiments actuels."
Le syndicat FO, majoritaire à Rennes, milite pour la création d'établissements spécialisés qui permettrait d'adapter la structure, le matériel et les personnels surveillants à la dangerosité des détenus. "Dans un établissement haute sécurité il y a des miradors, des filets anti-projection, des scanners à l'entrée et les détenus sont vraiment isolés" autant de mesures qui garantissent la sécurité de tous selon la syndicaliste.
Une formation insuffisante
Pour encadrer les six détenues radicalisées, l'administration prévoit 12 surveillantes et surveillants dans un premier temps. Les effectifs seront ensuite augmentés à 17 surveillants, un officier et trois surveillants cadres soit 21 personnes pour les 30 femmes, tous sélectionnées parmi les volontaires.
La direction pénitentiaire a annoncé aux personnels qu'ils pourraient bénéficier d'une formation de trois semaines. Le programme prévoit des cours théoriques sur les mécanismes de radicalisation et la psychologie de ces personnes et de cours pratiques sur les techniques d'intervention, l'escorte ou encore le menottage.
Sophie Hautbois estime que cela n'est pas suffisant et demande que les séances de formation soient renouvelées tous les trimestres. "Ce sont des profils particuliers auxquels nous seront confrontés. Elles sont potentiellement plus violentes et risquent de demander plus de manipulation" .
Même constat pour le syndicat UFAP
Le syndicat UFAP partage le constat : "On bricole. L'établissement n'est pas adapté à ces profils. Différents régimes de détention vont se croiser. Il faut une structure indépendante" réagit le secrétaire régional Philippe Devique. "Il faut aussi une formation plus approfondie pour les personnel, pas simplement quelques jours" ajoute Nathalie Michaux, déléguée du centre pénitentiaire des femmes de Rennes.
Jointe par téléphone l'administration pénitentiaire a indiqué qu'elle ne communiquerait pas avant fin juin.