"Il faisait partie de l'équipe britannique aux JO de Berlin". Un aviateur anglais et six Canadiens, héros de la bataille de Cézembre en août 1944

Ils étaient 7 membres d'équipages. Un aviateur anglais et six Canadiens. Le 31 août 1944, ils participent à l'opération de bombardement de l'île de Cézembre au large de Saint-Malo. C'est la dernière poche de résistance allemande dans la zone. Le bombardier canadien est abattu par la DCA allemande. 80 ans plus tard, des Bretons honorent la mémoire de ces hommes dont les corps n'ont jamais été retrouvés.

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"Ce jour-là, c'était un vrai déluge de feu et de fer" raconte Benoit Paquet, de l'Association Bretonne du Souvenir Aérien 39-45.

Le 31 août 1944, en plus des tirs de gros canons alliés depuis Saint-Malo et aussi depuis la mer grâce au cuirassé anglais HMS Malaya, ce sont des bombardiers alliés qui vont, tour à tour, larguer leurs bombes au phosphore et au napalm sur l'île de Cézembre. Un îlot confetti d'à peine dix hectares où les Allemands se sont retranchés tout en bloquant l'accès aux ports de Granville, Cancale et Saint-Malo.

"Deux semaines plus tôt, les alliés ont libéré la cité corsaire." précise Benoit Paquet. Mais le Vice-Amiral Hûffmeier, qui dirige l'armée allemande depuis Jersey, et qui est un fervent nazi, a décidé de suivre les ordres d'Hitler. À savoir, résister coûte que coûte pour retarder l'avancée alliée sur l'Allemagne grâce à leur puissante DCA sur l'île.

En tout, 11 escadrilles comptabilisant 165 bombardiers Halifax vont décoller avec, pour mission, d'anéantir la poche allemande de Cézembre.

Le seul bombardier à ne pas avoir regagné sa base

Parmi ces avions, le bombardier Handley Page Halifax baptisé "If Any" appartenant à l'escadron 433. À bord, 7 membres d'équipages, 6 Canadiens et un Anglais. Tous âgés entre 20 et 36 ans. À bord, le seul anglais est le Sergent Charles William Garett, mécanicien. À ses côtés, 6 canadiens : l'officer pilote bombardier Wendell Lyall LONG, 21 ans, l'opérateur radio et mitrailleur Lorne Stanley GUERNSEY, 25ans, le mitrailleur James Reid HAWKINS, 20 ans, le mécanicien et mitrailleur George William PHARIS, 29 ans, le navigateur Frederic Cuthbert HARMAR Junior, 31 ans et l'officier naviguant et mécanicien James Ralph BEVERIDGE, 26 ans.

L'avion survole l'île à 900 mètres d'altitude. Et tout à coup, il perd son cap. "Il y a 6 ans, j'avais retrouvé à Rotheneuf, deux femmes âgées de 92 et 96 ans, témoins du crash du bombardier. Elles m'ont raconté qu'elles ont vu l'avion se détacher de sa formation et s'abîmer en mer" précise Thierry Trotin, plongeur amateur.

"L'île était bombardée depuis le 17 août et ce 31 août était le dernier jour de bombardement prévu. Le bombardier "If Any" a été le seul à s'abîmer en mer. Impossible de savoir si l'avion a été touché par la DCA allemande ou bien s'il a connu une panne" ajoute Benoit Paquet de l'association "ABSA 39-45".

Il était le plus âgé. Et le Sergent Garett a tout fait pour pouvoir s'engager dans la Royal Air Force.

Benoit Paquet

Association Bretonne du Souvenir Aérien

Le Sergent Charles William Garett était mécanicien. Le policier de métier basé à Londres avait tout fait pour intégrer l'armée britannique malgré son âge. "Il avait dû un peu forcer les choses car il était trop vieux pour s'engager dans l'Armée de l'air mais en fait, les mécaniciens étaient une denrée rare." prévient Benoit Paquet de l'association "ABSA 39-45" qui a décidé d'organiser deux jours de commémorations en souvenir de ces héros de la bataille de Cézembre, dont les corps n'ont jamais été retrouvés.

Invitées aux cérémonies, des familles d'aviateurs comme Graham Frost, le gendre du Sergent Garett. Ce dernier n'a jamais connu son beau-père vivant. Sa femme, Caroll Frost, n'a, elle non plus, jamais connu son père car il est mort quand elle n'avait que deux ans. Ironie du sort, elle devait participer aux cérémonies mais elle est décédée il y a deux mois. "Elle voulait tellement participer à ces commémorations. Nous avons été mariés 59 ans et elle n'a jamais accepté la mort de son père. Alors, venir ici pour elle, c'est la dernière chose que je peux faire pour elle" raconte Graham Frost avec beaucoup d'émotion. Lui a décidé de venir avec deux de ses trois fils pour garder la mémoire de la famille.

Honorer la mémoire des sept aviateurs

Vendredi 16 août et samedi 17 août, plusieurs moments de souvenir sont prévus par l'association "ABSA 39-45" à Saint-Malo. Avec des conférences en présence des familles, mais aussi l'inauguration d'une plaque à la mémoire de l'équipage et des dépôts de gerbes de fleurs en mer sur le site du crash.

Il aura fallu 20 ans à deux plongeurs bretons pour retrouver certains débris de l'épave du bombardier "If Any". Thierry Trotin et son compère Olivier Brichet, tous les deux amateurs de recherches d'épaves en mer, vont effectuer plus d'une centaine de plongées en deux décennies. En se basant sur les témoignages de l'époque et ceux récupérés après un appel à témoin lancé en 1998, ils définissent une zone d'un kilomètre sur deux à proximité de la pointe de la Varde.

Des débris retrouvés à 800 mètres de la côte

Finalement, en juin 2018, un morceau d'aile et les quatre moteurs sont localisés. "Nous les avons retrouvés dans la zone des 15 mètres. Le reste, comme le fuselage en alu très fin, a été pulvérisé au moment du choc, prévient Thierry Trotin, l'un des deux plongeurs. Et nous les avons retrouvés dans la zone prévue qui est une zone marquée par les tempêtes hivernales, les forts coefficients de marée et nous sommes aussi dans une zone de dragage des pêcheurs."

Des débris qui ont été photographiés pour la mémoire et sur lesquels a été fixée une plaque commémorative.

Pour nous, c'est un devoir de mémoire

Benoit Paquet

Association Bretonne du Souvenir Aérien 39-45

80 ans après les faits, pour Benoit Paquet de l'Association Bretonne du Souvenir Aérien 39-45, il est important de ne pas oublier la mémoire de ces héros et surtout de la transmettre aux jeunes générations. "Quand on explique à des écoliers du coin que c'était juste à côté de chez eux, de leur maison ou, près de là où ils vont à l'école, ça les touche beaucoup plus. Surtout quand, en plus, on retrouve des descendants. Ce sont beaucoup d'émotions. Pour nous, c'est un devoir de mémoire."

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