L'an dernier, l'enseigne Super U tentait de casser les clichés dans son catalogue de Noël. Cette année, un garçon fait la cuisine et une fille du bricolage, pas plus. Les clichés ont encore la vie dure : les mini-caddies, dans les salles de jeux sont souvent poussés par les filles. Mais pourquoi ?
Fin octobre 2012, le catalogue de jouets de Super U apparaissait comme révolutionnaire. Tous les médias ou presque relayaient un acte de bravoure. Lequel ? Le distributeur avait osé l’impensable, à en croire les regards surpris qui se penchaient sur une simple publicité (et qui recommencent cette année encore) : les photos du catalogue montraient une petite fille jouant avec un buggy radio commandé et un petit garçon utilisant une cuisinière : un vrai choc !
Quand le contrepied devient un outil marketing
Thierry Desouches, en charge des relations extérieures du groupe expliquait au journal Le Point que sa démarche n'était pas une démarche militante. "Dire qu'il s'agit d'un catalogue antisexiste est exagéré. Cela n'a rien d'extraordinaire. Nous voulions simplement faire quelque chose pour mixer les genres, d'abord parce que certains clients étaient demandeurs. Vu les réactions, l'année prochaine, nos confrères feront la même chose !" s'amusait-t-il alors devant le succès assez prévisible de la campagne marketing.
"Donc c'est possible !" s'était alors étonnée la présidente d'Osez le féminisme en Alsace, Cécile Corallini,
Le Prince sauve la Princesse et pourquoi pas l’inverse ?
Possible oui, mais les habitudes ont la vie dure. Dans un milieu high tech, fourmillant de brillants cerveaux en tout genre : celui des créateurs de jeux vidéos, les élans machistes ont encore de beaux jours devant eux. A part Lara Croft, combien d’héroïnes de jeux vidéos pouvez-vous citer ? Difficile hein ? Tellement compliqué qu’un papa de Toronto, Mike Hoye, a piraté le jeu Zelda et en a modifié les codes. Pourquoi ? Pour que sa petite fille Maya puisse aller sauver son Prince au lieu de rester scotchée dans le donjon en attendant que Link trouve enfin la clé des énigmes lui permettant d’y monter.
Un autre papa, apparemment basé lui aussi en Amérique du Nord, a eu la brillante idée de filmer le questionnement de Riley, sa fille, dans un magasin de jouets. L’enfant, entre deux linéaires, l’un entièrement rose et l’autre coloré, explique en avoir assez de devoir choisir entre des jouets uniformément roses alors que les garçons ont « toutes les autres couleurs ». Pas juste !
Alors comment explique-t-on cette séparation jouets pour filles / jouets pour garçons ?
Par commodité ? Pour s’y retrouver dans les boutiques et les catalogues ? Dans ce cas, pourquoi les supermarchés n’opèrent-ils pas de la
même façon ? Les légumes pour hommes d’un côté, les légumes pour femmes de l'autre…En 1973, Elena Gianini Belloti, une institutrice italienne, publiait un ouvrage qui analysait les pressions que la société exerçait sur les petites filles pour leur faire intégrer un modèle féminin. « Du côté des petites filles, l'influence des conditionnements sociaux sur la formation du rôle féminin dans la petite enfance » décortiquait entre autres l'influence des jouets et de la littérature enfantine sur le développement des petites filles. Et influence il y avait. Qui de la poule ou l’œuf ?... Est-ce que les petites filles veulent des jouets roses ou sont-elles incitées à cela ?
Faut-il alors éviter à tout prix de sexuer soit même les cadeaux ? Offrir un aspirateur au lieu d’un fusil à un garçon ? Bruno Bettelheim, le célèbre psychanalyste américain, expliquait dans son livre « Pour être des parents acceptables », que les adultes doivent respecter le désir de l’enfant. S'il veut jouer avec des fusils pour simuler des batailles, qu’il joue. Aujourd’hui, spécifierait-il qu’il ou elle joue ? Sans doute. En tous cas, proposer des cadeaux non sexués, oui, mais les imposer, bien entendu non. Si vous ne voulez pas qu'ils finissent au fond du coffre à jouets..
Le reportage d'Alain-Georges Emonet et Amélie Rigodanzo à la Ludothèque de Blois
Un jouet peut-il être sexiste ?
D’après Vie Féminine, " certains jouets paraissent dès le premier regard sexistes et correspondent aux stéréotypes (Barbie, Bratz, Action man…).D’autres (poupons, perles, voitures…) ne donnent pas une image stéréotypée mais, de manière indirecte, sont stéréotypés car destinés exclusivement aux filles ou aux garçons.
Les jouets dits neutres (Lego, Playmobil…) différencient également leurs boîtes et leurs contenus : le château de princesse, la maison traditionnelle…
De nombreux jouets sont similaires dans leurs fonctions mais présentés de manière différente aux filles et aux garçons (puzzles Victor le pirate ou Charlotte la princesse)."