Il s'agit de la première mise en examen d'une personne physique dans ce dossier, plus de 5 ans après les faits.
Nouveau rebondissement dans l'enquête sur la catastrophe ferroviaire de Brétigny-sur-Orge, l'une des plus dramatiques de ces 20 dernières années. Un cadre de la SNCF a été mis en examen ce 9 janvier pour homicides et blessures involontaires.
Il s'agit de la première mise en examen d'une personne physique dans ce dossier, plus de 5 ans après l'accident qui, le 12 juillet 2013, a coûté la vie à 7 personnes. Un élément d'autant plus inattendu que les juges d'instruction étaient sur le point de clore l'enquête.
Qui est la personne mise en examen ?
"Cette nouvelle mise en examen concerne un cadre de SNCF Mobilité, lequel avait été préalablement entendu par le juge d'instruction sous le statut de témoin assisté", a indiqué la procureure du parquet d'Evry, Caroline Nisand.
Ce "dirigeant de proximité" était à la tête d'une brigade chargée de l'inspection des voies au moment du déraillement de ce train Intercités Paris-Limoges à Brétigny-sur-Orge. Il travaillait à Brétigny depuis cinq mois.
Que lui reproche-t-on ?
Les magistrats estiment que la dernière tournée d'inspection réalisée par l'équipe, huit jours avant le déraillement, n'a pas été faite correctement. L'avocat du dirigeant, maître Philippe Valent, estime qu'"aucun élément ne permet de corroborer cette hypothèse". La dernière audition de son client remonte à janvier 2015 et il n'y aurait eu "aucun élément nouveau, tangible, qui permette de l'incriminer".
Comme lors de sa précédente audition, son client a affirmé mercredi devant les juges d'instruction que s'il avait relevé lors de sa tournée de surveillance des voies "la moindre anomalie, le moindre désordre, cela aurait été noté sur la fiche d'inspection".
Comment ont réagi les proches des victimes ?
Jusqu'à présent, malgré les demandes des familles de victimes, seules deux personnes morales, la SNCF et RFF (Réseau ferré de France), étaient poursuivies dans cette affaire, également pour homicides et blessures involontaires.
Cette mise en examen longuement réclamée d'une personne physique a été saluée. "C'est un grand progrès dans l'instruction", s'est félicité Xavier-Philippe Gruwez, avocat d'une dizaine de victimes, pour qui cette décision laisse présager d'autres mises en examen similaires.
"Les familles et les victimes pourront enfin mettre des visages sur cette catastrophe terrible et les responsabilités des hommes de terrain seront enfin établies", a-t-il commenté.
Brétigny, la bataille des experts
La catastrophe ferroviaire de Brétigny donne lieu depuis ses débuts à une véritable bataille d'experts, d'expertises et de contre-expertises.Depuis cinq ans, toutes les expertises judiciaires ordonnées par la justice ont conclu que le train avait déraillé à cause d'un morceau de voie mal entretenu, qui s'est désagrégé au fil du temps. Mais la SNCF met en avant depuis le départ l'hypothèse d'un assemblage qui aurait cédé brutalement, ce qui la dédouanerait d'une potentielle responsabilité.
En 2017, l'entreprise avait obtenu une expertise complémentaire afin de rechercher un éventuel "défaut de l'acier" d'une pièce d'aiguillage pouvant expliquer le déraillement du train. Mais l'expertise métallurgique lui a été une nouvelle fois défavorable, en concluant que l'accident avait été causé par la vétusté des rails.
En septembre, un ultime rapport commandé par la SNCF estimait lui que la catastrophe de Brétigny-sur-Orge était un accident "imprévisible", et non la conséquence d'un défaut de maintenance.