Après les accusations d’agressions sexuelles portées à l'encontre de l’Abbé Pierre, des villes réfléchissent à débaptiser les rues qui portent le nom du fondateur d'Emmaüs. En Centre-Val de Loire, les municipalités préfèrent temporiser.
Une rue, une allée ou encore une avenue… Dans la région Centre-Val de Loire, nous avons recensé sept communes qui ont, à l'époque, rendu hommage au fondateur d’Emmaüs. Selon l’AFP, 150 voies ou lieux-dits en France sont nommés Abbé-Pierre ou Henri Grouès, son nom de naissance.
Dans l'Indre, l'Allée Abbé Pierre s'étend sur Déols et sur Étrechet. C'est d'ailleurs là que se trouve un local de son association. Même chose à Esvres-sur-Indre (Indre-et-Loire) où les bénévoles d'Emmaüs et les clients continuent de se retrouver au sein de la structure.
En juillet dernier, puis au début du mois de septembre, vingt-quatre femmes accusent le prêtre décédé en 2007, de violences sexuelles commises entre les années 50 et 2000. "Le nom de l'Abbé Pierre est sali et ne peut plus être proposé comme modèle", estime Véronique Fayet, ancienne présidente du Secours catholique, interrogée par le journal La Croix. L'historien Mathieu da Vinha rappelle dans le même article que l'on parle, avec ces accusations, de faits punis par la loi à l’époque. "En dépit de l'action de l'Abbé Pierre en faveur des plus pauvres et des mal-logés, très clairement, ce seul critère juridique conduit à retirer son nom de l'espace public".
>>> À (RE)VOIR : VIDÉO. "Distinguer l'homme de l'action", la communauté Loirétaine d'Emmaüs réagit aux révélations sur l'Abbé Pierre.
Les grandes villes n’ont pas tardé à réagir. Nancy a annoncé le prochain retrait d'une plaque commémorative posée à l'ancienne adresse parlementaire de l'Abbé Pierre, qui fut député de Meurthe-et-Moselle de 1945 à 1951. "La parole des victimes, femmes et enfants, doit être prioritairement entendue, respectée et soutenue", explique la municipalité. À Paris, la ville "souhaite débaptiser le jardin des Grands Moulins" portant le nom de l'abbé Pierre. La ville de Besançon va "très prochainement" retirer son nom de l'abri de nuit proche du parc des Glacis.
Une procédure "complexe"
En Région Centre-Val de Loire, rien n’est acté. Mais la réflexion est engagée. À Étrechet (Indre), à côté de Châteauroux, le conseil municipal se prononcera bientôt, probablement dans la deuxième quinzaine du mois d’octobre. Mais le maire, Marc Descouraux, n’a pas d’avis sur la question. "Il n’a pas fait que des choses mal. Il a fait des choses bien aussi", résume succinctement l’élu divers droite. À Vierzon (Cher), la décision n’est pas encore prise. Mais "on ne fait pas comme si on n’avait pas connaissance de la situation", assure Fabien Coste, directeur de cabinet de la maire de Vierzon, Corinne Ollivier.
À Bourges, il n’y a "pas de réflexion à ce stade", répond la municipalité de gauche qui rappelle que le processus est “complexe”. "Si on se décide à changer le nom de la rue, on ne pourra pas le faire sans l’avis des riverains", renchérit-on à Vierzon. "Ça suppose quelques modifications d’adressage et donc ça peut poser quelques difficultés pour les habitants". Changer d’adresse, ça signifie refaire ses papiers, sa carte grise. Il faut aussi contacter toutes les administrations, ainsi que la multitude de prestataires qui livrent à domicile.