"C'est une urgence, on est là pour répondre" : à Tours et Orléans, la prise en charge de l'IVG face à la crise sanitaire

Alors que la région Centre-Val de Loire n'a pas atteint son pic d'épidémie, les centres et services qui assurent la continuité du droit à l'avortement s'organisent.

"Il ne faut pas que les femmes hésitent à téléphoner. Ce n'est pas parce qu'on ne décroche pas pendant 10 minutes qu'on est fermés. L'IVG est une urgence, on est là pour répondre", tranche la Docteur Nathalie Trignol-Viguier, médecin référent du centre d'orthogénie du CHU de Tours.

Malgré les craintes des associations, l'Interruption Volontaire de Grossesse, ou avortement, est bien l'un des soins médicaux maintenus malgré l'état d'urgence sanitaire décrété le 22 mars pour faire face à la crise du Coronavirus. En Centre-Val de Loire, où l'épidémie n'a pas encore atteint son pic, 23 établissements sont habiletés à pratiquer l'IVG, selon le dernier bilan rendu public par l'ARS, en 2017. Selon le même document, le CHU de Tours était en 2015 le deuxième établissement en nombre d'avortements pratiqués : 1068.

"Le centre d'orthogénie de Tours a toujours eu des moyens adaptés pour répondre aux besoins des femmes et les accueillir dans les meilleures conditions possibles, et en leur offrant toutes les possibilités. (voir encadré) Aujourd'hui, on a annulé la totalité de notre activité pour garder exclusivement l'activité d'IVG et de contraception urgente" informe la Docteur Trignol-Viguier. 
 

IVG et contraception : "On a les moyens de les aider"


Selon la médecin référente, le service a complètement modifié sa façon de travailler. "Dès que la secrétaire a l'appel d'une patiente, un médecin se charge de la rappeler pour organiser avec elle une consultation téléphonique et évaluer sa demande. Si sa demande est claire et décidée, on organise tout de suite avec elle l'IVG qu'elle souhaite réaliser."

Si l'équipe médicale ne l'impose absolument pas, elle invite les patientes qui le souhaitent ou le peuvent à privilégier une IVG médicamenteuse, ou sous anesthésie locale(voir encadré) , pour préserver aussi bien les blocs opératoires que les anesthésistes. "Nous le faisons parce que la situation est celle qu'on connaît, mais aussi parce qu'on a une très grande habitude et expérience dans le service de la pratique des IVG sous anesthésie locale, et on a le même personnel accompagnant en salle, pour que la femme soit prise en charge dans les conditions les plus adaptées" rassure Nathalie Trignol-Viguier.

Le service orthogénie du CHU assure également une continuité pour les patientes en demande d'une contraception. "Toute femme qui a encore des besoins contraceptifs, on se débrouille par tous les moyens pour leur obtenir ce qu'il faut. S'il y a par exemple besoin d'une pose de stérilet en urgence, on la fera. Même les femmes qui ne sont pas des patientes, qu'on ne connaît pas, on a les moyens de les aider. Il ne faut pas se retrouver en défaut de contraception par peur que ce ne soit pas facilement accessible", martèle celle qui est aussi membre de l'Association Nationale des Centres d'IVG et de Contraception. 

Prêts mais inquiets


Même écho au Planning Familial d'Orléans. Ici, on ne peut réaliser que deux types d'IVG : l'IVG médicamenteuse avant la cinquième semaine de grossesse, et l'IVG par aspiration sous anesthésie locale. La Docteur Laurence Wittke, directrice du centre de plannification qui accueille une trentaine de femmes par mois, assure que "l'activité est inchangée, on n'est pas débordés par les demandes. On a d'ailleurs fait savoir à l'hôpital d'Orléans que s'ils étaient en difficulté, on se tenait à leur disposition."

Comme au CHU de Tours, la structure a réduit son activité sur place au strict minimum, assurant pour tout le reste un accueil téléphonique. Comme au CHU de Tours, le planning familial a envisagé l'accueil de patientes atteintes du coronavirus ou soupçonnées de l'être et s'estime suffisamment préparé. Mais, comme au CHU de Tours, l'inquiétude plane tout de même. "Avec le Covid-19, on navigue à vue. On ne sait pas s'il va y avoir la vague annoncée, est-ce que les hôpitaux vont être débordés ? Est-ce que nous, qui avons des cabinets en ville, allons être débordées ? Il y a des aléas qu'on ne maîtrise pas", reconnaît la praticienne.
 

La situation des mineures, "un vrai casse-tête"


Au centre de plannification d'Orléans, on est déjà concernés par la situation particulièrement délicate des mineures qui souhaitent avorter. "Ce n'est pas rare des femmes qui font leurs IVG dans le secret de leur conjoint ou leurs parents, et là il va forcément y avoir des situations compliquées. On a deux jeunes filles mineures qui se savent enceintes, qui sont confinées chez elles, qui sont dans le secret vis-à-vis de leur famille. L'une d'elle nous a lancé à SOS, elle habite à plus d'une heure de Gien... C'est un casse-tête pour savoir comment elles vont être prises en charge." C'est d'autant plus complexe qu'actuellement, la loi impose aux mineures deux rendez-vous préalables, espacés de 48h. "On n'a pas encore été confrontés au cas, mais je pense qu'il faut faire dans l'intérêt de la patiente. On est dans une situation exceptionnelle, donc si c'est nécessaire..." Pour Laurence Wittke, sa conscience de médecin sera le dernier juge.

"On espère des évolutions législatives pour permettre aux mineures d'accéder aussi simplement que possible à l'IVG dans les conditions actuelles, appuie la Docteur Trignol-Viguier, du CHU de Tours. Une mineure qui serait surveillée par son entourage et qui n'aurait pas eu d'autre alternative que de venir et qui devrait avoir son IVG dans la foulée, je pense qu'on s'autoriserait à utiliser une procédure d'urgence. Mais la situation ne s'est pas encore présentée."

Possibilité de recevoir une convocation par mail, de faxer directement une ordonnance en pharmacie, accueil téléphonique renforcé... Les centres qui assurent la continuité du droit à l'IVG, inscrit dans la loi française en 1975, essayent de tout prévoir. En attendant l'imprévisible.
 
Je veux me faire avorter : que faire ?
Vous pouvez avoir recours à une IVG par plusieurs méthodes différentes :

- IVG médicamenteuse, qui se déroule par deux prises de médicament qui vont déclencher l'expulsion de la grossesse. Vous pouvez y avoir recours à domicile, en centre de plannification, à l'hôpital, ou chez un médecin ou une sage femme de ville formé à cette pratique. Si l'IVG médicamenteuse est pratiquée entre la 5ème et la 7ème semaine, elle se fait obligatoirement à l'hôpital
- IVG par aspiration avec anesthésie générale, qui se déroule à l'hôpital
- IVG par aspiration avec anesthésie locale, qui peut se dérouler à l'hôpital ou au Planning Familial du Loiret à Orléans (les autres centres de planification ne pratiquent pas l'IVG sous anesthésie locale)

En France, l'IVG est possible jusqu'à la douzième semaine de grossesse. L'avortement est remboursé à 100% par la sécurité sociale et peut être anonyme.

Pour vous renseigner :
- le site ivg.gouv.fr, site internet de référence sur l'information concernant l'IVG
- le site ivglesadresses.org, qui vous aide à trouver un centre près de chez vous
- le site internet du planning familial et son numéro vert, le 0 800 08 11 11, anonyme et gratuit

Vous pouvez également contacter le planning familial pour vos besoins contraceptifs. Pour limiter la propagation du coronavirus, et si vous le pouvez, ne vous déplacez pas sans avoir téléphoné au préalable.
L'actualité "Société" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
Centre-Val de Loire
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité