Témoignages. Ecole à la maison : parents et enseignants d'Eure-et-Loir et du Loiret racontent leurs galères

Publié le Écrit par Marine Rondonnier

Comment garder la motivation quand les outils informatiques ne suivent pas ? Comment gérer les bugs des plateformes tout en télétravaillant ? Comment garder le lien avec les élèves quand les visioconférences ne fonctionnent pas ? Témoignages de parents et d'enseignants de l'académie Orléans-Tours. 

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Le plus compliqué ce sont les cours en ligne, parce que les enseignants et certains élèves ne peuvent pas se connecter

Phebée, 13 ans, élève de 3ème à Orléans

C'est l'année du brevet pour Phebée et jusque-là aucun de ses cours en ligne n'a été assuré. "J'attends que l'enseignant et les autres élèves se connectent et au bout d'un moment, le cours est annulé".

Et encore, Phebée a eu de la chance. Elle est parvenue à se connecter à l'ENT. Mais beaucoup d'enseignants et d'élèves ont rencontré des difficultés. Résultat : elle travaille entre deux et trois heures par jour grâce aux exercices donnés par les enseignants. 

Et cela fait deux jours que ça dure. Si ça n'inquiète pas trop cette collégienne d'Orléans, sa maman, elle, est plus sceptique :

"Le travail à distance n'est déjà pas évident mais au moins les visios avec les enseignants permettent de garder un rythme et une certaine motivation. Avec ces problèmes de connexion et de classes virtuelles annulées, j'ai peur que ma fille perde sa motivation. Heureusement qu'elle est autonome", confie Christelle Rouer.

Inquiétudes partagées par Arnaud, papa de deux garçons de10 et 17 ans scolarisés à Orléans. "Pour le grand, l'ENT a été opérationnel deux heures en deux jours. Je suis très inquiet notamment pour la préparation du Grand oral du Bac qui est nouveau pour tout le monde, les élèves et les enseignants. En plus, il prépare des concours pour des écoles d'ingénieur. J'ai peur qu'il ne soit pas assez alimenté en connaissances. " 

Arnaud télétravaille depuis presque un an. Il a aménagé son temps de travail pour pouvoir assurer un suivi des devoirs de ses fils :

"Evidemment je suis moins efficace pour mon travail. Pour le plus jeune, il faut être derrière. Il a tendance à regarder la télé ou jouer aux jeux vidéos. Donc on fait les devoirs le matin et l'après-midi c'est relâche. Mais au moins pour lui, il n'y a pas de problème de connexion à gérer.

Vous avez été très nombreux à réagir sur notre page facebook ce mercredi 7 avril : 

Deux jours de bug sur l'ENT et le CNED

Tous ceux qui ont des enfants scolarisés dans l'académie Orléans-Tours ont du faire face à des problèmes de connexion sur la plateforme de l'ENT et celle de classe virtuelle "L'école à la maison" du CNED, ces deux premiers jours d'enseignement à distance. 

" Pour le bug de l’ENT, on n’est pas vraiment surpris ", témoigne Pierre Licout de la FSU 28, Fédération syndicale unitaire des enseignants d’Eure-et-Loir.

"Malheureusement nous avions demandé un retour d’expérience après les problèmes rencontrés l’an dernier mais il ne s’est rien passé. Le gouvernement est dans le déni. Il ne fait pas l’effort de voir ce qui ne marche pas. Donc évidemment rien n’a changé en un an ".

Pour les enseignants, ce faux départ a été plutôt difficile à vivre : "Nous avons des collègues qui ont travaillé dur tout le week-end pour proposer une visioconférence à leurs élèves et rien… C’est beaucoup d’énergie de dépenser et en plus ce n’est pas bon pour notre image. On passe pour des billes et c’est terrible ", déplore Pierre Licout.

 

 

Gaelle Hardy est la maman de deux enfants de 14 et 19 ans à Nogent-le-Roi. Elle est aussi secrétaire de la FCPE 28 : "Nous avons été naïfs de croire que les couacs de l’an dernier n’allaient pas se reproduire. Et bien si. Le coup des serveurs qui plantent c’est un flagrant délit de récidive. Et pourquoi ? Parce qu’il n’y a eu aucun investissement sur l’ENT en un an."

A la suite des nombreux problèmes de connexion intervenus ce mardi 6 avril sur les plateformes ENT et CNED "l’école à la maison", le ministère de l’Education nationale a publié un communiqué de presse qui expliquait qu’en effet « en ce premier jour, des lenteurs et des difficultés ont pu être rencontrées par les utilisateurs de ces deux dispositifs notamment à cause  "d’attaques informatiques" et de  "difficultés techniques dues à la forte surcharge des infrastructures".

Le communiqué continue par "malgré ces actes de malveillance, la fréquentation à 10h ce jour reste importante : 500 000 élèves et professeurs accèdent aux plateformes  et 150 000 classes virtuelles sont actives ".

Ces chiffres mis en avant par le ministère ne passent pas très bien auprès des fédérations de parents d’élèves.

"Quand je vois ce nombre de 500 000, je suis atterrée" s’insurge Gaelle Hardy, secrétaire de la FCPE 28. "Le gouvernement trouve formidable que 500 000 élèves et enseignants aient pu se connecter alors que la France compte plus de 12 millions d’élèves… Cela fait 96% d’élèves non connectés…"

Sur les réseaux sociaux, les internautes n'ont pas manqué d'humour après les justifications du ministère de l'Education nationale à propos des bugs informatiques de ces plateformes d'enseignement à distance : 

Au troisième jour d'école à la maison, les connexions sont rétablies mais où en est la motivation des élèves ? 

Les inquiétudes des parents d’élèves et des enseignants ne s’arrêtent pas aux bugs informatiques. "Notre grande inquiétude est : comment allons-nous remettre nos enfants au travail en distanciel après deux semaines de vacances ?", s'interroge Gaelle Hardy, maman d'une élève de 3ème en Eure-et-Loire. 

Christelle Rouer, la maman de Phebée, également en troisième, se demande si " c'était bien judicieux de placer deux semaines de vacances entre deux semaines de cours en distanciel."

Elle poursuit : "Je suis sceptique sur leurs capacités à se remettre au travail et à se concentrer après deux semaines de vacances." 

Dans certains établissements comme au collège Jean Moulin de Nogent-le-Roi en Eure-et-Loir, des assistants d’éducation ont été attribués à chaque classe pour prendre des nouvelles des élèves et s’assurer qu’ils ne décrochent pas. "Celui de mon fils nous a déjà appelés. C’est bien. Nous nous sentons moins seuls quand même", confie Gaelle Hardy.

Et elle conclut : "Si ça se passe bien, c’est uniquement grâce au personnel du collège et non au gouvernement. En fait aujourd’hui, nous n’avons plus confiance en ce ministère et c’est un problème quand même."

Pierre Licout, du syndicat enseignant ajoute : " le problème c’est que les programmes n’ont du tout été aménagés comme nous l’avons demandé et c’est un leurre de croire que nous pouvons faire l’école en distanciel. L’école se fait à l’école. A la maison, il s’agit de maintenir un lien scolaire, c’est tout" .

Pour le représentant syndical, il faut donc "alléger les objectifs " pour que les élèves et les enseignants vivent bien cette nouvelle période de confinement et que tous restent motivés.

La vaccination des enseignants reportée à mi-juin

"L’urgence est de vacciner les personnels des établissements scolaires et de pouvoir tester rapidement tout le monde, élèves et personnels. C'est la seule façon de préparer sereinement la reprise des cours fin avril. Et on n’en prend pas vraiment le chemin", s’inquiète Pierre Licout. 

Fin mars, Emmanuel Macron annonçait que les enseignants seraient vaccinés mi-avril.

En fait, hier, mercredi 7 avril, lors d'une visioconférence avec des collégiens, le président de la République a indiqué que les enseignants feraient partie des publics prioritaires une fois la vaccination ouverte aux moins de 50 ans.

La vaccination des enseignants commenceraient donc mi-juin.

 

 

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