Etats généraux de la bioéthique : "J’invite tous les citoyens à s’intéresser à ces questions"

La députée du Loiret, Caroline Janvier, s'est rendue aux Etats Généraux de la Bioéthique. L'essentiel, pour elle : que les citoyens se sentent investis de ces questions. 

Le 8 janvier s'ouvraient en France les Etats Généraux de la Bioéthique, préambule de la révision de la loi relative à la bioéthique, prévue pour l'automne. En round d'ouverture, une grande consultation citoyenne, qui s'est clôt le 5 juin. 

Plutôt un succès, selon les chiffres relevés par Le Figaro. Dans les régions, 21 000 personnes ont participé aux débats organisés. Le site web a reçu plus de 65 000 contributions en ligne, 830 000 votes. La députée du Loiret, Caroline Janvier, s'est rendu à la présentation du rapport par le Comité Consultatif National d'Ethique. 


La place de la voix citoyenne dans le débat : entretien avec Caroline Janvier 



France 3 : A quel titre vous êtes-vous rendue à ces Etats Généraux ? 

Caroline Janvier : Je me suis intéressée aux Etats Généraux sans y participer de façon active puisque cette première séquence est un débat public pour les citoyens. A partir de l’automne, nous, les parlementaires, travailleront sur le projet de loi qui nous sera soumis. Je m’y suis intéressée en amont pour comprends un peu les problématiques, et me faire un avis bien avant l’examen du texte.

La question que je voulais poser c’est : comment le CCNE va construire son avis à partir des synthèses des consultations ? En septembre, il le donnera en tant qu’instance autonome et indépendante. Quelle place va-t-il donner à ces perceptions recueillies ?

France 3 : Justement, cet avis citoyen ne risque-t-il pas de s'effacer devant celui des "experts" ? 

Il faut d’un côté que la parole citoyenne soit prise en compte, et à la fois certains aspects sont très techniques. Les Etats Généraux ont élargi la consultation à 9 thèmes dont l’Assistance Médicale à la Procréation et la fin de vie, qui ne sont techniquement pas des questions de bioéthique.

La bioéthique c’est quand le progrès technique et scientifique est susceptible de modifier le rapport de la société à la vie et à l’être humain. Il n’y a pas de saut technologique, on sait déjà faire. Contrairement à des questions comme l’intelligence artificielle et les neurosciences.

La mise en place de ces Etats Généraux, de ces consultations - qui n’avaient pas du tout eu lieu notamment en 1994 où les législateurs avaient pris les décisions entre eux - font que ces questions sociétales forcent la porte du débat. En ce sens, une grande place a été laissée au débat public, maintenant il ne faut pas uniquement se laisser embarquer par ces thèmes polémiques.

L’intelligence artificielle, le rôle des robots dans les actes médicaux, l’humain augmenté… Ce sont des questions qui sont vertigineuses et il faut qu’on les investisse. Il faut dépassionner le débat, et l’élargir à des questions plus techniques. 

France 3 : Avez-vous l'impression que la société soit prête à s'emparer de ces questions ? 

J’ai l’impression qu’il y a un vrai devoir d’informer le citoyen en disant : ce sont des sujets qui peuvent sembler techniques, mais tout le monde doit prendre le temps de s’informer. Le comité citoyen, dans son rapport, en a parlé en disant : c’est incroyable, intellectuellement passionnant ! C’est à la fois de la philosophie, de la science, du droit… Et plus on s’y intéresse, plus on a un avis éclairé sur la question.

Les médias, les politiques et les experts, avons un devoir d’information pour que tout le monde s’empare de ses questions, sans fantasmes, sans rapport anxiogène et sans crispations.

Il faut qu’on investisse les possibles, financièrement mais aussi avec une réflexion éthique, qu’on ne soit pas passif face à cette révolution. Je suis très enthousiaste à ce sujet, je trouve que c’est une façon de réfléchir à la société de demain, et j’invite tous les citoyens à s’intéresser à ces questions.

Les Etats Généraux dans nos régions 



Dans notre région, l'organisation des consultations a retenu trois thématiques : l’assistance médicale à la procréation (AMP), la fin de vie et les
données de santé.
De ces consultations sont ressorties un certain nombre de recommandations. 

  • Sur l'AMP : Une majorité des participants se sont montrés favorables à une modification de la loi, affirmant l'importance d'une "liberté du projet parental". Cependant, que les participants soient pour ou contre le droit à l'enfant, ils ont affirmé ensemble que, plus que le désir d'enfant, ce qui fait d'un parent un parent aux yeux de la société est le "comportement responsable" associé à ce désir. 
Le compte-rendu relève un flou autour de la question de l'anonymat du parent et le droit ou non à connaître son histoire biologique. La consultation s'est également intéressée au risque de pénurie du don de gamètes et aux financements de l'AMP. Pour une majorité, elle doit rester gratuite pour ceux qui souhaitent y recourir. 

  • Sur la fin de vie : "Une courte majorité qui ne souhaite pas la modification de la loi en vue d’y inscrire l’aide active à mourir", note le compte-rendu. Tous les participants, favorables ou non, ont là encore exprimé leur souhait d'un cadre strict encadrant les dérives en cas d'une modification de la loi. 
La consultation a également fait ressortir la possibilité d'un statut quo, mais dans une application réelle et effective des lois déjà en place. Elle a exprimé le souhait que soient consultés les soignants, mais aussi des associations et experts, en cas d'un désaccord en le corps médical et la société civile. 

  • Sur les données de santé : Ce débat s'est essentiellement appuyé sur le rapport rendu par Cédric Villani le 8 mars 2018. "Le rapport Villani incite à trouver un équilibre entre l’ouverture des données publiques, au partage et à la mutualisation  de  données tout en encadrant les  conditions  de  collecte et  de  conservation  des données  à  caractère  personnel", indique le document. 
Le souhait a émergé d'étoffer les directives européennes qui garantissent déjà la sécurité des données.

Les recommandations complémentaires sont : 
- L'existence d'un droit à l'anonymat, et d'un droit de refuser l'usage des objets de santé connecté en étant assuré d'obtenir gratuitement une alternative viable
- L'imposition aux fournisseurs d'objet connecté des normes de cryptage et d'hébergement des données de manière à ne les rendre accessibles qu'aux professionnels de santé
- Un droit à la déconnexion, avec l'aposition obligatoire d'un bouton on/off sur ces matériels. 
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