INFO FRANCE 3. Le maire de Chartres, Jean-Pierre Gorges, dans le collimateur d'Anticor

S'appuyant sur une enquête de France 3 Centre-Val de Loire, l'association anticorruption a effectué un signalement auprès du procureur de la République de Chartres. Elle soupçonne Jean-Pierre Gorges d'avoir commis un délit en signant un marché public avec la société de son gendre.

En signant un marché public de plus d'un million d'euros avec une entreprise détenue en partie par son beau-fils, le maire de Chartres, Jean-Pierre Gorges, a-t-il commis un délit ? C'est à cette question qu'Anticor demande à la Justice de répondre.

Selon nos informations, l'association agrée par l'État et la Haute Autorité de la Transparence de la Vie Publique, a déposé un signalement auprès du procureur de Chartres au début du mois de mars 2023.

Cette alerte intervient près de trois mois après nos révélations sur les dessous de ce contrat passé entre la mairie chartraine et la société Janneau, une entreprise de maçonnerie détenue à 49% par Julien Cornu, le gendre de Jean-Pierre Gorges.

Le procureur de Chartres, Frédéric Chevallier, confirme avoir reçu le signalement d'Anticor et l'avoir transmis au parquet de Nanterre, une juridiction rattachée au parquet chartrain et disposant de magistrats spécialisés dans les questions de probité.  

Contacté par l'intermédiaire du service communication de la Ville, Jean-Pierre Gorges, n'a pas répondu à nos sollicitations, tout comme le parquet de Nanterre. 

Une signature qui questionne

Comme nous l'écrivions dans notre enquête, le maire de Chartres s'est impliqué dans la mise en place de ce contrat - à minima en fin de processus - en signant de sa main l'ultime document permettant de conclure ce marché dépassant le million d'euros. 

Dans le signalement que France 3 Centre-Val de Loire a pu consulter, Anticor fait part de ses soupçons : "À la lecture de ces faits, il apparaît que la commission de l’infraction de prise illégale d’intérêts pourrait être imputée à M. Jean-Pierre Gorges".

"Critères remplis" pour Anticor

La prise illégale d'intérêt est définie dans l'article 432-12 du code pénale par le "fait, par une personne […] investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt de nature à compromettre son impartialité, son indépendance ou son objectivité dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement".

Selon l'association anticorruption, les critères de ce délit puni d'une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement et 500 000 euros d'amende seraient remplis : "En refusant de déléguer la possibilité de signer cet accord-cadre à un de ses adjoints, autrement dit en ne s’étant pas déporté de cette prise de décision, M. Gorges a manifestement conservé un intérêt pouvant compromettre son impartialité et objectivité au vu de l’identité de l’entreprise retenue".

Il nous semble que seule l’ouverture d’une enquête préliminaire serait susceptible de permettre la démonstration de la vérité dans le cadre de cette affaire.

Signalement d'Anticor au procureur de la République de Chartres

L'association, qui cite la Cour de cassation, estime également que "confier des prestations à une entreprise détenue par des membres de sa famille [constituerait] une immixtion dans une opération dans laquelle il [a] la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement". Et de conclure : "La dernière condition de l’élément matériel de l’infraction de prise illégale d’intérêts paraît donc être également remplie."

Le maire dénonce "une campagne hostile"

Si la mairie n'a jamais répondu à nos sollicitations au sujet de ce contrat, Jean-Pierre Gorges a fait savoir qu'il contestait tout manquement via un communiqué de presse publié chez nos confrères de Radio Intensité, quelques jours après la parution de notre enquête, en décembre 2022.

Si le maire ne conteste pas avoir signé le document, il rappelle que "c'est une commission d'appel d'offres indépendante et souveraine, à laquelle [le maire] n'a pas siégé qui a décidé d'attribuer le groupement de commandes de la Ville de Chartres à la maçonnerie Janneau, à l'issue d'une procédure strictement encadrée par la loi", tout en évoquant "une campagne hostile" à son encontre.

Un argument qui ne tient pas selon Clarence Bathia, juriste au sein de l'association anticorruption : "On retient qu'il a quand même signé ce document alors qu'il aurait pu se déporter", défend-il. 

C'est désormais à la Justice de trancher pour savoir si ce signalement mérite que des suites y soient données.

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