Dans un courrier envoyé ce lundi soir, la préfecture d’Eure-et-Loir a mis en demeure le zoo-refuge La Tanière d’appliquer l’obligation du pass sanitaire sous 48 heures, sans quoi il subira une fermeture administrative. Mais le responsable du site n’entend pas pour l’instant changer d’avis.
Rien ne va plus entre le zoo-refuge La Tanière, à Nogent-le-Phaye près de Chartres, et la préfecture d’Eure-et-Loir. Cette dernière a en effet décidé de mettre en demeure le parc de respecter l’obligation du pass sanitaire dans un délai de 48 heures, sans quoi il sera fermé administrativement.
“À l’issue d’une période de tolérance d’une semaine [...] et malgré les échanges continus avec l’exploitant du zoo-refuge, Françoise Souliman, préfet d’Eure-et-Loir ne peut que constater son refus répété de se mettre en conformité”, déclare la préfecture dans un communiqué de presse ce lundi soir.
La direction de La Tanière a en effet décidé de ne plus demander aux visiteurs de présenter un pass sanitaire à l'entrée du site, contrairement à la nouvelle loi, votée dans la nuit du 25 au 26 juillet dernier.
"Nous fermer, ça revient à nous tuer"
Françoise Souliman appelle les responsables du site “à la raison”, car pour elle “le pass sanitaire doit permettre la continuité d'exploitation d’activités qui, sinon, pourraient être refermées”.
Je regrette la situation dans laquelle s’est placée l’exploitant du zoo-refuge la Tanière : en se plaçant en-dehors du droit et en appelant à la désobéissance civile, il nuit à l’avenir de son entreprise et à la cause qu’il défend, le bien-être des animaux qu’il recueille.
De son côté, le fondateur de La Tanière Patrick Violas n’est “pas étonné” de cette mise en demeure mais ressent “de la déception” : “parce qu’on était resté sur le fait qu’on devait se reparler pour voir quelle solution on trouverait.” “Nous fermer, ça revient à nous tuer. Pour rouvrir après, il faut refaire toute une démarche administrative de folie”, souffle-t-il. Néanmoins, il ne compte pas pour l’instant appliquer la loi.
- 70% de fréquentation
Une décision prise à cause de la chute de fréquentation. Le zoo-refuge n'a ouvert ses portes que le 11 juin dernier. Après un mois d’exploitation, le site avait accueilli 45.000 visiteurs, “sachant que ce n’était pas encore les vacances scolaires et que la météo était désastreuse à un moment”, souligne le fondateur. “La saison des parcs démarre avec les vacances scolaires. On était parti pour faire 60.000 entrées en juillet et 100.000 en août”, calculait-il.
Mais comme n’importe quel lieu de loisirs ou culturel, l’accès au zoo-refuge est depuis le 21 juillet soumis à la présentation d’un pass sanitaire (vaccination complète ou test PCR/antigénique négatif). Patrick Violas affirme qu’à partir de ce moment-là, la fréquentation a chuté de 70%.
Avec le concours des services de l’Etat et de l’agence régionale de santé qui a donné près de 1.100 tests antigéniques, il a fait installer un centre de dépistage pour les visiteurs non vaccinés. Mais le nombre d’entrées ne remontant pas, il a décidé avec sa femme de faire une entorse à la loi et de ne plus soumettre l'accès du site à la présentation du pass à partir du 25 juillet, comme on l'entend dans cette vidéo YouTube. “On n’est plus qu’à - 40% de fréquentation environ parce qu’il n’y a pas le pass”, assure-t-il.
"Soutien constant de l'Etat"
S’ensuivent alors des négociations et deux rencontres avec la préfecture. “De la 1ère à la 2ème réunion, il ne s’est rien passé et jusqu’à aujourd’hui, il ne s’est toujours rien passé”, déplore Patrick Violas, qui reproche par ailleurs à la préfète d’Eure-et-Loir d’avoir dévoilé les aides financières reçues par le zoo-refuge.
Interrogée sur les tensions, cette dernière avait nié tout imbroglio et tenu à souligner que les services de l’Etat avaient “aidé beaucoup La Tanière” car il s’agissait d’un “beau projet”. Elle avait notamment mentionné 720.000 € du ministère de l’Ecologie, 300.000 € du conseil régional, et un prêt de 1,2 millions € avec garantie bancaire.
Un argument à nouveau mis en avant dans son dernier communiqué de presse : “Depuis son ouverture et en raison de son caractère de zoo-refuge, La Tanière a bénéficié du soutien constant de l’Etat. Alors même que l’entreprise exploitant le site ne pouvait être éligible au fonds de solidarité, l’ensemble des pouvoirs publics, à l’initiative de la Préfecture, s’est mobilisé pour déployer des dispositifs d’aide exceptionnelle afin de compenser pour partie les pertes de chiffre d’affaires liées à la crise sanitaire.”
Mais en tant que “représentante de l’Etat”, et “conformément au principe d’égalité, l’établissement La Tanière pas plus qu’un autre ne saurait être privilégié”, affirme Françoise Souliman.
En attente du Conseil constitutionnel
Un argument que n’entend pas Patrick Violas. "Je m’adresse à [la préfecture] pour faire remonter que cette loi est injuste et inadaptée. Elle a été votée comme ça mais elle ne va pas au bout, elle ne tient pas compte du cas de chaque entreprise", avance-t-il.
“Les préfets ont la possibilité de durcir les choses, de mettre des couvre-feux, etc. Ils devraient aussi avoir la possibilité de mettre des jauges s’il n’y a pas de danger”, poursuit-il, assurant qu'il n'y en a aucun au zoo-refuge “complètement en plein air”. Dans une autre vidéo YouTube, il précise sa demande :
On est sur 20 hectares, on demande une jauge à 30 ou 40 m2 par personne à l’extérieur. Elle est de 8 m2 en intérieur. Si on donne cette jauge, cela sauve des dizaines et des centaines de parcs, cela sauve la saison de plein de gens, cela sauve des millions d’euros que l’Etat n’aura pas à payer, cela sauve des emplois.
En attendant, chacun se dit ouvert au dialogue mais chacun campe sur ses positions. Patrick Violas a par ailleurs pris un avocat spécialisé et attend la décision du Conseil constitutionnel qui doit rendre son avis sur la validité de l’extension du pass sanitaire, le 5 août prochain. Jour où le zoo-refuge pourrait être fermé s'il continue de trangresser la loi.