Comment accélérer l'implantation industrielle? Missionné par Matignon, le député Guillaume Kasbarian dévoile son rapport

Missionné par le Premier ministre, le député Guillaume Kasbarian dévoile ce 23 septembre un rapport sur "l'accélération de l'implantation industrielle". Le gouvernement a confirmé le lancement de cinq mesures recommandées par le document afin d'alléger et de faciliter les implantations d'usines. 

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Dans quel contexte interviennent ces préconisations ? La France est-elle mal en point sur le plan industriel ?


Je ne dirais pas que la France est mal est point. Les créations d'emplois industriels sont en augmentation depuis 2017, donc on crée plus d'emplois industriels que ceux qu'on détruit : c'est une hausse claire, confirmée, qui ne pose pas de question. En revanche, dans le détail, on voit un ralentissement des créations de sites industriels par rapport aux fermetures. Depuis le début de l'année, on en est à une cinquantaine de création de sites industriels, ce qui est un petit peu faible.

Et l'une des causes avancées de ce ralentissement, c'est la complexité et la lenteur des procédures administratives qui permettent de valider les créations d'usines. On n'est donc pas dans une situation qui va mal, puisqu'il y a création d'emploi et croissance, mais généralement les industriels préfèrent étendre des sites existant plutôt que de créer de nouvelles implantations sur de nouveaux terrains. C'est ce qui nous a fait penser qu'il faut faciliter cette installation.

 

 Quelles sont les principales préconisations du rapport ?

Nous avons retenus cinq grands chantiers, surmontés par un "chapeau". Ce chapeau, c'est la sanctuarisation des exigences environnementales. Il ne faut surtout pas revenir sur nos ambitions concernant l'environnement, mais au contraire trouver les solutions pour concilier industrie et exigence environnementales.

Par exemple, la Suède s'est montrée très forte sur les deux plans. C'est la preuve qu'on peut tenir des objectifs écologiques et avoir dans le même temps une administration fluide et efficace. Il ne faut surtout pas opposer les deux !
 



Et de quels chantiers s'agit-il ?

Il s'agit d'abord de sécuriser les porteurs de projets. Pas mal d'industriels ont évoqué le fait qu'ils déposent leur projet, remplissent des procédures administratives, et prennent des mesures pour se conformer à la réglementation, mais pendant ce temps de nouvelles obligations administratives sont créées. L'arrivée "en cours de route" de ces nouvelles règles a un côté très insécurisant pour les entreprises qui souhaitent s'implanter. La première question est donc : comment est-ce qu'on sécurise les porteurs de projets ?

Nous proposons donc une entrée en vigueur différées de ces nouvelles réglementations pour ceux qui ont déjà entamé leurs procédures. Autrement dit, un dossier approuvé serait temporairement "immunisé" à ces changements. L'autre versant de ce chantier, c'est de mesurer et de quantifier les impacts de la réglementation dès le vote, par exemple, de nouvelles lois.

Deuxième chantier : anticiper les procédures en mettant à disposition des sites "clés en main". Là où les implantations se passaient au mieux, c'est sur des territoires où les collectivités avaient mené en amont des études afin de préparer le terrain à l'arrivée d'une entreprise industrielle. L'idée serait de généraliser ces bonnes pratiques afin que les élus puissent déterminer en amont de possibles terrains industriels, où tout a déjà été "pré-examiné". Quand l'usine arrive, il ne lui faudrait alors que six mois pour obtenir les autorisations, et la démarche de l'industriel est considérablement facilitée.

Cela permettra aussi de préserver l'environnement en orientant les industriels vers des zones dédiées. Ainsi les collectivités préservent leurs terrains sensibles, et l'industriel gagne du temps : c'est gagnant-gagnant !
 

On pourrait très bien imaginer une plateforme numérique, qui exprimerait là où on en est dans la procédure, et qui fournirait en même temps des outils et des mécanismes d'alerte pour prévenir l'administration si quelque chose ne va pas.


Un troisième volet de mesures consisterait à fluidifier l'expérience des industriels via des outils numérique. A l'heure actuelle les démarches administratives ne sont pas unifiées. Il faudrait proposer un parcours congloméré de ces démarches, une sorte de guide pour orienter l'industriel. On pourrait très bien imaginer une plateforme numérique, qui exprimerait là où on en est dans la procédure, et qui fournirait en même temps des outils et des mécanismes d'alerte pour prévenir l'administration si quelque chose ne va pas. A cela on pourrait encore ajouter une démarche qualité, voire des enquêtes de satisfaction, pour affiner le retour d'expérience des entreprises.

Pour rassurer davantage les industriels, il faudrait également promouvoir une culture de l'accompagnement dans les démarches administratives, y compris en cas de changement de la réglementation.

Le quatrième chantier consiste à accélérer les délais au cas par cas, en donnant un pouvoir dérogatoire plus important aux préfets. Cela concernerait surtout des projets avec peu de risques, contre lesquels aucun recours particulier ne serait envisagé. Dans ces cas-là, nous préconisons de donner la possibilité d'une simple consultation numérique plutôt qu'un référendum local. Cela pourrait faire gagner facilement trois semaines, et dans certains cas on pourra grandement accélérer les choses en se servant de ce pouvoir de dérogation, qui autorise les préfets à adapter la réglementation à une situation locale.
 

Enfin, notre cinquième et dernier point consiste à piloter ces implantations. Autrement dit, à coordonner les élus, mais aussi les services archéologiques et environnementaux pour optimiser les démarches de l'industriels. En réalité, cela a déjà été fait : certains projets avec de gros investissements ont bénéficié d'un pilotage centralisé de l'administration. Il faut généraliser ce pilotage, à l'échelon préfectoral, afin de coordonner les différents services. Cela existe déjà, mais ce n'est pas encore systématisé.

En résumé donc, il faut sécuriser, anticiper, fluidifier, accélérer et piloter
 

Certaines industries vont-elles être privilégiées par rapport à d'autres ? Chartres a failli accueillir la plateforme logistique d'un géant du web...

Non. Cela a été fait dans le passé, par exemple pour l'éolien, mais nous ne nous sommes pas lancé dans une réglementation sectorielle. Toute industrie, quelle que soit sa taille, son origine, son secteur d'activités, est concernée par ce rapport. Et concernant la deuxième partie de votre question, je n'ai pas utilisé le rapport pour faire de la politique locale : il n'y a pas de sujet là-dessus.

 

 Quelles retombées sont espérées, notamment en termes d'emploi ?


Il faut savoir qu'à l'heure actuelle la France est classée 107e sur 140 pays en terme de fardeau administratif pesant sur les industriels ! Encourager l'implantation d'entreprise, c'est aussi dynamiser l'emploi. Même si l'effet positif nécessaire n'est pas directement quantifiable, nous recommandons des actions concrètes. On pourrait dans certains cas diviser par deux la procédure qui pèse sur les implantations d'usines.

Par exemple, l'une des entreprises nous a raconté avoir mené une étude sur la population de chauve-souris, comme la réglementation l'y oblige. Sauf qu'on lui fait remarquer que son étude a été réalisé à 21h au lieu de 22h, et qu'elle doit recommencer... au mois d'avril de l'année suivante ! Avec un meilleur accompagnement, cette usine n'aurait pas perdu un an en démarches !

Donc l'effet attendu serait de gagner significativement dans le classement, de donner à la France une image forte et attractive et donc de faciliter les implantations sur le territoire. Cela dit il faut rester prudent, car ce fardeau administratif est loin d'être le seul paramètre à prendre en compte. D'autres variables entrent en ligne de mire, notamment la politique économique dans son ensemble.
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