Le fameux trophée, soulevé chaque année par l'équipe championne de Top 14 de rugby, a été créé par Charles Brennus, un graveur ciseleur qui est né et a grandi à Châteaudun.
À première vue, difficile de trouver un point commun entre le bouclier de Brennus et la ville de Châteaudun. Il faut admettre que la sous-préfecture d'Eure-et-Loir est plus connue pour son château que pour sa tradition de l'ovalie.
Et pourtant, il existe bel et bien un lien entre Châteaudun et le trophée qui récompense le champion de France de rugby chaque saison. Ce lien, c'est Brennus Ambiorix Crosnier.
Celui qu'on appelle communément Charles Brennus est né à Châteaudun en 1859 d'un père tailleur d'habits et d'une mère couturière. Très jeune, il s'intéresse à la gravure et en fait son métier.
Il part s'installer à Paris et ouvre un atelier de graveur ciseleur dans le 3ᵉ arrondissement. Charles Brennus se spécialise notamment dans la fabrication d'insignes artistiques et surtout sportifs.
Fondateur du championnat de France
Car le sport est l'une de ses grandes passions. Il pratique le cyclisme, le cross-country, l'athlétisme, mais c'est le rugby qui le passionne le plus. Ce sport importé par les Anglais en est encore à ses balbutiements en France.
"Il croyait en ses valeurs éducatives, à la richesse de ce sport", affirme Michel Merckel, historien du sport. En 1892, son destin bascule définitivement. Il s'associe avec le baron Pierre de Coubertin, futur créateur des Jeux olympiques modernes. Tous les deux créent un championnat de France de rugby "pour l'ancrer dans la culture sportive française".
Pour marquer le coup, tous les deux décident de créer un trophée. Pierre de Coubertin se charge de le dessiner, Charles Brennus de le fabriquer : le bouclier de Brennus est né. Il sera remporté pour la toute première fois par le Racing Club de France face au Stade Français.
"Sauveur" du rugby français
Mais l'histoire entre Charles Brennus et le rugby ne s'arrête pas là. En 1914, la Première Guerre mondiale débute, beaucoup de jeunes rugbymen des plus grands clubs et de l'équipe de France meurent au combat. Le rugby français est proche de disparaître.
Inquiet, Charles Brennus a l'idée en 1916 de rencontrer le général William Birdwood, commandant de l’armée de Nouvelle-Zélande, alliée de la France. Il lui propose de monter une équipe composée de soldats néo-zélandais pour une tournée dans tout l’Hexagone. L'objectif est de promouvoir le rugby auprès des plus jeunes, ceux qui n'ont pas encore l'âge d'être appelés sur le front.
Déjà à l’époque, les All Blacks sont considérés comme une grande nation du rugby et cette tournée d'une quinzaine de matchs est un véritable succès.
Ils vont susciter une telle passion et un tel engouement que les clubs vont de nouveau se remplir de jeunes devenus admirateurs des All Blacks et qui veulent jouer comme eux. Ça va sauver le rugby français.
Michel Merckel, historien du sport
Par la suite, Charles Brennus participera à la fondation de la Fédération française de rugby en 1920. Il y occupera la place de président d'honneur.
Quelques années plus tard, il se retirera du monde sportif et ira s'installer au Mans où il mourra en 1943.