Un projet de quatre éoliennes est en attente de validation par la préfecture, à 15 kilomètres du château d'Amboise. Les détracteurs du projet estime que le parc se situerait trop près du Val de Loire, classé au patrimoine mondial de l'Unesco.
Quatre éoliennes, scintillantes la nuit, leurs pales blanches se découpant nettement sur le fond du ciel bleu le jour. Voilà la vision que pourraient bientôt avoir, face à eux, les visiteurs du château d'Amboise, en Indre-et-Loire. Depuis la terrasse du château, "nous verrons émerger au-dessus de la cime des arbres 120 mètres de pales avec des clignotants", redoute le directeur du château, Marc Métay.
Le projet en question est notamment porté par la commune d'Auzouer-en-Touraine, qui met en avant de potentielles recettes financières : 16 000 euros pour elle, et 65 000 pour les communes environnantes, assure-t-elle auprès de France 3. Les quatre éoliennes, aux mâts de 87 mètres de haut et aux pales d'une envergure de 110 mètres, devraient être implantées dans une zone agricole, à la lisière de la nationale 10, de l'autoroute A10 et de la ligne à grande vitesse. Le tout à 15 km (14,8 km, pour être précis) de la terrasse du château d'Amboise, situé dans le site du Val de Loire, classé patrimoine mondial de l'Unesco.
Visibles depuis le site Unesco
Marc Métay s'inquiète de "la remise en question d'un principe : ne pas réaliser d'aménagement qui ait un impact de visibilité avec la Loire à moins de 15 km". Ce principe a été fixé sur papier par le plan de gestion du site Unesco du Val de Loire, établi en 2012 par les services de l'État, des régions Centre-Val de Loire et Pays de la Loire, des départements concernés et de l'Unesco. Il y est proposé notamment de "ne pas implanter d’éoliennes visibles depuis le Val, et notamment pas à moins de 15 km du rebord du Val".
Ce qui, a priori, n'a rien de coercitif. De même, le schéma éolien développé par la région recommande de traiter "avec la plus grande attention" la "visibilité des éoliennes" qui seront implantées dans la zone "Gâtines au sud du Loir", où se trouve Auzouer-en-Touraine. L'implantation de tels équipements y est cependant autorisée par le document. Quant à la "zone tampon" du Val de Loire, située autour du site Unesco et qui y proscrit des aménagements trop visibles notamment, elle ne s'étend pas jusqu'au site choisi à Auzouer.
Sur la grande terrasse du château, quelques visiteurs s'inquiètent. "Des éoliennes, en plein milieu des châteaux de la Loire, ce n'est pas très souhaitable", lance l'un d'eux. Une autre estime que, malgré tout, "il faut penser aux générations suivantes" en misant sur les énergies renouvelables. Mais qu'il faudrait "trouver un compromis", en installant les éoliennes "un peu plus loin".
Grandes comme un "Tic-Tac"
À noter que, pour un observateur sur la terrasse, une éolienne vue à 15 km aurait la même taille qu'un "Tic-Tac" tenu à un mètre. "Je ne sais pas si on les verrait beaucoup...", tempère une jeune femme, venue visiter le château d'Amboise ce dimanche. D'ailleurs, "on le voit, il y a déjà pas mal d'installations urbaines qui enlaidissent un petit peu le paysage", estime-t-elle. Et puis, "pour nous, les jeunes, l'écologie, c'est important. J'ai des éoliennes à côté de chez moi et ça ne me dérange pas forcément".
Marc Métay l'assure : "Il ne s'agit pas de remettre en question la politique actuelle de transition écologique." Mais d'empêcher un précédent. "Jamais un projet ne s'était présenté à moins de 15 km, soutient-il. Il s'agit de faire sauter ce taquet de 15 km, donc après il n'y aura plus de limite." Selon lui, c'est "l'ensemble du cadre de vie de nos concitoyens" et "la qualité paysagère qui fait l'essence de notre image de marque à l'étranger" qui pourraient en être "bouleversés".
Élu écologiste au conseil départemental d'Indre-et-Loire, François Lafourcade est favorable au projet. "On est un des rares départements de France à n'avoir aucune éolienne", regrette-t-il. Pour lui, "dans une perspective de 100% d'énergies renouvelables (ENR) en 2050, il faut prendre en compte l'ensemble des ENR, dont l'éolien". Il note que "les gens ne sont pas vraiment contre les éoliennes, mais sont plutôt à dire : "pas chez moi'". Sauf que, pour développer l'éolien, "tous les territoires doivent jouer le jeu", considère-t-il.
Récemment, une commission départementale a voté contre le projet, un avis seulement consultatif. La décision d'autorisation finale, attendue pour la fin d'année, reviendra au préfet d'Indre-et-Loire. Sur X (ex-Twitter), le "monsieur patrimoine" d'Emmanuel Macron, Stéphane Bern, connu pour ses positions anti-éoliennes, a pris la parole pour rappeler le "cône de visibilité" du projet depuis les sites Unesco du Val de Loire. Auprès de France Bleu Touraine, il a promis qu'il évoquerait le sujet avec le président de la République.