Pédophilie : le chirurgien soupçonné de plus de 200 agressions a exercé à Loches

Le journal La Charente Libre a révélé le 19 août ce qui pourrait être l'un des plus vastes scandales pédophiles de France. Le chirurgien, mis en examen en mars, avait exercé à Loches, période durant laquelle il aurait agressé au moins trois enfants. 

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"Je ne l’ai connu qu’une année, et nous ne travaillions pas aux mêmes horaires. Il n’avait pas de réputation particulière par rapport au sujet délicat dont nous parlons, même pas une réputation de dragueur ou de coureur de jupons. Je me souviens de son nom, c’est tout", raconte brièvement un ancien collègue. 
 

"Près de 200 noms d'enfants" 


Joël Le Scouarnec, chirurgien maintenant âgé de 68 ans, a été mis en accusation le 25 mars 2019 par un juge d'instruction de la Rochelle. Il est soupçonné, selon le communiqué diffusé par le procureur de la République, de : 

- "viol sur mineur par personne ayant autorité"
"viol sur mineur de 15 ans"
"agression sexuelle par une personne abusant de l'autorité conférée par ses fonctions"
- "agression sexuelle incestueuse sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité" 
- "exhibition sexuelle" 
- "consultation et diffusion d'image d'un mineur à caractère pornographique

L'affaire a été révélée le 19 août par La Charente Libre, qui détaille les pratiques particulièrement sordides du Dr Le Scouarnec, spécialisé en chirurgie viscérale. Il consignait en effet dans des carnets des scénarios d'agressions sexuelles et de viols, dont on ne peut encore démêler la part d'agressions ayant réellement eu lieu et la part de fantasmes abjects. "À l’intérieur de ces sordides journaux intimes tenus depuis les années 90, les enquêteurs ont retrouvé près de 200 noms d’enfants", précise le journal. 
 

Trois victimes à Loches


"Les investigations se poursuivent (...) pour identifier et entendre des éventuelles victimes", précise le procureur de la Rochelle. A ce stade, la mise en examen concerne des faits non-prescrits commis sur 4 mineurs, entre 1989 et 2017. L'enquête a été déclenchée il y a deux ans par les confessions d'une fillette de 6 ans, dont les parents habitaient la maison voisine de Joël Le Scouarnec, en Charente-Maritime. Selon les faits recueillis par la police, l'homme se serait sexuellement exhibé devant l'enfant, avant de lui imposer une pénétration digitale. 

Les trois autres victimes, deux de ses nièces et une petite patiente, ont vraisemblablement été agressées dans les années 1980 à 90. Joël Le Scouarnec exerçait alors à Loches, entre l'hôpital public et la clinique La Fontaine, depuis fermée, une information confirmée par un membre de l'établissement. Contacté, l'hôpital a fait savoir via son service communication que sa direction ne souhaitait pas s'exprimer. "L'hôpital de Loches découvre l'affaire seulement maintenant" affirme de son côté France Bleu Touraine

 

De nouvelles plaintes déposées en juin et en août

L'enquête a ainsi permis de retrouver des victimes potentielles, aujourd'hui adultes, dont certaines ont déposé plainte ces derniers mois. "Elles se souviennent parfaitement
de ce qu'elles ont subi et n'en ont jamais parlé parce qu'elles ont eu peur. Elles racontent ce qui est mentionné dans le carnet
", a indiqué à l'AFP Me Francesca Satta, qui défend des victimes du procès charentais prévu en 2020.

"De nouveaux dépôts de plaintes ont eu lieu en juin et d'autres il y a à peine une semaine. J'ai été contactée par certaines familles, des victimes du nord de la France", a poursuivi l'avocate, qui dit ne pas connaître le nombre total de plaintes déposées. "En plus de Loches (Indre-et-Loire), Vannes (Morbihan), des victimes commencent à remonter dans les hôpitaux où il est passé"

L'avocat du chirurgien n'a pu être joint par l'AFP. L'association de défense de l'enfance, La Voix de l'Enfant, a annoncé qu'elle se constituerait partie civile pour le procès de 2020. Notamment pour demander si le chirurgien, déjà condamné en 2005 à Vannes pour détention d'images pédopornographiques, "avait fait l'objet d'une injonction de soin, comme nous le réclamons systématiquement dans de tels cas", a déclaré à l'AFP sa présidente Martine Brousse.

 

Déjà condamné, jamais écarté : l'Ordre des Médecins pointé du doigt


Autre insitution sous le feu des projecteurs : le Conseil national de l'Ordre des médecins, et son antenne départementale du Finistère, en Bretagne. En effet, c'est dans ce département que Joël Le Scouarnec exerçait lorsqu'il a été condamné en 2005 à seulement quatre mois de prison avec sursis pour détention d'images pédopornographiques.

Singulièrement léger, le jugement ne lui avait adjoint aucune obligation de soins, et aucune interdiction d'approcher des mineurs. Il reste difficile d'expliquer comment le praticien a pu continuer ses activités auprès d'enfants jusqu'en 2017, sans que jamais le Conseil de l'Ordre ne cherche à le déloger. Le parquet est pourtant en devoir d'informer l'institution pour toute condamnation pénale d'un praticien. Contacté, le conseil départemental botte en touche : le Conseil National devrait diffuser ce soir un communiqué de presse. "Je ne vais pas vous apprendre comment ça marche. L’ordre des médecins se protège, jusqu’au moment où il ne peut plus", ironise un salarié de l'hôpital de Loches.

Les victimes de son passage à Loches, quant à elles, n'ont pas encore d'avocat connu. Réunies avec d'autres potentielles victimes dans un groupe Facebook de soutien, celles-ci ont indiqué aux journalistes : "veuillez ne pas nous contacter ou harceler, c'est déjà assez dur". Une décision que nous avons bien sûr choisi de respecter. Placé en détention provisoire dès mai 2017, Joël Le Scouarnec aurait fait appel à un psychologue. Son procès aura lieu entre fin 2019 et début 2020

 
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