Après les propos d'Hugo Lloris sur le non-port du brassard arc-en-ciel, d'autres nations ont renoncé à soutenir la lutte contre les discriminations des personnes LGBT. En France, des militants des droits humains regrettent cette reculade.
Le brassard "One Love" devait symboliser l'engagement des sportifs contre l'homophobie et les LGBTphobies. Il restera comme le symbole d'une occasion ratée. Après la France, sept pays ont refusé par de porter ce brassard lors du Mondial au Qatar, un pays où l'homosexualité est passible d'une peine de prison, voire de la peine de mort.
Le 14 novembre, l'équipe de France par la voix de son capitaine Hugo Lloris avait annoncé qu'elle ferait l'impasse sur le brassard "One Love". "Mon opinion personnelle rejoint celle du président" de la FFF avait affirmé Hugo Lloris lors d'une interview. "Lorsqu'on accueille des étrangers, on a le souhait qu'ils se plient à notre culture, et j'en ferais de même."
"J'ai honte pour mon pays"
Une décision qui n'a pas manqué d'indigner, notamment parmi celles et ceux qui luttent pour les droits des personnes LGBT dans le sport. "J'ai honte pour notre pays", a réagi Yoann Lemaire, président de l'association Foot Ensemble. Dans une interview donnée à SoFoot, il a estimé que "porter un brassard, ce n'est pas grand-chose, même les États-Unis vont le faire, et il faut bien s'engager de temps en temps, même avec modération".
On peut penser que le pays champion du monde et des droits de l'homme montre qu'il n'accepte pas que l'on mette des gens à la marge dans la société, sans pour autant mettre le bazar
Yoann Lemaire, président de Foot Ensemble
Pour sa part, Michel Navion, délégué de SOS Homophobie dans la région Centre-Val de Loire, ne s'étonne pas. "Je ne suis pas surpris par les propos d'Hugo Lloris", déplore-t-il, "c'est exactement le même message que l'on nous transmet lorsqu'on intervient dans des centres de formation de football." Pour le militant, le président de la Fédération Française de Football (FFF), Noël Le Graet "n'est pas un personnage connu pour ses positions très homophiles".
Michel Navion se montre plus évasif sur le fait de profiter d'une compétition internationale pour manifester et prendre position sur ces sujets. "Nous ne sommes pas dans le cadre d'une lutte pour les droits de l'homme classique. La position de mon association est mitigée." Avant de poursuivre : "que dirait-on si une équipe étrangère, qui, par exemple participerait aux Jeux Olympiques de Paris en 2024, venait manifester d'une manière quelconque des convictions totalement contraires à nos valeurs ?"
"Le football est un milieu extrêmement homophobe"
À l'occasion de la Coupe du monde au Qatar, Michel Navion aurait souhaité une prise de position bien plus importante des joueurs de l'équipe de France. "Ce que j'aurai pu souhaiter, c'est que l'équipe de France n'aille pas au Qatar ! Les joueurs sont des grands garçons et certains auraient pu dire : 'je ne participe pas'. Ça aurait pu être une position correcte."
A la veille de son entrée en lice de la compétition, les joueurs de Didier Deschamps ne devraient montrer aucun signe de contestation au sujet des droits humains au Qatar. "Y aller et manifester, je ne suis pas sûr que ce serait une bonne chose, d'autant que c'est une manière un peu hypocrite puisque le football est un milieu extrêmement homophobe" lâche le président de SOS Homophobie Centre-Val de Loire.
"Je n'ai jamais vu un autre joueur français qu'Antoine Griezmann apporter son soutien s'il avait un joueur homosexuel dans son équipe". Interrogés sur le port ou non du brassard "One Love", la position de Michel Navion est plus mesurée : "Ce serait très bien que les joueurs le portent... Je comprends aussi que certains puissent être gênés qu'on les force à prendre position sur ce sujet."
La FIFA contre le port du brassard arc-en-ciel
Suite à la décision française, l'Angleterre, le Pays de Galles, les Pays-Bas, le Danemark, la Belgique, l'Allemagne et la Suisse ont publié un communiqué commun pour annoncer leur renoncement à porter le brassard "One Love". Les nations se sont rétractées à cause des pressions de la FIFA, qui menaçait de sanctionner le port de ce brassard.
"La FIFA a été très claire", indiquent les sept pays. "Elle imposera des sanctions sportives si nos capitaines portent les brassards sur le terrain de jeu. En tant que fédérations nationales, nous ne pouvons pas mettre nos joueurs dans une position où ils pourraient faire face à des sanctions sportives, y compris des exclusions."
Sans brassard arc-en-ciel, les joueurs anglais ont tout de même posé leur genou à terre pour dénoncer "toutes les discriminations" au début du match Angleterre-Iran de ce 21 novembre 2022.