Homophobie dans le sport : le match est loin d'être gagné

Malgré les efforts consentis par les structures sportives et les associations LGBT, le monde du sport, et particulièrement du sport collectif, reste hostile aux personnes homosexuelles. Dans le milieu du football, les progrès arrivent à tout petit pas.

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"Je ne pourrais pas jouer avec un capitaine homosexuel.Ces mots, Michel Navion les a entendus dans la bouche d'un jeune joueur de foot en formation à Châteauroux. Responsable centre-ouest pour SOS Homophobie, il intervient régulièrement auprès de jeunes. Mais dans le domaine du sport, et du football en particulier, l'homosexualité reste un tabou.

Un changement qui se fait attendre

"Il y a une évolution très nette des mentalités dans les collèges et les lycées" constate le militant. "Mais je ne retrouve pas la même chose dans les centres de formation de foot".

Depuis le début de l'année, il est intervenu à Tours et à Châteauroux, auprès de jeunes footballeurs. Un public où la dynamique de groupe et les vieux clichés sur la virilité pèsent lourd. "Dans cette ambiance, un jeune qui a des tendances homo a tout intérêt à hurler avec les loups !"

Une ambiance due au manque d'éducation de ces jeunes, dont certains viennent parfois de milieux difficiles. "Les homophobes sont rarement des gens fondamentalement méchants", explique Michel Navion. "Mais ils ne comprennent pas que deux mecs puissent s'aimer".

Le militant attribue aussi cette atmosphère à l'emprise des traditions, notamment religieuses. Il mentionne une interprétation rigoriste de l'islam, mais aussi l'ascension sur les réseaux d'intégristes évangéliques, comme ceux qui ont permis la victoire du réactionnaire Jair Bolsonaro au Brésil.

"C'est vrai qu'on n'en parle pas trop", constate Olivier*. Lycéen à Orléans, il fait du basket en club. Malgré son engagement militant contre l'homophobie au sein de son établissement, il admet que le sujet n'est jamais évoqué sur le terrain. Comme si les vestiaires et les douches formaient une barrière infranchissable. Comme si, idéalement, le sport était un lieu où les couleurs de peau, les orientations sexuelles n'existaient plus et laissaient la place aux seuls joueurs et à leur art.

 

"Paris, vous êtes des pédés"

Pourtant, l'idéal a du plomb dans l'aile. Si le racisme a largement reculé, des actes intolérables ont encore lieu à l'encontre de joueurs de toutes origines. Quant à l'homophobie, elle reste tristement banale.

Le footballeur Patrice Evra a ainsi été visé par une enquête après des propos tenus en marge du match PSG-Manchester United. "Paris vous êtes des pédés... ici c'est les vrais hommes qui parlent !", éructe l'ancien capitaine de l'équipe de France dans une vidéo.

Une atmosphère d'homophobie latente et constante, cristallisée par les insultes "pédé", "tapette". Des mots associés à un folklore, mais qui peuvent se révéler blessants. Très peu de sportifs et, a fortiori, de footballeurs professionnels ou amateurs ont osé dévoiler leur homosexualité en France. Parmi eux, Yoann Lemaire, l'un des premiers à avoir fait son coming-out, a réalisé le documentaire Footballeur et homo, au cœur du tabou, diffusé sur France 2 ce mardi 14 mai.

De son côté, la ligue Centre-Val de Loire de football, l'organe régional de la FFF, insiste sur le travail d'éducation et de prévention réalisé. Antonio Teixeira, le président de la ligue, affirme avoir fait de la lutte contre les maltraitances au sens large une de ses priorités. "Nous devons protéger nos licenciés", explique-t-il au téléphone.


"Le football doit servir à franchir toutes les barrières".


S'il estime que l'homophobie est une thématique insuffisamment abordée dans les collèges et les lycées, elle a vocation, comme le racisme, à "être bannie de notre sport".

 

"Le football appartient à tous"

Malgré tout, les mentalités changent, lentement. En 2017, des footballeurs parmi lesquels Paul Pogba s'étaient engagé avec l'UEFA contre l'homophobie. "Le football appartient à tous", déclarait alors le milieu de Manchester. "Je pense que le football peut contribuer à réunir les communautés et à montrer que nous sommes tous égaux, sur le terrain et en dehors."

Dans le documentaire de Yoann Lemaire, c'est Antoine Griezmann, l'homme de la finale de la Coupe du monde, qui monte au crénau. Si l'un de ses coéquipiers devait faire son coming-out, "je l’encouragerais à être fier, à continuer à être heureux", lâche l'attaquant.

Des paroles qui coulent de source, mais qui sont pourtant rares. Sur la planète football, le match contre l'homophobie est encore loin d'être gagné.


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