Ce jeudi après-midi, Salem, 19 ans, comparaissait devant le Tribunal correctionnel de Tours pour trois chefs de prévention, sept mois après la dédicace d'Eric Zemmour à Montlouis-sur-Loire. Il était accusé de "menaces de mort", "violences aggravées" et "violences sur personne dépositaire de l'autorité publique". Le jeune homme faisait partie de la cinquantaine de manifestants opposés à la venue du fondateur du parti d'extrême droite "Reconquête".
C'est dans une salle comble, entouré d'une cinquantaine de personnes venues le soutenir que Salem, 19 ans, a comparu devant le tribunal correctionnel de Tours ce jeudi après-midi. Il comparaissait pour trois chefs de prévention. Le premier : "Menaces de mort" sur la personne d'Eric Zemmour venue dédicacée son livre dans le restaurant "La Cave" à Montlouis-sur-Loire, le 18 avril 2023. Ce jour-là, une cinquantaine de manifestants masqués ou cagoulés se sont rassemblés devant le restaurant scandant des slogans comme " Zemmour fumier, on va te fumer " ou encore " Zemmour au fond de la Loire ".
À la barre, Salem nie avoir proféré des menaces de mort : " Je n'ai pas lancé ce slogan, mais je l'ai entendu autour moi". Et son avocat, Colin Verguet, d'appuyer : " Aucun élément de l'exploitation de la vidéosurveillance ne le montre clairement répéter ce slogan, encore moins plusieurs fois puisqu'il est nécessaire que les menaces soient réitérées pour être condamné. "
Eric Zemmour n'était pas présent à l'audience ce jeudi. Il demandait 2 500 euros de dommages et intérêts. Mais le Tribunal après en avoir délibéré a relaxé le jeune homme pour ce chef de prévention.
Condamné pour violences à des travaux d'intérêt général et à verser 2000 euros
Pendant cette manifestation contre la venue d'Eric Zemmour à Montlouis-sur-Loire, des manifestants ont été filmés en train de jeter du fumier et des excréments sur les hommes chargés de la sécurité dont Albéric Dumont, prestataire de service, qui se trouve être aussi le vice-président de la Manif pour tous. Ce dernier était présent ce jeudi en tant que partie civile au tribunal correctionnel de Tours. " Il y a eu une pluie de projectiles pendant deux heures. On a filmé et je confirme que cette personne en a jeté deux fois sur moi " déclare-t-il à la barre. La présidente lui demande : " Comment pouvez-vous être certain que c'était lui ? " Réponse de la victime : " Il avait une forte corpulence et une cagoule à trois trous. Il était le seul à en avoir une ".
Le jeune prévenu a été identifié par les enquêteurs après la manifestation sur une vidéo alors qu'il enlevait sa cagoule. Il est le seul de la cinquantaine de manifestants à avoir été poursuivi.
L'avocat d'Alberic Dumont, Henri de Beauregard plaide : " C'est normal de vouloir défendre ses idées mais la règle de base c'est que la violence n'a pas sa place et pas plus en politique qu'ailleurs. La violence en politique est une violence tout court surtout lorsqu'elle s'exprime sur un agent de sécurité et sur un gendarme." Il a demandé notamment 1 000 euros de dommages et intérêts pour son client.
Le jeune homme était aussi poursuivi pour violences aggravées sur personne dépositaire de l'autorité publique. Il aurait en effet essuyé ses gants pleins de fumier sur un gendarme chargé de sécuriser l'évènement. Le gendarme, absent à l'audience, a demandé un euro symbolique de dommages et intérêts. "Pour le gendarme, je m'excuse et je regrette ce geste. Ce n'était pas dans un but anti-police ou anti-gendarmerie. Je me suis essuyé les gants sur lui. Je n'aurais pas dû. Je regrette le geste envers le gendarme mais pas contre Monsieur Dumont ", déclare le prévenu à la barre.
Une peine juste selon la défense et un message politique transmis
Auxiliaire de vie auprès de personnes en situation de handicap, le jeune prévenu comparaissait avec un casier judiciaire vierge. Pour lui, il était important que ce procès soit aussi politique. Son avocat a d'ailleurs commencé sa plaidoirie en citant les propos d'Eric Zemmour. " Quand on est un jeune comme mon client racisé et qu'on est touché par chacune des déclarations homophobes et racistes d'Eric Zemmour, on se dit qu'il faut sortir de la légalité pour se faire entendre. Si on peut lui reprocher ses actes, on ne peut empêcher que la haine d'une personne entraîne la colère de tant d'autres. "
Le Parquet représenté par Pierre Gérard a requis 140 h de travail d'intérêt général : "On n'est pas dans un délit d'idée, on est dans un cas de délit d'atteinte à la personne et de trouble à l'ordre public. Cela ne peut pas être justifié par la liberté d'expression. Je ne crois pas qu'il puisse être considéré comme un meneur mais il est allé au-delà de ce qui est tolérable. "
Après deux heures d'audience, le tribunal a condamné le manifestant à 105 heures de travail d'intérêt général à réaliser dans les 18 mois ainsi qu'à 500 euros de dommages et intérêts et 2 000 euros d'amende.
"Je suis soulagé de la peine. J'ai un très bon avocat qui m'a bien aidé. Il a bien mis en avant les valeurs que je défends," confie-t-il après l'annonce du jugement. Son avocat, Maître Colin Verguet complète : " C'est une peine juste. On a obtenu la relaxe qu'on demandait pour les menaces de mort. Et une condamnation justifiée pour les violences. Il n'y aura vraisemblablement pas d'appel. "