Football : carton rouge aux violences contre les arbitres

Marqués par les deux récentes agressions les 22 octobre et 12 novembre, les incidents envers les arbitres de football se multiplient. Baisse de 20% d'arbitres licenciés en région Centre entre la fin de la saison dernière et le début de la saison 2022-2023.

La ligue du Centre-Val de Loire a décidé d'agir. Toutes les rencontres du week-end du 26 et 27 novembre ont été reportées. Via un nouveau communiqué de la ligue ce 22 novembre, le championnat de National 3, non prévu dans le mouvement au départ, a aussi vu toutes ses rencontres reportées.

En cause : les violences dans le football, ne font qu'augmenter, en particulier contre les arbitres. En moins d'un mois, dans la seule région Centre-Val de Loire, deux arbitres ont été agressés lors de deux rencontres différentes, les 22 octobre et 12 novembre.

Younes Mouarraf, arbitre du match entre Le Blanc et Fussy en Régional 2 le 12 novembre a violemment été frappé de deux coups au visage suite à sa décision d'expulser un joueur. La rencontre a été interrompue et il a été transporté à l'hôpital. "Je suis là pour arbitrer et passer des bons moments avec les tous les acteurs", témoigne-t-il au micro de France 3. "C'est une passion, je ne veux pas mettre en danger ma famille et moi même".

"On a perdu quasiment 20% de nos arbitres"

"La sensibilisation à l'arbitrage est faite dans les jeunes catégories. Il va falloir le faire en séniors parce que les joueurs ne comprennent pas les règles ni le respect de l'arbitre" a pour sa part déploré Antonio Teixeira, le président de la ligue du Centre-Val de Loire, sur France 3. 

Depuis plusieurs saisons, de moins en moins de volontaires tentent l'aventure du corps arbitral. Ainsi, entre la fin de la saison 2021-2022 et le début de la saison 2022-2023, "on a perdu quasiment 20% de nos arbitres en ligue du Centre", selon Laurent Czwojdzinski, président de l'Union Nationale des Arbitres Français (UNAF) en Loir-et-Cher et membre du comité directeur national de l'UNAF.

Les incidents du genre ne font qu'augmenter, et les carrières d'arbitres s'écourtent. Laurent Czwojdzinski appelle à une remise en question de tous les acteurs du football y compris de l'institution. Le report des matchs du week-end des 26 et 27 novembre ne changent rien pour le corps arbitral : "Ce report ne résout pas le problème, on le déplace simplement. À aucun moment, il y a une action et un impact lié à la fonction de l'arbitre".

Annuler une journée de championnat, un signe fort ?

Les matchs reportés le sont au week-end suivant. "Il fallait peut-être pousser un peu plus loin, c'est à dire annuler complètement cette journée, tant pis pour les clubs", réagit Raphael Blin, le président de l'UNAF 36, dans l'Indre. Néanmoins, il évoque une bonne action de la part de la ligue : "ça fait 35 ans que je suis dans le monde du football, c'est la première fois qu'ils prennent une décision comme celle-ci. Elle est bien mais je ne pense pas que ça fera avancer les choses". 

Raphael Blin s'interroge sur cette décision qui, certes, marque un ras-le-bol général mais peut aussi être influencée par la crainte de la Ligue de voir l'UNAF entamer un mouvement de grève. Comment se dérouleraient les rencontres sans arbitres ?

Une grève avait eu lieu il y a trois ans dans le Loir-et-Cher, rappelle Laurent Czwojdzinski. "D'un commun accord avec le district du Loir-et-Cher, nous avions établi une journée complète sans arbitres. Le but étant de mettre des bénévoles, dirigeants de clubs à la place de l'arbitre".

"Faire prendre conscience que le rôle de l'arbitre est très compliqué et que ce n'est pas donné à tout le monde. Pour pouvoir respecter une personne, il faut déjà comprendre comment ça fonctionne."

Laurent Czwojdzinski, membre du comité directeur national de l'UNAF

Il poursuit sur le rôle de l'arbitre, tant décrié par les spectateurs que par les joueurs. "Il faut vivre le rôle d'un arbitre pour que les gens comprennent et ressentent le rôle de l'arbitre." Le retour était globalement positif. Les clubs avaient été mis face à leurs responsabilités. 

Le Covid, un tournant ?

"Il n'y a pas eu plus d'agressions physiques qu'en temps normal sur le plan national" depuis la saison blanche du covid, note Laurent Czwojdzinski. En revanche, il y a une énorme augmentation des incivilités. Insultes, menaces, violences entre les joueurs ne cessent d'augmenter.

Autre acteur de ce fléau de violences, les spectateurs. "Malheureusement, l'environnement empire" explique Laurent Czwojdzinski, qui déplore le phénomène des "pseudos-spectateurs". Les acteurs de violences peuvent être des personnes qui ne s'intéressent même pas au match.

"C'est un phénomène que l'on constate de plus en plus sur nos catégories de jeunes arbitres. Lors de compétitions u11, u13, les incivilités ne viennent pas des enfants mais des parents et accompagnateurs". Quelques mouvements de soutien sont apparus, notamment sur les réseaux sociaux. Néanmoins, ces mouvements n'empêchent pas les incivilités, désormais présentes dans toutes les catégories d'âge du football français, des catégories de jeunes aux séniors. 

"Si on n'est pas capable d'éduquer nos petits et malheureusement, nos parents, on arrive à des incivilités comme ça"

Laurent Czwojdzinski, membre du comité directeur national de l'UNAF

Au vu de la forte augmentation de ces incidents, il y a de moins en moins d'arbitres. Auparavant, certains arbitres pouvaient faire des carrières longues d'une vingtaine d'années par plaisir. "Aujourd'hui, c'est une denrée rare. La durée de vie d'un arbitre, si on peut appeler ça comme ça, si c'est 5,6 ans c'est le bout du monde", toujours d'après le président de l'UNAF 41. Être arbitre n'est pas donné à tout le monde.

Des barèmes disciplinaires trop léger

"Quelqu'un qui agresse un arbitre ne devrait plus pouvoir jouer", juge Laurent Czwojdzinsk. Il poursuit "c'est toute une institution qui doit se remettre en cause". Le barème disciplinaire a été durci il y a deux ans, malheureusement il ne suffit pas à stopper ces violences. "Le barème disciplinaire, pour l'arbitrage nous semble trop léger. Les clubs sont incapables de faire le ménage en interne", insiste Laurent Czwojdzinsk. 

Ces évènements ne sont pas seulement localisés dans les plus basses divisions. Les deux derniers incidents en date se sont déroulés lors de rencontres de Régional 2. À long terme, ce climat délétère risque de peser bien lourd sur les vocations des futurs-arbitres potentiels.

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