Pour la deuxième année consécutive, l'association Stop harcèlement de rue a organisé un "village associatif" pour sensibiliser à la cause. Environ 500 personnes étaient attendues dans l'après-midi à Tours.
En "colère", "triste" ou encore "blasée", Marie, 27 ans, décrit un mélange d'émotions lorsqu'elle évoque le harcèlement de rue. Bénévole depuis plus de deux ans dans l'antenne Tourangelle de Stop harcèlement de rue, elle participe au village associatif pour sensibiliser les passants. L'an dernier, environ 500 personnes s'étaient arrêtées pour prendre des informations ou simplement échanger quelques mots.
Planter une graine dans l'esprit des gens
"On espère planter une petite graine" estime-t-elle avec le sourire, sous un barnum blanc et un soleil de plomb "certaines personnes se remettent en question, d'autres pas". Le 13 avril 2024, la place Chateauneuf de Tours accueille la deuxième édition de ce village. Plusieurs associations se sont réunies pour rendre visible la cause.
Voir cette publication sur Instagram
En tête de cortège, Stop harcèlement de rue. Boris en est le trésorier "j'ai travaillé pendant dix ans dans des magasins, j'ai vu des collègues femmes se faire harceler par des clients". Lorsqu'il recueille la parole de celles qui se font suivre jusqu'à chez elles, il est d'abord "horrifié", puis décide de s'engager pour "sensibiliser, éduquer".
"Les gens qui s'arrêtent sont souvent des personnes curieuses, pas forcément des convaincus, ni des réfractaires" résume Romane, bénévole.
Véronique et Olga, mère et fille ont justement fait le déplacement, la seconde ayant vu l'évènement sur les réseaux sociaux. L'occasion d'échanger sur le vécu de deux générations. "C'était un enfer quand j'étais jeune" se souvient Véronique "on nous disait 'oh ça va, c'est pas grand chose'. À part le viol, et encore, fallait s'habiller autrement ..." Le harcèlement de rue devient un sujet, et cette mère de famille s'en réjouit.
Un combat qui continue
Ce qui ne fait pas disparaître l'insécurité pour les personnes considérées comme minorités. La rue n'est pas que sexiste, elle peut aussi être "grossophobe, raciste, homophobe" souligne Romane. Alice a d'abord vécu l'homophobie lorsqu'elle était dans un corps d'homme. Depuis sa transition, elle remarque un changement "c'est davantage des comportements ou remarques sexistes. La main aux fesses quand on attend sa commande au bar par exemple".
Le harcèlement de rue, c'est cette impression de ne pas s'appartenir dans l'espace public. Je deviens un objet à disposition de l'opresseur.
Alice, bénévole pour l'association Stop harcèlement de rue 37
Si les victimes parlent, beaucoup reste à faire. Marilyn Hanoun est à la fois responsable de l'antenne locale et de l'association au niveau national. C'est en Touraine que l'organisation est la plus active.
Notamment avec la mise en place du dispositif "Angela". "Il s'agit de former des établissements, bars ou commerces, à l'accueil et la prise en charge de victimes" détaille Marilyn. Toute personne qui se présente dans un établissement partenaire et demande Angela se voit ainsi mise en sécurité.
Désamorcer le conflit
La ville de Tours en est partenaire, mais l'association garde la main sur l'attribution du Label "nous vérifions donc à qui nous le donnons. Par le recueil de témoignages, mais aussi en allant directement sur place pour savoir si l'endroit est approprié". Un bar qui aurait un patron ou employé défavorablement connu ne sera ainsi pas intégré au dispositif.
Face aux moins convaincus, il faut parfois s'armer de patience et de chiffres. "Ce n'est pas mon avis contre le sien, mais des faits que j'oppose" détaille Romane. Être frontal n'est alors pas constructif. En privé aussi, Olga en a fait l'expérience "mon père ou mes frères avaient parfois l'impression de recevoir des attaques personnelles" lorsqu'elle évoque les questions de harcèlement sexiste et la représentation d'hommes en tant qu'agresseurs. "Avec le fameux 'tous les hommes ne sont pas comme ça' qui est brandi". Au fil des discussions, les discussions se sont apaisées pour cette famille.