C’est d’abord un sourire, celui de Catherine. La dernière kiosquière de Tours, célèbre ses 10 ans de présence à l’entrée des halles. Un lieu stratégique, de passage et de rendez-vous pour tous les tourangeaux. Ce samedi, jour de marché, c’est avec ses clients et sa seconde famille, les commerçants des halles, qu’elle fête cette décennie.
Dix ans déjà, que Catherine Serin tient le kiosque des halles de Tours. 900 titres aujourd’hui, la presse locale et nationale, des magazines, des mots croisés, des jeux et des habitués, des fidèles. Dix ans de belles rencontres, mais aussi des périodes où des évènements qui l’ont marquée. Elle a toujours le sourire, une parole réconfortante ou des petites blagues pour ses habitués.
Le kiosque est devenu un lieu de rendez-vous. Les jours de marché sur le carreau des halles,le mercredi et le samedi matin, impossible de parler à la kiosquière, la file d'attente ne désemplit pas. C'est l'après-midi que les conversations fleurissent "Je suis la gazette, je sais tout sur tout" dit Catherine en riant. Elle a aussi un lien particulier avec les personnes qui fréquentent le kiosque
Je suis une épaule réconfortante, j'ai des petites mamies qui viennent l'après-midi, qui se sentent seules et qui sont contentes de parler avec moi
Catherine Serin kiosquière aux halles de Tours
Même fatiguée ou d'humeur maussade, le sourire est toujours là "C'est ma personnalité, je suis comme ça. Ma vie privée s'arrête à la porte du kiosque, je ne suis pas là pour me lamenter. Je donne beaucoup, mais les gens me donnent beaucoup aussi, j'ai toujours de gentilles attentions, des fleurs, des croissants le matin, un café. Je suis aussi beaucoup soutenue par les commerçants des halles, c'est ma famille maintenant. Sans eux, je ne serais pas restée ici".
D’un kiosque à l’autre
C’est d’abord dans un petit kiosque monté sur roues, le mobikiosque, que Catherine entame son expérience de kiosquière aux halles de Tours en mars 2014. Ancienne commerçante à Joué-lès-Tours, elle découvre son minuscule espace de 10 m² et le monde de la presse.
Je me souviens de mon premier jour comme si c’était hier. Je n’étais pas rassurée. Comme je démarrais la presse, je n’étais pas sûre de moi au niveau du travail. Est-ce que je vais avoir assez de journaux, est-ce que je vais plaire aux clients ?
Catherine Serin - Kiosquière
Des questions qu’elle ne se pose plus aujourd’hui mais le petit kiosque mobile est toujours dans un coin de sa tête. "Mon petit kiosque est à Roland Garros tous les ans. J’en suis fière et je connais les personnes qui l’utilisent et je leur dis tout le temps, vous lui direz bonjour de ma part" ajoute-t-elle en souriant. Six mois après son arrivée, Catherine s’installe dans un nouveau kiosque, définitif, celui-là.
Un kiosque de 4 tonnes,18 m². Plus confortable, moins ouvert aux quatre vents, plus grand, de quoi satisfaire l’appétit de Catherine pour proposer un plus grand nombre de magazines de cuisine... et parler recettes. Présente 6 jours sur 7, sa journée est bien remplie, depuis le déballage des journaux dès 6H jusqu'à la fermeture du kiosque à 18 heures.
Depuis 10 ans, les clients sont fidèles, ils ont tout de suite adopté Catherine, sa bonne humeur et dès les premières heures de la matinée, ils sont là pour acheter "la Nounou", le journal local chaque matin. A 6 h 30, Eliane est une des premières clientes, mais elle revient dans la matinée pour choisir un ou deux magazines et papoter. "Je viens depuis qu’elle est là. Elle est gentille et j’aime bien les petits commerces." Jean a 88 ans, il découvre l’affiche des 10 ans du kiosque et chuchote à Catherine en souriant "Alors ça fait déjà 10 ans que vous me supportez" avant de repartir avec son journal à la main. Un autre est fan de l’éphéméride et du dicton du jour écrit chaque jour par Catherine.
Les évènements marquants de la vie du kiosque
Pendant ces 10 ans, des événements, des bouleversements ont marqué la vie du kiosque.
Le 14 janvier 2015, parait le nouveau numéro de Charlie Hebdo, 7 jours après l'attentat contre le journal satirique. "Ça a vraiment été incroyable dans tous les sens du terme. D'abord, j'ai vendu des milliers de Charlie-Hebdo, les files d'attente incroyables pour acheter ce fameux numéro, des bagarres devant le kiosque parce que des gens voulaient absolument Charlie et je n'en avais pas assez pour tout le monde, donc des choses incroyables quand même."
En 2016, c'est un évènement festif qui réjouit Catherine. Les halles de Tours fêtent leurs 150 ans et la kiosquière participe à la fête "Le dépôt de presse de Tours avait réussi à m'avoir un triporteur et je faisais le tour des halles et l'intérieur avec quelques journaux à vendre et les gens étaient contents de me voir avec mon triporteur, c'était rigolo".
Pendant la période Covid en 2020, le kiosque des halles est resté ouvert :
"Pendant le Covid, j'étais là. J'avais le droit d'ouvrir le kiosque toute la journée mais j'ai pris la décision de n'ouvrir que le matin car je n'étais quand même pas rassurée. On se serait cru pendant une période de guerre. Les gens ne parlaient pas beaucoup, on n'entendait pas de bruit dans la ville, les gens étaient masqués. C'était une ambiance assez spéciale" " Noël 2020, Catherine est fidèle au poste, les guirlandes décorent le kiosque et elle accueille les clients même si le cœur n’y est pas. "Je voulais être là pour eux, par soutien , pour leur dire on est là nous aussi et on ne vous laisse pas tomber "
Catherine nous a confié ne pas vouloir changer de métier, pour rien au monde, mais elle ne se voit pas tenir le kiosque encore pendant 10 ans et pense à une retraite bien méritée ou un aménagement de son temps de travail.
En ce jour d’anniversaire, où de nombreux clients et amis seront là pour fêter les 10 ans du kiosque, c’est aussi les larmes aux yeux, qu’elle pense à François, son mari, disparu en septembre 2019. Une figure bienveillante et joviale des halles de Tours que personne n’a oublié. "Je fête aussi les 10 ans du kiosque en souvenir de François. C'est un peu grâce à lui si je suis là. Il m'a beaucoup aidée, il m'a soutenue et j’espère qu’il serait fier de moi aujourd'hui"