Le gazage de pigeons fait souvent polémique là où on le pratique, notamment à Orléans, Chartres, Vierzon et Tours où l’association de PAZ (Paris animaux Zoopolis) en a dénoncé l’utilisation. Certaines agglomérations se penchent sur des alternatives.
Non défini comme domestique, ni nuisible, le statut du pigeon de ville se trouve dans un vide juridique. S’il est interdit de les nourrir, peu de contraventions sont relevées pour ce type d’infraction. Parfois dans certains quartiers, près des marchés, ou des grands immeubles, ces volatiles pullulent.
Des oiseaux trop nombreux
Leurs déjections, corrosives pour les pierres des bâtiments, sont souvent incriminées, avec un coût de nettoyage de milliers d’euros par an. À l’approche des beaux jours, les dégâts sont d'autant plus visibles.
Ainsi, à Orléans, 17 plaintes ont été déposées en 2022. Porteurs de différentes maladies (trichomonase, salmonelles et toxoplasmose), les pigeons et leurs fientes représentent pourtant peu de risque pour la santé humaine.
Seuls les maires, sur qui repose la responsabilité d’assurer la salubrité publique, ont le droit de réguler leur population. Pour ce faire, le gazage est souvent utilisé. Cette technique est légale, mais "cruelle", selon Amandine Sanvisens, co-fondatrice de l'association Paris Animaux Zoopolis (PAZ) : "Les volatiles sont entassés dans des caissons, dans lesquels on injecte du CO2",affirme la militante pour la cause animale.
La mort est lente, et, parfois, si le dosage est mal effectué, ils peuvent être congelés vivants. Les oiseaux sont ensuite envoyés à l'équarrissage. Ces opérations de destruction sont inutiles à long terme
Amandine Sanvisens, co-fondatrice de l'association PAZ
Des méthodes non-létales existent
Pourquoi ne pas modifier l’environnement afin de le rendre moins attractif à ces animaux ? L’association préconise l’installation de pigeonniers contraceptifs dans lesquels les œufs seront stérilisés en les secouant. On ne berne pas un pigeon en cassant ses œufs, il faut lui faire croire qu’ils sont encore là.
À Orléans, la municipalité demande à un prestataire de réguler la population des volatiles. En 2022, 1209 pigeons ont ainsi été gazés, 281 de moins que l’année précédente.
Selon Capucine Fedrigo, conseillère municipale, d'autres méthodes seraient déjà à l'étude : "Nous nous sommes rapprochés de Brest qui utilise une alternative à base d’hormones depuis plus de 15 ans. Nous allons également acheter du maïs contraceptif maintenatnt que nous savons qu'il y a peu de risque que cela impacte d’autres espèces." Tout en rappelant que la maîtrise de la population de pigeon demeure un enjeu important pour la biodiversité : "Là où il y a des pigeons, les autres oiseaux disparaissent."
De son côté, Amandine Sanvisens vitupère : "Ces élus utilisent l’argent public, mais ont-ils assisté au gazage des pigeons ? L’excuse des villes est toujours la même : 'Nous ne voulons pas arrêter tant que nous n’avons pas trouvé mieux', alors nous les interrogeons : est-ce que vous verrez une différence si vous arrêtez ? Je suis persuadée qu’il n’y en aura aucune !"
Faire évoluer les mentalités
Depuis la publication de l'enquête, Tours a cessé de gazer les pigeons. Betsabée Haas, adjointe à la biodiversité et à la nature n'est pourtant pas convaincue par les graines contraceptives : "Cela n’a pas d’effet dans le temps et il y a un autre souci : le produit utilisé ne serait pas légal en France." explique-t-elle. "On va plutôt tenter l’utilisation de coupelles qui réflèchissent la lumière pour éloigner les oiseaux. Je table sur les campagnes de communication pour faire évoluer les mentalités. On suit les dossiers, on envoie des courriers aux gens pour qu’ils fassent le nécessaire."
Autre solution : inciter les pigeons à s'installer ailleurs. Problème : un pigeonnier coûte 15 000 euros, ensuite, sans compter le fonctionnement. La ville deTours en comptabilise deux "Celui des Prébendes est mal situé" déplore Betsabée Haas. "Il est sous de grands arbres, il faut connaître les us et coutumes des pigeons pour qu’ils acceptent le lieu. Nous envisageons d’en installer de nouveaux, peut-être à Sainte Radegonde ou dans le quartier Colbert, mais auparavant, nous avons lancé une expertise."
Tours comme Orléans ont constaté que leurs méthodes n’ont des effets qu’à court ou moyen terme par rapport aux problématiques de salissures. Elles comptent plus sur une prise de conscience des humains. "Le pain est très mauvais pour un pigeon. Il faut diminuer voire cesser l’apport de nourriture" aux oiseaux par les passants, souligne Capucine Fedrigo
La LPO a observé que les effectifs restaient globalement stables en France. Mais à part Paris, aucune ville n’a demandé à comptabiliser le nombre de pigeons.