Gil Avérous, fraîchement nommé ministre des Sports, veut rester maire de Châteauroux : ce cumul est-il légal ?

Gil Avérous a pris officiellement ses fonctions de Ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative ce lundi 23 septembre. Si sa première adjointe refusait de prendre sa suite en novembre prochain, Gil Avérous a fait savoir qu'il souhaitait conserver son mandat de maire de Châteauroux. Un cumul étonnant qui questionne l'opposition.

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Il ne cache pas ses ambitions. Gil Avérous (divers droite) voudrait rester maire de Châteauroux tout en assurant ses nouvelles fonctions de ministre des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative. Gil Avérous a en effet déclaré à nos confrères de France Bleu Berry : "Je serai présent au conseil municipal cette semaine (jeudi 26 septembre, NDLR). Je ne vais pas laisser la ville de Châteauroux". Gil Avérous attendait le feu vert du Premier ministre pour cumuler les deux fonctions, comme c'est le cas de plusieurs autres membres du gouvernement.

Sa première adjointe pour assurer l'intérim ?

En juin dernier, Gil Avérous ne s'était pas présenté aux élections législatives pour donner la priorité à son mandat de maire. "J’ai pris l’engagement devant les Castelroussins d’être maire jusqu’en 2026 et même exprimé ma volonté d’aller au-delà", déclarait-il à nos confrères de la Nouvelle République. Et Gil Avérous l'affirme, "cette promesse tient toujours".

Il a proposé à sa première adjointe, Chantal Montjoint d'assurer l'intérim pendant ses missions ministérielles. Elle réserve sa réponse pour le moment et a demandé un délai de réflexion. Si elle venait à ne pas accepter, alors Gil Avérous, l'a annoncé, il conserverait ses fonctions. "Les compétences au quotidien seront réparties sur les adjoints, mais je resterai maire". Comme ultime argument, Gil Avérous brandit : "Je ne veux surtout pas m'enfermer dans un ministère qui m'isolerait de la réalité du terrain". Des arguments qui étonnent du côté de l'opposition. 

Que ce soit l'une ou l'autre, ce sont des fonctions à plein temps. Ministre avec deux ministères, celui des sports et de la jeunesse, il n'y a pas forcément le temps d'être maire à côté, notamment dans une période budgétaire où il faut qu'il aille négocier pour ne pas avoir une baisse du ministère des Sports. C'est une erreur de vouloir cumuler les deux.

Delphine Chambonneau, conseillère municipale d'opposition socialiste

Un cumul étonnant, mais légal

Si le cumul de maire et de ministre nous paraît étonnant, c'est qu'il était d'usage depuis 1997, soit sous Lionel Jospin, de ne pas cumuler ces deux postes. Une charte déontologique allait de pair avec un accord plus moral que légal. Mais une entorse avait déjà été faites en Macronie avec Rachida Dati, qui, bien que ministre de la Culture, avait conservé son mandat de maire du 7 e arrondissement de Paris.

Avec ce nouveau gouvernement, la rupture est actée. Le nouveau ministre délégué chargé des transports, François Durovray, restera président du conseil départemental de l'Essonne. Fabrice Lohier, chargé de la mer, reste maire de Lorient. Et Nicolas Daragon ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien conserve ses fonctions de premier édile de Valence. Gil Avérous prend donc le même chemin que ses confrères. Il y a pourtant plusieurs lois qui interdisent le cumul des mandats, dont la dernière en date, celle du 14 février 2014. "Aujourd'hui, rien n'interdit à un ministre d'être maire, il n'y a rien dans la loi, c'était plutôt une coutume très établie", explique Louis Le Foyer du Costil, avocat en droit public, spécialiste du droit électoral. Il poursuit, "si la loi ne mentionne pas d'interdiction de cumul de maire et ministre, c'est peut-être parce que ministre n'est pas un mandat, mais une fonction".

"Le problème, c'est qu'il n'est pas juste maire, il est aussi président de l'agglomération et vice-président du conseil départemental de l'Indre"

Gil Avérous semble avoir changé d'avis entre l'annonce de son remplacement par sa première adjointe et ce conseil municipal du 26 septembre, qu'il décide de conduire malgré ses nouvelles fonctions ministérielles. "Le conseil municipal de ce soir n'a aucun enjeu budgétaire. Il pourrait se faire représenter par sa première adjointe. Pourtant, il sera présent alors qu'il pourrait être dans son ministère en train de régler ses problèmes budgétaires", s'étonne Delphine Chambonneau, l'élue d'opposition.

Est-ce le caractère éphémère de ce gouvernement qui le pousse à vouloir garder ses fonctions de maire ?  Pour Louis Le Foyer du Costil, il est clair "qu'une fois qu'on passe la main, c'est un peu délicat de revenir. C'est à double tranchant. Soit les électeurs lui en tiennent rigueur, de ne pas avoir tenu sa promesse de rester maire et à ce moment-là, il perd des points politiquement, soit il gagne une stature nationale qui au contraire l'aide". Une analyse complétée par l'élue d'opposition socialiste : "Quand on tient bien sa majorité, on laisse son poste de maire et lorsqu'on est plus ministre, on le récupère". Dephine Chambonneau s'interroge alors "est-ce qu'il n'y a qu'en sa première adjointe en qui il a vraiment confiance pour récupérer son poste ?".

La socialiste y voit aussi une autre raison, cette fameuse promesse faites aux électeurs de Châteauroux de ne pas les abandonner. "Je pense qu'il se sent tenu par cette décision. Le problème, c'est qu'il n'est pas juste maire, il est aussi président de l'agglomération et vice-président du conseil départemental de l'Indre".

Le risque du conflit d'intérêts

Un autre risque plane sur ce cumul des mandats, celui du conflit d'intérêts. "On ne peut pas à la fois être contrôlé et contrôleur, c'est ce qu'on appelle la prise illégale d'intérêt. Et cela peut aussi arriver à des gens de bonne foi", souligne Louis Le Foyer du Costil.

Dephine Chambonneau précise à ce sujet : "On sera toujours vigilant aux conflits d'intérêts. Mais on attend aussi tous d'un élu qui devient ministre, qu'il aide son territoire et qu'il fasse bouger les choses. Pour avoir travaillé aux côtés de Michel Sapin lorsqu'il était ministre du Travail, j'ai vu qu'un ministre n'aide pas forcément son territoire, car les conflits d'intérêts arrivent très vite. On a parfois les mains plus libres quand on n'est pas au gouvernement, pour pousser et appuyer son territoire".

Gil Avérous fera-t-il une annonce particulière concernant le cumul de ses fonctions ce soir en conseil municipal ? Pas sûr, parce qu'il a jusqu'en novembre pour donner ou non sa démission et laisser son fauteuil à Chantal Montjoint.

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