Loir-et-Cher : un stock de 225 masques de protection respiratoire réquisitionné par les gendarmes

Une entreprise du Loir-et-Cher qui fournit les pompes funèbres en matériel de protection a reçu la visite des gendarmes le vendredi 17 avril 2020. Son stock de 225 masques de protection respiratoire KN95 a été réquisitionné. Une enquête a été ouverte par le Parquet de Blois. Le patron conteste. 

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Je ne comprends pas pourquoi mon stock de masques a été saisi par les gendarmes. Ils étaient à destination de mes clients des pompes funèbres qui ne peuvent pas travailler sans masques. Rien dans le décret du 23 mars 2020 ne l'interdit. 

Le responsable de l'entreprise Fimo à Lestiou dans le Loir-et-Cher n'en revient toujours pas. Le vendredi 17 avril à 8h30, la brigade de recherche d'Orléans et la brigade de gendarmerie de Mer sont arrivés à l'entreprise Fimo, spécialiste de l'outillage et de matériel de protection pour les pompes funèbres. "Ils ont perquisitionné l'entrepôt et ont pris 225 masques en KN 95" que je réservais à mes clients des pompes funèbres qui n'en ont plus depuis longtemps."

Ces masques, le chef d'entreprise les a commandés via une autre entreprise de son secteur en Chine, et les a mis à la vente sur son site internet, certain d'être dans son droit et de rendre service.

Nicolas Fimo a acheté 225 masques à 3,50 euros l'unité hors taxes pour les revendre à 5,20 euros chacun.  "Dans l'article 12 du décret du 23 mars 2020, on parle de masques de protection N 95 fabriqués en France qui seraient réquisitionnés. Pas des masques KN 95 importés."
 

Le décret du 23 mars 2020 sur la possible réquisition de masques en question

Dans l'article 12 de ce fameux décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, il est écrit : (extrait)

Afin d'en assurer la disponibilité ainsi qu'un accès prioritaire aux professionnels de santé et aux patients dans le cadre de la lutte contre le virus covid-19, sont réquisitionnés :
  • Les stocks de masques de protection respiratoire de types FFP2, FFP3, N95, N99, N100, P95, P99, P100, R95, R99, R100 détenus par toute personne morale de droit public ou de droit privé ;
  •  Les dispositions ne sont applicables qu'aux stocks de masques déjà présents sur le territoire national et aux masques produits sur celui-ci. Des stocks de masques importés peuvent toutefois donner lieu à réquisition totale ou partielle, par arrêté du ministre chargé de la santé, au-delà d'un seuil de cinq millions d'unités par trimestre par personne morale. Le silence gardé par ce ministre plus de soixante-douze heures après réception d'une demande d'importation adressée par cette personne ou l'importateur fait obstacle à la réquisition.

Le décret mentionne donc les masques N 95 (norme européenne) et non KN 95 (norme chinoise) comme ceux de l'entreprise Fimo. Et c'est cette subtilité que pointe l'avocat de l'entreprise : "Par ailleurs, le décret stipule que les réquisitions concernent les masques produits en France. Or ceux de mon client ont été produits en Chine et importés."

Pour Maître Pascal Lavisse, avocat au barreau d'Orléans, "dans cette affaire rien n'a été fait dans les règles. Non seulement, rien n'a été notifié à mon client. On ne sait pas s'il s'agit d'une saisie ou d'une réquisition. Il a été auditionné sans avocat. Et avec ces textes d'exception rédigés à la va-vite qui changent chaque jour, on est dans une zone de non-droit. Comment voulez-vous que les entrepreneurs s'y retrouvent ? Il s'agit d'une petite entreprise avec un patron qui voulait rendre service."
 

Document du ministère de l'action et des comptes publics sur l'importation de masques

Des masques pour rendre service à des pompes funèbres démunies

Au-delà du droit, l'avocat de l'entreprise Fimo fait le constat d'un manque de masques criant dans les pompes funèbres : "L'entreprise Fimo a 500 clients des pompes funèbres dans toute la France. Ces entreprises demandent à être reconnues comme prioritaires pour l'approvisionnement en masques depuis le 28 mars et rien n'est fait. Ils prennent des risques à réaliser les mises en bière sans protection. Mon client a juste assisté des personnes en danger en leur procurant des masques qui leur manquent cruellement." 
 
Nicolas Fimo lui, conteste toute infraction et demande la restitution immédiate de son stock de masques, mais pour le Parquet de Blois, cette affaire nécessite une enquête. "Il ne s'agit pas d'un très gros volume. Il n'est pas question de répression mais il faut être attentif à ce qui est fait avec ces masques importés. L'enquête nous permettra de vérifier la provenance et la destination de ces masques", explique Frédéric Chevallier, procureur de la République de Blois.

 
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