Législatives : la santé, l'agriculture et l'emploi, sujets clivants du débat de la 1ère circonscription du Loir-et-Cher

France 3 Centre-Val de Loire se mobilise pour vous faire vivre la campagne des élections législatives 2022. Retour sur les temps forts du débat entre cinq candidats en lice sur la 1ère circonscription du Loir-et-Cher, une émission animée ce mercredi 25 mai par Franck Leroy.

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Cinq candidats étaient invités à débattre ce mercredi 25 mai sur le plateau de France 3 Centre-Val de Loire. L'enjeu : l'élection législative de la 1ère circonscription du Loir-et-Cher. Des thématiques fortes, aussi bien du point de vue local que national, ont été évoquées, comme l'accès à la santé, l'emploi ou encore l'agriculture.

Les cinq candidats présents étaient, par ordre alphabétique :

  • Reda Belkadi, ingénieur en informatique et candidat investi par la France insoumise et la Nouvelle union populaire, écologique et sociale (Nupes)
  • Malik Benakcha, chef d'entreprise et conseiller municipal de Blois, investi par les Républicains pour l'union de la droite et du centre avec l'UDI et le Nouveau Centre
  • Michel Chassier, conseiller régional et candidat du Rassemblement national
  • Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture, élu en 2017 mais démissionnaire après avoir été nommé ministre des Relations avec le Parlement
  • Hervé Mesnager, vice-président et candidat du Parti radical de gauche

Quatre autres candidats de la circonscription n'étaient pas présents. Il s'agit de Fabienne Pomi, du Parti animaliste, d'Alain Lombard pour Lutte Ouvrière, de Frank Martin pour Reconquête et de Gildas Vieira, du mouvement La France autrement.

Au cours de quelque 42 minutes d'échange, les candidats ont abordé les problématiques de la désertification médicale, de la rémunération des agriculteurs, de l'emploi ou encore du développement touristique. 

Voir le débat en vidéo :

Sur l'accès au soin, "on n'a pas mis les moyens suffisants"

La première circonscription du Loir-et-Cher est stratégique, économiquement et politiquement, puisqu'elle regroupe les cantons de Blois, la préfecture du département, ainsi que Montrichard, Vineuil et Contres.

Et dans cette circonscription, comme dans le reste de la région, il devient difficile de trouver un médecin. L'accès au soin a été le premier sujet du débat, alors que plusieurs services d'urgence en Centre-Val de Loire ont dû fermer ponctuellement ou en continu, comme à Orléans, Amboise, Chinon ou plus récemment Dreux. En Centre-Val de Loire, il y a un généraliste pour 1450 habitant, et 4 généralistes sur 10 ont déjà plus de 60 ans.

Cette pénurie "touche à la fois la partie ville" de la circonscription, et les cantons plus ruraux, fait observer Malik Benakcha, le premier candidat invité à s'exprimer. "Il y a eu des actions mises en place" sous le premier quinquennat, "mais de façon inaboutie", affirme le candidat LR. "On n'a pas mis les moyens suffisants pour former plus d'étudiants pour permettre de rectifier cette désertification."

La proposition du candidat : faire venir 4000 docteurs "juniors", des étudiants en fin d'internet, dans les secteurs sous-dotés. Il s'agit d'une proposition de campagne de Valérie Pécresse, plutôt mal accueillie d'ailleurs par les syndicats d'internes.

Le candidat de la majorité, Marc Fesneau, a quant à lui rappelé le bilan du précédent quinquennat : suppression du numerus clausus en 2021, arrivée d'une fac de médecine à Orléans en 2022 et passage du nombre d'étudiant formés dans la région de 240 à 500.

Seul problème : ces réformes ont tardé à arriver, et il faut entre dix et douze ans pour former un médecin. "On a besoin sur le temps long de continuer à poursuivre ces efforts, en mettant des moyens aussi dans le milieu hospitalier", insiste le ministre de l'Agriculture, et aussi "de monter en puissance en faisant en sorte qu’il y ait des places de formation". 

On vit un moment de pénurie, à la fois rural et urbain. [...] Le temps qu'une éclaircie arrive, ce sera deux, trois, quatre ans. Je crois qu'on est sur la très bonne pente, mais c'est vrai que le moment de pénurie est très difficile

Marc Fesneau, candidat MoDem-Ensemble dans la première circonscription du Loir-et-Cher

Le candidat de l'union de la gauche, Reda Benakcha, a regretté pour sa part que les leçons du covid n'aient pas été retenues. Au moment du covid, "alors que les alertes avaient été données depuis bien longtemps", le système de santé a beaucoup souffert du manque de moyen, a rappelé le candidat LFI. Ce qui manque, estime-t-il, c'est "une réelle stratégie nationale". Car "outre l'accès géographique au soin, il faut prendre en compte l'accès financier. On sait que beaucoup de Français renoncent à se soigner faute de moyens."

Des plans à long terme bousculés par l'urgence médicale

Sur la solution à long terme, à savoir l'augmentation de la formation des médecins, aucun réel désaccord entre les candidats n'est apparu. En revanche, à court et moyen terme, les discours achoppent. À l'extrême-droite, Michel Chassier a évoqué l'implantation de maisons de santé pluridisciplinaires (MSP). Ces plateformes, comme celle de Montrichard, sur la circonscription, "fonctionnent très bien" à court terme estime le candidat du RN. "Les maisons médicales peuvent être une solution... à condition de mettre des médecins dedans.

Hervé Mesnager, le candidat du Parti radical de gauche, a pour sa part souhaité un "plan national d'installation des médecins", négocié entre l'État et les régions pour répondre de manière décentralisée et à moyen terme l'offre médicale. A court terme, le modèle du médecin libéral "a quand même une limite". "Jusqu'à nouvel ordre, quand on paie le médecin, le remboursement se fait par la cotisation des salariés et des employeurs. La solution pourrait être de ne plus conventionner de médecins dans les zones où les médecins sont en surnombre." Une fausse bonne idée, rétorque Marc Fesneau. "Dans le Loir-et-Cher, tout le département est assez sous-doté. La pénurie est désormais de niveau national : on va répartir la pénurie. Autant essayer d'organiser des systèmes, et dans trois, quatre ans on aura déjà bien avancé".

La bataille du chômage est-elle vraiment gagnée ?

Sur l'économie, et en particulier l'emploi, là encore, la plupart des candidats se sont accordés sur le fait qu'il y avait du "mieux" en 2022. "On a beaucoup de mal à suivre la réalité", estime toutefois Michel Chassier, prenant pour exemple les chiffres du chômage. 

Cette observation est effectivement fondée : les pouvoirs publics s'appuient souvent sur les catégories A, B et C de chômage pour faire la promotion de leurs efforts, voire seulement la catégorie A.

Or, en augmentant les entrées en formation, nombre de demandeurs d’emploi glissent artificiellement d’une catégorie à l’autre et sortent de ces radars, ce qui a été le cas de 62 800 personnes au 4e trimestre 2021.

Le renforcement de la surveillance des chômeurs et des radiations a permis de supprimer 52 000 noms des listes, soit un bond spectaculaire de 44,9% sur un an. Et le "halo" du chômage, défini par l'Insee pour compter les personnes inactives et en recherche d'emploi, même lorsqu'elles ne sont pas inscrite à Pôle emploi, a quant à lui légèrement augmenté depuis un an, surtout chez les jeunes.

Fin de "l'assistance" contre SMIC à 1500 euros

Un chômage pas tant en baisse que ça, mais des secteurs toujours sous tension, qui peinent à recruter : c'est le paradoxe de l'emploi. Pour Malik Benakcha, le candidat des Républicains, il y a "une distorsion entre les revenus de l'assistance et les revenus du travail". "Aujourd'hui il est nécessaire de donner envie aux gens de travailler, et que travailler permette aux gens de vivre mieux. Actuellement ce n'est pas la situation."

L'autre point du candidat LR concerne les infrastructures. Le conseiller municipal est en effet un fervent défenseur de l'idée d'une deuxième sortie de l'autoroute A10 à Blois, un "vieux serpent de mer" selon lui.

Critiquée par la municipalité socialiste et ses alliés écologistes, l'idée d'une deuxième sortie d'autoroute permettrait, pour Malik Benakcha, d'encourager des entreprises à s'installer sur un foncier disponible, devenu attractif. Et l'arrivée d'industriels et de PME serait à son tour source de proposition d'emploi. Localement, le maire de Blois, Marc Gricourt, se disait lors de sa dernière intervention sur le sujet "très sceptique" tant sur les retombées dans l'économie locale que sur les surfaces agricoles et naturelles à sacrifier pour ce projet.

Si la question des infrastructure routière n'a pas été reprise du côté gauche du plateau, celle de l'assistanat, elle, a été critiquée par les candidats du PRG et de LFI. "Ce n’est pas par envie d’être dans l’assistance que les gens ne travaillent pas", rétorque Reda Belkadi. "Les gens ont envie de travailler, mais ils veulent des emplois durables, de qualité. Pas d'enchaîner des CDD et des emplois précaires."

Aujourd’hui on voit que le travail paie de moins en moins. On voit que les salaires sont bien trop bas par rapport aux prix qui augmentent. Nous préconisions 1400 euros nets de Smic, maintenant compte tenu de l’inflation nous préconisons 1500 euros. Nous voulons que le travail soit revalorisé.

Reda Belkadi, candidat LFI-Nupes dans la première circonscription du Loir-et-Cher

"C'est aussi aux employeurs d'être attractifs", tance quant à lui Hervé Mesnager, qui ne croit "absolument pas" aux "histoires que raconte la droite" sur l'assistanat. "Dans un marché du travail qui s’équilibre entre employés et employeurs, l’employé lui aussi cherche où il va. Si tout le monde n’offre que des smic à 1270 euros nets par mois, l’employé va chercher ailleurs, et c’est très bien !"

Attaqué sur le bilan de la Macronie à sa gauche comme à sa droite, Marc Fesneau se retrouve obligé de jouer défensif sur cette phase. D'abord au sujet du chômage : rien n'est caché, estime-t-il, "les calculs sont les mêmes que depuis dix ans". Ensuite, "on peut quand même constater que la tendance est plutôt bonne et baissière. Je le dis avec prudence et modestie : ça va mieux !"

L'agriculture, le nerf de la guerre

Tous d'accord pour améliorer l'offre de tourisme, davantage vers les sites patrimoniaux bien installés à droite, et davantage vers le tourisme naturel à gauche, les candidats se sont en revanche écharpés sur un autre secteur-clé de l'économie : l'agriculture.

Malik Benakcha a fustigé la "sur-transposition" des normes européennes, autrement dit l'instauration de normes plus contraignantes en France que celles qui découleraient de la simple application des directives européennes, ce qui pénalise les producteurs français.

Par ailleurs, il estime qu'on "n'exige pas à l'importation les mêmes normes qu'on impose à nos agriculteurs. Avec le CETA, on leur impose des règles et ils sont concurrencés par des produits qui profitent de farines animales et d'hormones de croissance". "Il n'y a ni farines animales ni hormones de croissance, puisqu'elles sont interdites sur le territoire !" conteste Marc Fesneau, également ministre de l'Agriculture.

De fait, l'affirmation du candidat LR doit être prise avec prudence. Selon le Monde, qui s'appuyait sur des travaux d'experts, le gouvernement s'est effectivement trompé en affirmant, en juillet 2019, que le CETA ne permettrait pas aux producteurs canadiens d'exporter en Europe, sans en informer les consommateurs, de la viande de bœufs nourris aux farines animales.

Selon l'UFC Que Choisir, les traités internationaux font effectivement office de "Cheval de Troie" pour les farines animales. Lesquelles se nomment désormais protéines animales transformées (PAT) et sont censées provenir uniquement d'animaux sains.

En revanche, l'importation de viande issue d'animaux traités aux hormones reste interdite en Europe, indiquent de leur côté les vérificateurs de la chaîne internationale francophone TV5 Monde. Les éleveurs canadiens ont même dû créer une filière spécifique pour répondre à cette exigence sanitaire européenne.

Marc Fesneau contre-attaque

Quant à la question de la sur-transposition des normes, elle n'est "pas nouvelle", indique le ministre-candidat. "On a sur-transposé dans ce pays depuis des années, pas depuis ce quinquennat." "La loi qui a fait grand-mal, c'est la loi qui a été votée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la loi LME, qui a complétement libéralisé au nom du principe que les prix soient les plus bas", tacle Marc Fesneau.

Votée en 2008, cette "loi de modernisation de l'économie" avait provoqué l'ire des agriculteurs, au point que son successeur François Hollande avait promis de la réviser début 2016. "Il faut qu’on rompe avec ces pratiques commerciales qui défavorisent les agriculteurs. Parce que s’il n’y a pas de rémunération de l’agriculture, ce n’est pas la peine de parler de souveraineté alimentaire." En revanche, les lois Egalim 1 et 2 ont à l'inverse encouragé les collectivités à favoriser les producteurs locaux, estime le ministre.

Sur "la proximité, le localisme, l'approvisionnement local", les lois Egalim viennent en effet d'une "bonne intention", concède Michel Chassier, "mais qui est très difficile à mettre en œuvre". Dans la région, "on voit qu'on a des problèmes d'approvisionnement, notamment dans les lycées. Il y a un grand risque qu'à la rentrée prochaine il y aura un problème de hausse des prix dans la restauration collective."

Chez les deux candidats de gauche aussi, le thème de l'agriculture est stratégique. "Nous sommes dans une région qui a des potentialités immenses, surtout en termes de reconversion", clame Hervé Mesnager. Longtemps une "terre de grande culture", le Centre-Val de Loire voit de plus en plus se développer une "agriculture de proximité", notamment dans le maraîchage.

Le défi est complexe : il s'agit à la fois de nourrir la région, de nourrir la France et de nourrir le monde. Est-ce qu'on est capable, dans des conditions normales, de redevenir la puissance exportatrice que nous étions, tout en ayant cette agriculture de proximité.

Hervé Mesnager, candidat du Parti radical de gauche dans la première circonscription du Loir-et-Cher

Pour Reda Belkadi aussi, il faut "assumer que l'agriculture est un sujet stratégique, et qu'il faut investir massivement". Ce qui passe par le fait de redonner de l'attractivité à un métier "exposé aux problèmes de santé, à la solitude, critiqué".

Et cela passera à son tour par l'accélération de la transition de l'agriculture vers le bio "car l'agriculture conventionnelle empoisonne nos agriculteurs, on observe des taux de cancers alarmants". L'intention d'interdire le glyphosate, évoquée au début du premier quinquennat Macron, n'ayant pas été suivie d'effet, "il faudra assumer d'investir et d'accompagner les agriculteurs" à passer au bio.

45 secondes pour convaincre

L'émission s'est terminée sur les 45 secondes attribuées à chaque candidat pour convaincre, face caméra, les électeurs. "En votant Marine Le Pen le 24 avril, vous avez été nombreux à exprimer un désir de changement, d'apaisement et de justice", a débuté Michel Chassier. Présentant le Rassemblement national comme la seule opposition à Emmanuel Macron, il a promis de continuer à porter les combats contre l'inflation, mais aussi sur "la sécurité et contre l'immigration incontrôlée et ses conséquences", des thèmes qui ne sont pas du tout apparus lors de ce débat.

"Je défendrai les Loir-et-Chériens et notre territoire", a pour sa part affirmé Malik Benakcha, jouant la carte de son attachement au département. Reda Belkadi, lui, a joué celle de la jeunesse et de l'optimisme autour de l'accord "historique pour gouverner et pas seulement s'opposer", décroché par la Nupes. "Le président a besoin d'une majorité pour gouverner dans la stabilité", a pour sa part fait valoir Marc Fesneau, candidat de la majorité sortante.

Candidat de la "gauche du réel", Hervé Mesnager a clos l'émission en rappelant l'attachement de son parti à l'Europe, à la laïcité et à la République, consacrant les dix dernières secondes de son intervention à un message de solidarité avec l'Ukraine.

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