Avec la guerre en Ukraine, les salariés d'une usine automobile en sursis

Une usine fabricant des bougies d'allumage à Meung-sur-Loire, dans le Loiret, a fortement ralenti son activité depuis le mois d'avril en raison de la guerre en Ukraine. Beaucoup redoutent le plan de licenciement, voire la fermeture du site début 2023.

Les salariés de l'usine NGK Spark Plug de Meung-sur-Loire sont inquiets. Ou, pour reprendre les termes de deux d'entre eux, que France 3 a pu joindre, "on est absolument dans la merde". Depuis début septembre, Alexis* et Bernard* restent chez eux certains jours, en étant payés mais sans chômage partiel.

"Nous avions d'importants volumes destinés à la Russie"

La raison : la baisse de l'activité du groupe japonais NGK, qui fabrique des bougies pour le secteur automobile, depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022. Un mail de la direction de l'usine, daté du 12 septembre et que France 3 a pu consulter, indique une baisse de la charge de travail de 40% "suite à l'arrêt du marché avec la Russie".

Contactée par France 3, la direction du site précise que "seulement une partie du personnel (14 salariés)" d'un des deux ateliers est concernée par cette réduction d'activité, "et ceci six jours par mois en moyenne". "L'atelier de montage et d'assemblage n'est pas trop touché", confirment Alexis et Bernard, "mais dans l'atelier d'usinage il n'y a que deux lignes de production qui tournent sur cinq".

"Nous avons en effet été particulièrement affectés par le déclenchement de la guerre en Ukraine", concède le directeur de l'usine, Bruno Temps. Les conséquences du conflit ont en effet "eu un impact important sur le portefeuille de commandes dans la mesure où nous avions d'importants volumes destinés à la Russie".

Un "avenir sombre" pour le site de Meung-sur-Loire

À la mi-avril, Damien Germès, président de NGK pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique), avait annoncé à ses salariés un "avenir sombre" en raison de l'effondrement du marché russe. Il promet alors des nouvelles pour le mois de juin, puis pour le mois de septembre. Mais le siège de NGK EMEA, situé en Allemagne, et celui du groupe, au Japon, restent silencieux. Au total, NGK emploie environ 12 000 personnes dans le monde à travers 32 filiales.

"La situation a évolué défavorablement au cours des dernières semaines et mois", regrette encore Bruno Temps. Par-dessus le marché, la crise énergétique et l'inflation croissante se sont rajoutées aux difficultés accumulées au cours de l'année. 

Toujours sans information sur leur avenir, les salariés attendent désormais une réponse pour le mois de janvier. Après un printemps et un été sous tension "les fêtes de Noël vont être sympa", maugrée Alexis. L'absence de syndicats et le manque de représentativité au Comité social et économique (CSE) y sont pour beaucoup, selon lui, dans l'absence de dialogue entre les salariés, la direction et le siège.

"Le jour où M. Germès annonçait un avenir noir, le matin même il avisait au personnel russe leur licenciement", a plaidé auprès du CSE le président de NGK France, Shunichi Inamae, selon un compte-rendu daté du 23 mai 2022. "M. Germès avait promis des nouvelles 'dans les semaines à venir'. En fin de compte ce sera dans les mois à venir", a promis le dirigeant.

78 salariés en sursis

En attendant, les 78 travailleurs encore employés par NGK à Meung-sur-Loire rongent leur frein, sans savoir ce qui les attend. Certains ont déjà quitté l'entreprise. "Cet été, on est partis en vacances avec la tête bien farcie" d'anxiété, s'agite Alexis, qui craint jusqu'à "30 licenciements", voire une fermeture du site.

Parmi nous il y a des gens qui ont un crédit sur la maison, sur la voiture, des gens qui ont une famille. Si l'usine ferme, où est-ce que 80 personnes vont retrouver un boulot dans le même secteur, alors qu'on voit bien que l'industrie automobile est sinistrée ?

Alexis, ouvrier à NGK Meung-sur-Loire

De son côté, la direction dit entendre "les préoccupations qui sont légitimes ainsi que les inquiétudes". Mais, dans un contexte industriel lui-même compliqué et fluide, le groupe NGK insiste sur la nécessité de prendre le temps de mesurer la portée de ses décisions. En espérant que, d'ici-là, le ras-le-bol n'aura pas pris le pas sur l'inquiétude.

Pour préserver l'anonymat des intervenants, les noms marqués d'un astérisque ont été modifiés.

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